Deux ans après la fin d'Infidèle, Claire Keim revient ce soir sur TF1 avec une nouvelle série, Vise le coeur, dans laquelle elle prête ses traits à Julia Scola, une capitaine de police courageuse et respectée qui voit ressurgir dans sa vie Novak Lisica (Lannick Gautry), le grand amour de sa vie à qui elle n'a pas parlé depuis vingt ans. Et qui, après une brillante carrière d'avocat, a tout plaqué pour devenir commissaire de police. À la tête de la brigade au sein de laquelle officie justement Julia.
Claire Keim, peu habituée aux rôles de flics, nous parle de cette nouvelle aventure, imaginée par les créatrices de Profilage, du personnage de Julia Scola, qu'elle sent comme important dans sa carrière d'actrice, de la relation complexe qui unit Julia et Novak, et de ses envies de comédie. Et de chanson.
AlloCiné : Qu'est-ce qui a motivé votre envie d'incarner ce personnage de flic, Julia Scola, dans Vise le coeur ?
Claire Keim : J'ai été contactée par Stéphane Marsil, le producteur, qui m'a dit "J'ai une série de flics pour toi". Ça ne me tentait pas du tout, mais il a insisté et j'ai accepté de rencontrer Fanny Robert, la créatrice, avec qui j'ai passé un moment génial. Elle m'a tout de suite convaincu que ce rôle était fait pour moi. C'est puissant quand quelqu'un a tellement de désir pour vous dans un rôle. Donc déjà, avant même de lire, elle me dit qu'elle écrit en pensant à moi, et ça compte. C'est précieux, et assez rare dans ce métier.
Je me suis donc lancée dans la lecture du scénario et je suis tombée amoureuse de Julia. Parce qu'elle est forte, mystérieuse, contenue, disciplinée. Il y a quelque chose qui est tellement loin de moi que je me suis dit que ce personnage dément allait m'apporter beaucoup de force. J'avais eu un peu le même genre de réaction face au personnage d'Emma dans Infidèle. Je me suis dit "Elle est beaucoup plus forte que moi, elle va me porter". Donc je suis très heureuse d'avoir rencontré ce personnage assez rare. Il y a peu de personnages comme elle à la télévision.
Vous parlez du côté contenu de Julia. C'est justement ce qui fait qu'il y a ces moments, au cours de la série, où elle explose. Et qui rendent les séquences en question encore plus fortes...
C'était jubilatoire de tout lâcher comme ça. Mais ce n'était pas simple du tout à tourner. J'avais un trac énorme. Il y avait une scène que je redoutais particulièrement et ils l'ont mis tout à la fin du tournage (rires). C'était un tournage passionnant mais épuisant. Qui m'a demandé beaucoup.
Moi qui adore plaisanter sur le plateau, et être un peu le lutin qui fait marrer tout le monde, je ne pouvais pas, je n'avais pas le temps pour ça. Je devais rester très concentrée. Et il fallait que je garde une distance avec Lannick, car on se connaît bien, on a une proximité, c'est facile entre nous. Mais là il fallait que je sois loin de lui. Qu'on ait une forme de tension, que ce soit palpable. Que le téléspectateur se demande "C'est quoi le problème ? Qu'est-ce qui s'est passé entre ces deux-là ?".
Tout ça était très fatigant. Et puis ce sont des décors pas marrants, des hôpitaux, des commissariats, des caves avec des enfants morts. Ce n'était pas drôle du tout (rires).
Vise le coeur raconte aussi beaucoup de choses sur la police, et sur la place des femmes dans la police. C'est également un élément de l'histoire qui vous a plu ?
Je vais être totalement honnête : ce n'est pas ça qui m'a percuté dans le scénario. J'ai eu la chance d'être élevée par des gens qu'on peut qualifier de féministes. Mais ce n'était pas verbalisé qu'ils l'étaient, c'était juste dans leur façon de vivre. Du coup, l'évolution de la société telle qu'on la montre dans la série, c'est normal. C'est avant que ce n'était pas normal.
On évoque le MeToo au début. Ensuite on parle un peu des violences familiales, des violences sur les enfants. Mais pour moi il n'y a pas un combat, une revendication dans la série. C'est juste une fiction qui s'inscrit dans notre époque. Et aujourd'hui il y a énormément de combats qui sont menés de toutes parts, car beaucoup de choses ont été tues pendant trop longtemps. Mais je vous avoue que je n'en ai pas vraiment fait un étendard ou une cause particulière.
Par son univers très sombre, et les différents traumas qu'elle explore, la série se rapproche beaucoup de Profilage, que l'on doit aux mêmes créatrices : Fanny Robert et Sophie Lebarbier. Étiez-vous familière de Profilage avant de rejoindre l'aventure Vise le coeur ?
Bien sûr, j'avais vu des bouts de Profilage. Je trouvais ça hyper audacieux et je trouvais ça génial qu'un personnage aussi antipathique que Chloé (Odile Vuillemin) passionne autant les gens. Ça donne plein d'espoir.
Je trouve que la création de Profilage a beaucoup fait pour l'évolution de la série française. Elle est arrivée à un moment où les téléspectateurs étaient fatigués des héroïnes parfaites. Il fallait mettre un grand coup de pied dans tout ça. C'est super ce qu'elles ont fait. En plus, elles ont un vrai univers toutes les deux, elles sont très fortes.
