"Guerre et paix : contrepèterie douteuse ?". C'est cet étrange et intrigant message que va découvrir un jour Christophe Honoré (réalisateur des Chansons d'amour, La Belle personne, Ma Mère...), punaisé sur sa porte. Le point de départ d'une introspection du cinéaste sur sa vie sentimentale et professionnelle, la famille qu'il a fondé, l'éducation de sa fille, mais aussi l'occasion d'un retour sur sa jeunesse.
Entre la sortie des Malheurs de Sophie, en 2016, plus grand succès en salles du réalisateur, et de Sorry Angel, son prochain long métrage qu'il a tourné cet été dans sa Bretagne natale, Christophe Honoré revient au roman (partiellement) autobiographique après une longue absence. Il s'agit de son 5ème roman, 20 ans après L'Infamille, son tout premier livre, et 12 ans après son dernier (pour adultes), astucieusement appelé Le Livre pour enfants. Précisons que l'auteur a également écrit une vingtaine de romans jeunesse, et des pièces de théâtre.
Si ce nouveau récit est avant tout le témoignage d'un père homosexuel à sa fille, écrit dans un climat anti mariage pour tous, Christophe Honoré parle aussi de littérature (et évoque notamment les auteurs qui peuplent sa bibliothèque), de cinéma, et des rapports entre écriture et cinéma. "Est-ce que le cinéma détruit l'écriture ? Puis: Est-ce que l'écrivain métamorphosé en cinéaste peut revenir à son état d'origine? Existe-t-il une malédiction touchant tous les écrivains qui se laissent tenter par le cinéma? Pourquoi la pratique de l'écriture scénaristique abîme-t-elle autant l'action d'écrire ? Que signifie écrire vite ?" (p.22-23)
Illustré avec quelques photos d'artistes ayant marqué le cinéaste et une époque (Cyril Collard, Bernard-Marie Koltès...), Christophe Honoré passe également longuement en revue les films qu'il veut conseiller à son enfant. "Je n'ai pas tant de fois était assis à côté de ma fille dans une salle de cinéma. Pourtant, avant sa naissance, j'avais établi un programme idéal, une corpus de films complexe et inattaquable qui serait comme un viatique, l'assurance pour elle-même de pouvoir toujours réinventer sa vie grâce au cinéma" (p.78-79). Quelques pages compilant ainsi en quelque sorte les films qu'il faut avoir vu selon le cinéaste. Plus loin, il s'en prend longuement à un film plébiscité par la critique, Moonlight ("je ne prends aucune précaution pour détruire le film", p.150).
Le roman s'achève sur une nouvelle page de cinéma. Christophe Honoré écrit ses dernières lignes au moment de commencer son nouveau film à Rennes. "J'ai quarante-sept ans et demain je débuterai dans cette ville le tournage d'un nouveau film. Il se déroule à l'époque où ceux que j'avais choisis comme modèles pour ma vie, mes amours, mes idées se rangèrent tous du côté de la mort" (p.179). Christophe Honoré est à présent en montage de ce 11e long métrage de sa filmographie, Plaire, aimer et courir vite.
>>> Ton père, de Christophe Honoré, Mercure de France, Collection Traits et portraits, 192 pages, 17 €
Pour aller plus loin, dans notre diaporama ci-dessus, une petite sélection des livres sortis en cette rentrée littéraire évoquant le cinéma.
Top 5 - Les livres magiques
"Ton père" de Christophe Honoré
Quand la rentrée littéraire fait son cinéma... Découvrez dans notre diaporama une sélection de quelques romans en lien avec le cinéma sortis ces dernières semaines.
"Mobile Home" de Marion Vernoux
Le réalisatrice et scénariste Marion Vernoux fait son inventaire dans "Mobile Home", son premier roman qui vient de paraître aux Editions de l'Olivier. Voir notre article...
"Making of" de Xavier Durringer
Le réalisateur Xavier Durringer signe un second roman en cette rentrée littéraire : "Making of" raconte les aventures d'un cinéaste embarqué dans un tournage où rien ne se passe comme prévu. Voir notre article...
"Kong" de Michel Le Bris
Michel Le Bris signe une fresque (944 pages !) inspiré par sa découverte du film King Kong (version de 1933). "On y croise des êtres épris d’idéal, des aventurières, des héros, des politiques, des producteurs, des actrices, et bien sûr un immense singe que l’on aime craindre et aimer, moins sauvage que l’homme…", indique l'éditeur Grasset sur son site Internet. En savoir plus...
"Trois verres de vodka" de Dominique Schneidre
Un roman au coeur duquel le "cinéaste tonitrant" Andrzej Zulawski s'invite, au moment de la préparation de Possession. "Trois verres de vodka raconte une amitié fascinante entre ces personnages atypiques qui vont se construire ensemble dans cette époque si créative où on ne craignait pas la modernité. Une époque qu’on n’est pas près d’oublier", indique l'éditeur JC Lattès. En savoir plus...
"Les vacances" de Julie Wolkenstein
Sur la piste d'Eric Rohmer... Deux personnages partent à la recherche des "Petites Filles modèles", premier long métrage du cinéaste, "presque achevé, jamais sorti"... En savoir plus...
"Made in China" de Jean-Philippe Toussaint
Jean-Philippe Toussaint raconte la préparation d'un tournage impossible de court métrage en Chine, pays dont il ne comprend pas la langue. En savoir plus...
"Tiens ferme ta couronne" de Yannick Haenel
Aucun producteur ne veut ce scénario sur Herman Melville. Le rélisateur Michael Cimino va finalement lire le manuscrit. "S’ensuivent une série d’aventures rocambolesques entre le musée de la Chasse à Paris, l’île d’Ellis Island au large de New York, et un lac en Italie", selon la présentation de l'éditeur. En savoir plus...