« Au nom de tous les miens » est un film à part, pour bien des raisons. La première est quil est une version « courte », condensée en deux heures et 25 minutes, dune série télévisée qui durait elle une quinzaine dheures. Ensuite, il est un film emblématique pour toute une génération, qui découvrirent cette uvre dans sa version télévisée au début des années 80 et qui comprirent, grâce à elle, ce quétait vraiment lHolocauste et quelle en fut sa portée exacte car aucun professeur de collège ne lexpliquait alors avec une telle force. Mais « Au nom de tous les miens » est aussi un cas particulier pour une raison purement cinématographique : cest lune des rares voire la seule bonne fiction traitant de la Shoah. Qui a vu « Shoah », justement, de Lanzmann, et « Nuit et Brouillard » de Resnais, comprend tout de suite quil est impossible de traiter de ce sujet dune autre manière que par le documentaire, et les odieuses tentatives de Spielberg ou Benigni ne font que confirmer cette impression. Et pourtant, Robert Enrico, qui nest pas le plus délicat des cinéastes et que le public connaît surtout pour des films comme « Les Grandes Gueules », « Les Aventuriers » ou « Le Vieux Fusil », film traitant aussi de la seconde guerre mondiale mais étant beaucoup plus discutable, notamment à cause de son chantage à lémotion quasi systématique, parvient à sen sortir honorablement. Sil est à laise avec son récit, cest sans doute car Enrico sappuie sur celui, témoignage véridique, de Martin Gray, lhomme qui a vécu les événements ici narrés. Cet aspect réel apporte sans doute au film une crédibilité à ce quon aurait été en droit de juger « romancé » dans le cas contraire. Mais cest aussi parce quEnrico nen fait pas trop, même sil montre labjection, et se contente de retracer le destin dune vie qui, malheureusement, croisa lHolocauste, et en fut marquée à jamais. Quoiquil en soit, ce film est important, et honnête, et se doit dêtre montré à tous les enfants