Avec Roschdy Zem, Anouk Grinberg, Noémie Merlant...
De quoi ça parle ? Quand Abel apprend que sa mère Sylvie, la soixantaine, est sur le point de se marier avec un homme en prison, il panique. Épaulé par Clémence, sa meilleure amie, il va tout faire pour essayer de la protéger. Mais la rencontre avec Michel, son nouveau beau-père, pourrait bien offrir à Abel de nouvelles perspectives…
Mise en abyme
L'histoire de L'Innocent n'est pas sans rappeler celle de Louis Garrel et de sa mère, l'actrice et réalisatrice Brigitte Sy. Celle-ci a animé des ateliers de théâtre en prison et s'est mariée avec un prisonnier. Elle a fait de cette expérience le sujet de son premier long métrage, Les mains libres. Selon Louis Garrel, "L’Innocent, c’est le récit de ce mariage du point de vue du fils. C’est un peu le contrechamp." Il ajoute : "En revanche, quand ma mère s’est mariée en prison, j’avais 18 ans, je n’y étais pas. Par le biais de ce film, je me suis donc incrusté dans son mariage !" À l'instar de son personnage, il a longtemps côtoyé des prisonniers durant son adolescence, et s'entendait bien avec son beau-père. Malgré le socle autobiographique de ce long-métrage, il ne voulait pas en faire une chronique intimiste mais au contraire jouer avec le genre, "y compris celui de la comédie. Pour éviter le pathos de la dimension tragique. La relation d’une mère à son fils est une chose difficile à traiter au cinéma. On bascule facilement dans le viscéral. Plus on a l’esprit léger, mieux le film et le spectateur se portent."
Un film variété
La musique du film est composée de grands titres de variété française, comme Pour le plaisir d'Herbert Léonard, Nuit magique de Catherine Lara, Une autre histoire de Gérard Blanc ou encore I Maschi de Gianni Nannini. Il s'agissait de baigner dans l'univers musical du personnage de la mère. Louis Garrel explique : "François Truffaut disait que les gens aiment les chansons de variété car les phrases se rapportent à tout le monde. Les paroliers de chansons de variété, en deux phrases, on a l’impression qu’ils racontent notre histoire. J’ai essayé de faire un film « variété ». Pas seulement la variété des genres mais un film dans lequel tout le monde peut se reconnaître."
Un projet de longue date
À l'origine, L'Innocent devait être le deuxième film de Louis Garrel et succéder à Les Deux Amis mais le scénario a mis du temps à mûrir. Il a entretemps réalisé L’Homme Fidèle et La Croisade. Garrel a commencé l'écriture seul avant d'être rejoint par Tanguy Viel, un écrivain de romans policiers "existentiels qui aime s’emparer du genre pour raconter des choses intimes", puis par Naïla Guiguet, avec qui il avait travaillé sur La Croisade. "Tout ce temps a été très bénéfique pour le scénario", estime-t-il. Si Jean-Claude Carrière, collaborateur fidèle de Garrel, n'a pas participé à l'écriture, il avait toutefois lu le scénario : "Il m’a suggéré deux ou trois choses dont une que j’ai mise dans le film : le petit chat qui lèche ma chaussure et mange le caviar quand je suis au cimetière. Il avait aussi des idées de scénariste très visuelles."
Le titre
L'Innocent du titre fait référence au personnage de Roschdy Zem puis à celui de Louis Garrel. Ce dernier explique : "D’une certaine manière, quand on commet un délit pour des raisons nobles, on est un peu innocent. Ce qui, j’en conviens, n’est pas très moral au regard de la loi. C’est la fameuse phrase prononcée dans La Règle du Jeu de Jean Renoir, « Ce qui est terrible sur cette terre, c’est que tout le monde a ses raisons »."
Conseiller technique
Louis Garrel a fait appel à un ancien voyou, Jean-Claude Pautot, qui joue dans le film le complice de Roschdy Zem et celui qui dirige la répétition de la scène de ménage avec Noémie Merlant et Garrel en vue du braquage. Cet ancien détenu qui a fait 25 ans de prison a servi en quelque sorte de conseiller technique sur le plateau. Une maquette du décor du casse a été mise au point et Pautot a répété la scène avec ses amis, des anciens truands, selon la configuration des lieux. "Au bout du compte, je réalise que si je tiens compte de leurs indications en voulant être réaliste, je ne parviendrai pas à filmer la scène. Vient un moment, pour ce qui est de la perception de la scène, de la dilatation du temps, du montage alterné avec la règle du « pendant ce temps », le réalisme empêche le cinéma. Cela a été une séance de travail passionnante, un passage nécessaire pour arriver au final à une géométrie de cinéma", raconte le réalisateur.