Mars 2012, l’échec cuisant de Disney au box office avec « John Carter » (perte estimée d’environ 200 millions de $) fait couler beaucoup d’encre à Hollywood.
Quelques mois plus tard, c'est par le biais d’un autre film, « G.I Joe : Conspiration », suite du précédent opus signé Stephen Sommers et sorti en 2009, que l'affaire John Carter refait parler d’elle.
Le blockbuster réalisé par Jon M. Chu, annoncé au départ pour juin dernier, sortira finalement sur les écrans américains au printemps 2013, soit près de neuf mois après la date initialement prévue. De quoi se poser des questions.
Officiellement annoncé par le studio Paramount avec la garantie de pouvoir convertir à temps le film en format 3D, et d’offrir de ce fait un spectacle plus divertissant (et certainement plus rentable!), ne nous y trompons pas, les réels motifs de ce soudain changement de calendrier sont ailleurs, Jon M. Chu lui-même semblait abasourdi par la nouvelle.
Officieusement, mettons surtout en avant le mécontentement de certains spectateurs lors des projection-tests, en lien avec la mort rapide, dans les premières scènes, d'un personnage clé du premier film, Conrad « Duke » Hauser, interprété par Channing Tatum, ce même Tatum qui s'est offert le luxe d'aller chatouiller l'année passée, à 3 reprises, les cimes du box office via les 3 cartons « surprises » en salles qu'ont été « Je te promets – The Vow », « 21 Jump Street » et « Magic Mike ».
La Paramount, très frileuse de reproduire « l'effet John Carter », aurait dès lors investi un rab de billets verts pour des scènes supplémentaires, incluant le personnage incarné par l'acteur devenu populaire (comprenez bankable!), afin d'assurer un profit maximal au box office, et de surcroît planétaire, via l'argent amassé par la vente des tickets des séances 3D, notamment sur les marchés chinois, brésiliens et russes, gros consommateurs de cette technique.
Véritable intérêt artistique ou stratagème machiavélique de marketing ?
Ce qui est sûr, c'est que rarement les majors hollywoodiennes n'auront été autant dans l'expectative et dans l'incertitude face à l'avenir commercial de leurs produits.
OUTRAGEUSEMENT SCANDALEUX.
Nous n'avions jamais vu autant d'incohérences, de faux raccords, d'absurdités, de conneries réunis dans un même film au cinéma. Le spectacle burlesque est assuré sur tous les plans : scénario inexistant, personnages aux noms plus débilous les uns que les autres (Lady Jay, Cobra Commander, Destro, Firefly… ), méchant qui change de camp en milieu de course sous couvert d'un motif inadmissible, scène du premier opus recyclée au point d'avoir l'étrange impression de déjà-vu voire de flashback (le combat Storm Shadow / Snake Eyes), montage affligeant (que viennent faire Storm Shadow et Snake Eyes dans la montagne ?), fringues différentes d’un plan à l’autre, dessein incompréhensible des vilains (faire péter la planète en commençant on ne sait pourquoi par Londres ? Euh … Sorry, what ?), séquence involontairement hilarante en raison d'une traduction Google paresseuse de nos confrères américains (les mots « Abort, Ready et Arm » malencontreusement retranscrits en « Avortement, Prêt, Bras »), explosions de maquettes hideuses (reproduction de Londres, satellites dans l'espace) ... bref une exécrable purge pour les neurones, tout juste divertissante.
« G.I. Joe : Conspiration » n’en reste pas là, on peut également souligner l’incompréhension générale face à la disparition précoce du fameux personnage de Duke (Channing Tatum). La Paramount qui avait décidé la poursuite des prises de vues afin de maintenir en vie son personnage n’a finalement pas conservé lesdites séquences au montage final ? Stupide. Des millions de dollars honteusement gâchés !
Que dire des dialogues ? Des répliques complètement déglingos elles-aussi, avec comme meilleur exemple « Même s’ils arrivent à choper Storm, ils sont quand même aux antipodes ».
Les acteurs sont en en roue libre, cabotinent plein fer et n’ont strictement rien à foutre de la trame narrative du film. The Rock joue « Roadblock », le soldat bourrin crétin au sourcil levé, rôle similaire à la virgule près à ceux de « Doom » et « Fast Five ». Fort heureusement, il s’en donne à cœur joie et s’éclate comme il peut pour sauver les meubles.
Bruce Willis se croie dans « Red » ou le récent « Die Hard 5 » et joue la sempiternelle carte du militaire excommunié, las et fatigué de devoir reprendre du service. Vivement la retraite Bruce, la vraie. Eh oui, à force, on commence par le savoir par cœur que tu as « un peu de cholestérol ».
Adrianne Palicki, transfuge de Rachel Nichols, incarne Lady Jay, personnage féminin lambda interchangeable quand le benêt D.J. Cotrona (D.J. Cotroquoi ?) remplace le frenchy Saïd Taghmaoui en side-kick un peu geek.
Jonathan Pryce – « Zlatan (Ibrahimovic) », ah non pardon « Zartan » – se contente de froncer les sourcils pour figurer le double maléfique du président des Etats-Unis.
Et un incroyable tampon WTF pour le rappeur RZA, perdu au milieu de la débâcle, dans la peau de « Blind Master ».
Seuls Lee Byung-hun (« J’ai rencontré le diable ») et Ray Park (Andy Serkis version arts martiaux), qui incarnent respectivement le ninja blanc Sorm Shadow et le mutique Snake Eyes, tirent leur épingle du jeu, et prennent plaisir à se savater la gueule.
Derrière la caméra, Jon M. Chu, le mec qui a réalisé le biopic Justin Bieber et quelques volets de la saga « Sexy Dance » – v’là le CV – filme avec les pieds ce qu’on lui demande de filmer, notamment une immonde séquence d’attaque des Joe où l’on comprend que dalle dans le déroulement de l’action. Même la 3D – à priori son domaine de prédilection si l’on check sa filmo – récolte une mention calamiteuse, comprenez par là qu’elle vous grille la rétine.
Reste à saluer une scène (expéditive, dommage !) à peu près potable dans l’Himalaya (enfin plutôt devant un bon gros écran vert) où Ray Park castagne quelques ninjas façon acrobranche new age.
Bilan : Stephen Sommers avait au moins le mérite d’assumer la bouse qu’il filmait et le concept assez grotesque d’une adaptation ciné à partir de figurines en plastique. Jon M. Chu, lui, oublie l'autodérision, le spectacle divertissant, la fantaisie et décérèbre le truc. Avec « GI Joe : Conspiration », les popcorns goulûment avalés ont hélas un (sale) goût de merde.