Je leur suis extrêmement reconnaissante d'avoir créé le personnage de Julia pour moi. Je sens que c'est un personnage important pour moi, je ne sais pas pourquoi. Je suis fière de l'avoir interprété.
Vise le coeur repose évidemment sur son duo d'enquêteurs, Julia et Novak, qui se sont aimés, se sont perdus de vue pour une raison que l'on ignore, et se retrouvent vingt ans plus tard. Comment décririez-vous ce duo et la dynamique qui anime ces deux personnages ?
À la seconde où Novak débarque dans la DPJ et devient le commissaire de Julia, c'est la guerre. On sent instantanément qu'il y a un gros souci, que ça va être très compliqué, et surtout qu'il s'est passé quelque chose qu'elle ne lui pardonnera jamais. J'aimais beaucoup ça.
Et j'aimais aussi cette tension entre eux, qui fait qu'on ne sait jamais s'ils vont faire l'amour ou s'ils vont se foutre sur la gueule. C'était très sexy à jouer, et j'espère que ça l'est à l'image aussi. Ça ne se détend jamais entre eux, il n'y a pas de moment de répit, pas trop de douceur.
Êtes-vous partante pour une saison 2 en cas de succès ?
Si c'est aussi bien écrit que la première saison, oui, bien sûr. Voire même mieux écrit, car je pense qu'on peut encore faire mieux sur les dialogues. Mais c'est certain que c'est impossible de ne pas avoir envie de continuer quand un personnage est aussi puissant. J'ai l'impression que Julia m'apporte beaucoup, même si elle me prend le temps du tournage. Je pense que je progresse. Ça me fait jouer des choses que je n'ai jamais jouées. Ça m'emmène dans des endroits où je n'ai pas l'habitude d'être.
Ces derniers temps, en dehors du téléfilm Le Furet, vous avez enchaîné les rôles dramatiques à la télévision. Avez-vous envie de davantage de comédie ?
Je ne veux que ça (rires) ! Je rêve de comédie. Même des tout petits rôles. Je voudrais qu'on me fasse confiance en fait, qu'on m'autorise à faire une scène dans un film. Comme dans le film de Diane Kurys, Arrête ton cinéma. Je jouais une actrice un peu relou, j'ai adoré, c'était tellement marrant à faire. Laissez-moi faire de la comédie (rires) !
Je pense que j'ai vraiment un truc à exploiter dans la comédie, je sais que j'en suis capable. Au théâtre j'ai eu de jolis rôles, dans La Garçonnière notamment. Mais à la télévision ou au cinéma, je rêve de quelque chose de drôle et de tendre. Ou de trash (rires). J'adorerais travailler avec Eric Judor. J'ai vu tous ses films, je suis archi-fan. Mon rêve ce serait qu'Eric Judor m'écrive un rôle.
En début d'année, vous avez connu un énorme succès sur France 2 avec le téléfilm Menace sur Kermadec. Savez-vous si une suite va voir le jour ?
Je ne sais pas. Tout le monde en a envie. On a encore un groupe What's App avec toute l'équipe, on n'arrive pas à décrocher, c'est fou. On est encore accro les uns aux autres. Il faut dire que c'était magique comme expérience. Le tournage le plus facile de ma vie. En plus, à la base, je ne devais même pas le faire, j'étais épuisée. Et finalement quelque chose a fait que j'y suis allée. Il faut dire oui à la vie. Surtout après ce qu'on a vécu avec le Covid.
J'ai donc dit oui et en un quart de seconde c'était facile. Ce n'était que de l'amour ce film. Et il y avait un ton un peu BD, ce n'était pas hyper réaliste, et c'est ça qui m'a plu. Je me suis beaucoup amusée. Mais je ne sais pas si France 2 souhaite poursuivre l'aventure. À la base c'est un téléfilm bouclé.
Et la musique ? Où en êtes-vous dans vos envies de chanson ? Est-il prévu que vous sortiez un nouvel album ?
Ce qui est sûr c'est que j'ai envie. C'est totalement anormal que je n'aie pas sorti de deuxième disque, j'en suis consciente. Car je ne rêve que de ça ! Mais je me rends compte que j'adore mes musiques, j'adore mes chansons, mais je ne suis plus très heureuse de mes textes. J'ai mis trop de temps et il y a des textes que j'ai écrits il y a quinze ans qui ne sont plus d'actualité. Je n'ai pas envie de chanter des bêtises, j'ai envie d'avoir des beaux textes.
Je rêverais qu'il m'arrive la même chose qu'à Julien Clerc qui s'était énervé dans un café à Saint-Germain en disant "Il n'y a pas un con qui veut m'écrire des paroles ici ?", et Étienne Roda-Gil a dit "Si, moi". Et le mec finit par m'écrire "Utile". Ce serait le rêve. Plus le temps passe et plus je me réfugie dans les chansons et dans les textes. C'est trop important ce qu'on dit. J'ai envie de dire des belles choses. Mais il faut rester ouvert à l'inconnu, cette belle rencontre finira peut-être par arriver.