François Ozon a une passion communicative pour les actrices ! Passion qu'on a pu voir bien sûr avec le plus grand succès de sa carrière, l'irrésistible 8 femmes il y a 20 ans (plus de 3,5 millions d'entrées pour ce casting 8 étoiles), mais aussi tout au long de sa carrière. Il a dirigé Jeanne Moreau, Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, Fanny Ardant, Ludivine Sagnier, Charlotte Rampling, ou encore plus récemment Sophie Marceau.
Ce n'est un secret pour personne que certaines actrices ont longtemps mystérieusement résisté aux propositions de François Ozon, à l'image de Sophie Marceau qui a fini par collaborer avec lui pour son avant dernier long métrage, Tout s'est bien passé, sorti en 2021, ou encore Isabelle Adjani, cette année, après l'avoir courtisée une première fois il y a 20 ans.
Cette fois-ci, la rencontre a bel et bien eu lieu, sur le plateau de tournage de Peter von Kant qui sort ce mercredi, mais aussi devant notre objectif : le réalisateur François Ozon et l'actrice Isabelle Adjani ont accepté de nous rencontrer en duo, et notamment évoquer leur toute première rencontre, qui remonte à plus de 20 ans !
Isabelle Adjani est une actrice qui créé beaucoup de désir, et qui fuit, qui glisse entre les mains
Le réalisateur avait pensé à Isabelle Adjani dès le tournage de Sous le sable, mais il se raconte que l'actrice n'aurait jamais reçu le scénario. C'est finalement Charlotte Rampling qui a incarné ce rôle de premier plan pour le cinéaste en 2001.
La première rencontre a eu lieu au début des années 2000, au cours d'un diner qui a suivi une représentation de la pièce de théâtre La Dame aux camélias au Théâtre Marigny, comme ils le confient à notre micro.
"Isabelle Adjani est une actrice qui créé beaucoup de désir, et qui fuit, qui glisse entre les mains des réalisateurs. J'en rêvais et je me disais que ça arriverait peut être un jour" explique François Ozon, ravi d'avoir collaboré avec l'actrice iconique, égérie notamment du cinéma de François Truffaut. Selon l'actrice, Ozon est d'ailleurs "devenu un pur héritier de François Truffaut".
40 ans après, un retour surprise à la musique
Nous vous proposons de découvrir en vidéo ci-dessus notre entretien avec le duo, et ci-dessous un autre extrait sur une révélation que nous a fait Isabelle Adjani au cours de notre interview : son grand retour à la musique avec un nouvel album complet qui paraitra au printemps prochain, avec de nombreux duos.
Peter Von Kant raconte l'histoire d'un célèbre réalisateur à succès, joué par Denis Ménochet, fidèle du cinéma de Ozon, avec qui il s'agit de sa 3ème collaboration. Le personne qu'il campe habite avec son assistant Karl (Stefan Crepon), qu’il se plaît à maltraiter. Grâce à la grande actrice Sidonie (Isabelle Adjani), il rencontre et s’éprend d’Amir (la révélation Khalil Gharbia), un jeune homme d’origine modeste. Il lui propose de partager son appartement et de l’aider à se lancer dans le cinéma...
Précisons que Peter von Kant est une adaptation libre de la pièce Les Larmes amères de Petra von Kant de Rainer Werner Fassbinder. Cette pièce de théâtre avait déjà fait l'objet d'un long métrage mis en scène par Fassbinder lui-même, en 1971.
Une révélation et un acteur fidèle à l'univers d'Ozon
Outre Isabelle Adjani qui illumine Peter von Kant de ses apparitions (notamment musicale), le nouveau film de François Ozon permet d'avoir la confirmation du talent d'un jeune acteur, récemment remarqué dans la série Netflix Les 7 vies de Léa (série mise en ligne fin mars dernier). Khalil Gharbia impressionne dans ce rôle qui a nécessité une préparation physique particulière afin de faire évoluer son personnage au fil des années.
"J'avais un coach sportif, précise-t-il à notre micro. Il y a eu pas mal de développement musculaire. Et dans le langage physique, dans toute cette période de séduction, quelque chose se passait déjà avec la danse, il fallait que je sois à l'aise avec ce nouveau corps, ces nouveaux muscles."
Je me suis dit que pour trouver le personnage, il fallait vraiment aller à 300% dans le texte
L'une des particularités et réussites de Peter von Kant est de nous offrir des personnages avec beaucoup de nuances, des personnages non linéaires, qui apportent beaucoup d'épaisseur à l'intrigue. A ce propos, Denis Ménochet a de très beaux mots à l'égard de son partenaire à l'écran, Khalil Gharbia : "La plus belle mue de personnage, c'est celle de Khalil Gharbia. C'était son premier rôle. Il est arrivé comme ça, il a déployé ses ailes et il s'est transformé au fur et à mesure du film car nous avons tourné dans la chronologie. Et pour ce qui est des nuances, cela passe vraiment par le texte de Fassbinder revisité par Ozon."
Denis Ménochet, qui sera bientôt dans un registre totalement à l'opposé avec le film très sombre de Rodrigo Sorogoyen, As Bestas, a notamment ici de très belles séquences de comédies, et semble avoir poussé le curseur de la comédie comme jamais. "Je me suis dit que pour trouver le personnage, il fallait vraiment aller à 300% dans le texte, pousser les choses plus loin pour découvrir le personnage, confirme-t-il à notre micro. Ce personnage est un ogre, pathétique autant qu'effrayant. Il fallait pousser, pousser, pousser tout ça", ajoute-t-il."Le lien entre le personnage de Peter et de Karl (Stefan Crepon) se prête énormément à la comédie, parce qu'il le martyrise mais c'est drôle". Denis Ménochet ajoute que cette part de comédie dans le film de François Ozon lui a d'ailleurs "rappelé un film qu'(il) adore Frankenstein Junior, qui (le) fait beaucoup rire".
Diaphana Distribution
Pour Denis Ménochet, il s'agit d'une 3ème collaboration avec François Ozon après Dans la maison et Grâce à dieu. Ce dernier film en l'occurrence a permis à l'acteur de nouer un lien de confiance fort. "Grâce à dieu nous a tous beaucoup rapprochés", confie-t-il. François Ozon est "un réalisateur très intelligent, prolifique, qui change de style. Il surprend toujours par ce qu'il fait. Il surprend aussi dans sa malice. Il a une malice. Il a toujours un coup d'avance sur tout le monde", résume-t-il à l'égard du metteur en scène. "C'est un réalisateur qui a en même temps beaucoup de cynisme et de pudeur; ce cynisme créé certaines situations humoristiques", complète Khalil Gherbia.
Peter von Kant avec Denis Ménochet, Khalil Gherbia, Isabelle Adjani et Stefan Crepon sort au cinéma ce mercredi 6 juillet.
Propos recueillis à Paris le 22 juin 2022 par Brigitte Baronnet
