Dramatique, poignant, terrifiant, le film d'Alejandro Jodorowsky met les nerfs du spectateur à rude épreuve. On ne peut pas rester de marbre face à une telle oeuvre, on est obligé de compatir, de pleurer à chaudes larmes en assistant à la vie cauchemardesque du protagoniste. Elevé par une mère castratrice et par un père libertin, Fénix affronte un drame familial qui va le plonger vers une descente aux enfers effroyable. La réalisation est comme d'habitude flamboyante, le scénario est très bien exploité, riche en profondeur. Le réalisateur nous plonge dans le milieu du cirque dans un premier temps puis pose ses pions pour qu'ils évoluent de façon dramatique. Le film montre comment sont traités les patients d'un hôpital psychiatrique, ils sont considérés comme des petits garçons et au lieu de leur apporter de l'aide, ils cherchent à les infantiliser et à les rendre de plus en plus vulnérables au monde de la réalité. Traumatisé, déshumanisé, laissé, abandonné de tous, le protagoniste s'enfonce dans la démence. Au point qu'il ne sait plus lui-même qui il est. Il est victime d'hallucinations, il vit comme dans un autre monde, il ignore tout de ce qu'il se passe car il voit ses actions certes mais à chaque fois les fantômes qui le hantent prennent le dessus sur sa raison. C'est un homme ultraviolent, ultrasensible, conscient que ces caractéristiques associées font de lui un monstre. Jodorowsky veut donc démontrer à travers cette horrible vie que le passé d'un enfant joue un rôle considérable et essentiel sur son futur et lorsqu'il grandit, lorsqu'il atteint l'âge de majorité, il ne peut plus rien contrôler. Un enfant blessé ou torturé mentalement devient dès lors un dangereux psychopathe à l'âge adulte. Il est paranoïaque, il est pervers, il aime sans s'en rendre compte les horreurs qu'il fait, personne ne le défend, personne ne veut se soucier de sa folie, personne ne se rend compte de sa folie. Le protagoniste tue parce que pour lui, c'est sa seule façon de prouver à lui-même qu'il existe et que tout ce qui l'entoure existe. Le final apporte un souffle glacial, une surprise, un démantèlement. C'est l'amour qu'il porte envers une fille de son âge qu'il avait connue enfant et qu'il retrouve au final qui lui permet de se sortir de cette névrose. Mais ce moment de libération ne peut pas durer. Il va devoir rendre des comptes aux familles de tous ceux et celles qu'il a massacrés. Le film laisse alors place à une question fondamentale: pourquoi des parents irresponsables mettent-ils au monde un enfant dont ils ne s'occupent pas ? Fénix n'est ni innocent, ni coupable, il est simplement malchanceux. Sa malchance et son traumatisme combinés prouvent que les parents doivent être équilibrés et qu'ils doivent s'occuper de leurs enfants sans règlements de comptes personnels, sans perversions, sans doctrine s'ils ne veulent pas qu'ils deviennent l'image du protagoniste de ce long-métrage. Au final, Jodorowsky réalise et signe un drame psychologique réussi, un chef-d'oeuvre du genre!