Après un épisode spécial jeudi dernier durant lequel Balthazar était suivi au sein de l'institut médico-légal par l'équipe d'un documentaire vidéo, la série policière à succès, qui continue de cartonner semaine après semaine sur TF1, continue ce soir avec la première partie du double épisode final de la saison 4, qui va enfin explorer le passé familial et l'enfance du héros.
À cette occasion, la productrice et scénariste Clothilde Jamin, qui a créé Balthazar avec Clélia Constantine, revient pour nous sur les événements majeurs de la saison 4, et notamment sur les arrivées de Camille Costes et d'Olivia Vésinet. Et nous en dit plus sur ce final inattendu, qui voit le légiste campé par Tomer Sisley retourner dans son village d'enfance pour enquêter sur une affaire de vaches assassinées... et sur la mort d'une de ses plus vieilles amies.
AlloCiné : La saison 4 de Balthazar a évidemment été marquée par l'arrivée de Constance Labbé dans le rôle de Camille Costes. Comment ce nouveau personnage a-t-il été imaginé ? Qu’aviez-vous envie de faire avec Camille ?
Clothilde Jamin : Notre envie majeure c’était de ne surtout pas refaire Hélène. Et ce n’était pas évident car Hélène avait une place hyper importante dans la série, un rapport avec Balthazar qui était basé sur une relation romantique chien-chat. On refusait tout simplement de faire ça, car on savait que, dans le cœur des téléspectateurs, remplacer la relation romantique avec Hélène par une relation romantique avec un autre personnage, ça aurait été perçu comme une trahison.
D’emblée, on s’est dit "Il faut que le rapport entre les deux soit extrêmement différent". On est donc parti sur un rapport de buddy movie, presque fraternel entre Camille et Balthazar. Autant Baltahzar et Hélène n’avaient rien en commun, et c’est aussi pour ça qu’il y avait cette alchimie entre eux, autant là on avait envie de créer quelque part un alter ego pour Balthazar, qui soit quasiment son miroir.
Camille est assez solitaire, elle est casse-cou, elle a un côté un peu revêche mais au fond elle a un cœur tendre. C’est un personnage avec beaucoup d’humour, assez moderne, qu’on a vraiment conçu comme un miroir du héros.
Et contrairement à Hélène, Camille est elle aussi entourée de mystère. Vous aviez envie d’un nouveau fil rouge qui ne soit pas centré, cette fois-ci, sur Balthazar ?
On avait envie d’avoir deux solitudes. Balthazar est quelqu’un qui s’est lui-même un peu coffré dans une sorte de solitude. Et on voulait que Camille soit aussi une autre forme de solitude. C’est une sorte de Lucky Luke, elle arrive, on ne sait pas combien de temps elle va rester, ni d’où elle vient.
On comprend qu’il s’est passé quelque chose qui a fait qu’elle s’est coupée du reste du monde. Elle se lie très difficilement. Et on voulait mettre en scène la rencontre de ces deux solitudes et voir ce que ça allait donner. C’est un mystère qui va se poursuivre en saison 5. On va découvrir pourquoi Camille est Camille.
Balthazar et Camille ont eu une brève aventure il y a quelques années. Doit-on y voir un signe que quelque chose pourrait tout de même à nouveau se passer entre eux un jour ? Ou refusez-vous cette éventualité avec les auteurs ?
En tout cas, ce qu’on ne voulait pas c’est que ce ne soit pas arrivé. Le fait que ce soit arrivé, ça clôt quelque part le débat. Et ça nous faisait beaucoup rire que Balthazar se souvienne d’elle et pas l’inverse. Que pour une fois ce ne soit pas lui qui tienne les rênes de la séduction.
Après, la suite, je n’ai pas envie d’en parler. C’est ça aussi qui fait le sel du principe de la série : le fait de ne pas savoir. On peut être très amis et ça peut déraper, ou au contraire être amis et il ne se passe jamais rien. Tout est très ouvert je pense.
L’autre nouveauté de la saison c’est l’arrivée de Caterina Murino dans le rôle d’Olivia Vesinet, qui vient évaluer Balthazar au sein de l’IML. Est-ce que l’introduction de ce personnage vous permettait de pré-figurer la "chute" de Balthazar, qui perd de plus en plus pied au fil des épisodes de cette saison 4 ?
On avait envie de donner un alter ego professionnel à Balthazar. Il passe son temps à dire qu’il est le roi de la médecine légale, qu’il est le plus jeune directeur de l’institut médico-légal de Paris, c’est vraiment le dieu en son royaume. Et on trouvait ça assez intéressant de mettre en face de lui quelqu’un qui représente l’autorité de l’institution, ce qu’il ne respecte jamais car il a 5 ans d’âge mental (rires).
Et en plus c'est quelqu’un qui, en termes de profession, est à son niveau. Ce n’est pas forcément lui qui gagne face à elle. Et la rigidité du personnage et son côté protocolaire, c’est génial sur le plan de la comédie. Il y avait un gros potentiel.
Caterina Murino sera-t-elle toujours présente dans la série en saison 5 ?
On travaille actuellement sur la saison 5, je ne peux rien dire à ce sujet. Il est encore trop tôt pour en parler.
Etait-ce compliqué d’arriver à trouver une place à Lise et à Maya dans cette quatrième saison, alors que le fil rouge sur la mort de Lise avait été résolu en saison 3 ?
Lise (Pauline Cheviller), pour nous, c’est un des piliers de la série. C’est Balthazar, en réalité. Mais ce qui était intéressant cette année c’était de twister le personnage de Lise pour le traiter de façon différente. Dans la mesure où c’est une projection de Balthazar, ce qu’il imagine de Lise évolue en fonction de son état d’esprit. Et en saison 4 il n’est clairement pas au top de sa forme.
Donc Lise prend une autre forme. On est vraiment sur le bon et le mauvais démons perchés sur chaque épaule. Et on est plutôt allé du mauvais côté, c’était super intéressant.
Quant à Maya (Leslie Medina), elle a encore pas mal de choses à jouer. La saison 4 le montre. Maya ce n’est pas seulement celle qui a tué Lise, ou bien l’ex-femme de Balthazar. C’est aussi la femme qui porte son enfant. Et lorsqu’on parle de saison du renouveau, le renouveau s’annonce vraiment avec la naissance de cet enfant à venir. La notion d’enfant, il va falloir l’affronter à un moment donné. Et Maya représente ça.
La saison 4, comme les précédentes, comporte encore beaucoup d’épisodes spéciaux très forts. On pense à l’épisode dans l’avion, l’épisode de la prise d’otages, ou encore celui durant lequel une équipe de documentaire suit Balthazar au sein de l’IML. Est-ce que l’esprit de la série c’est aussi de revisiter des genres ou des figures imposées des fictions policières ou médicales, et de les twister à la sauce Balthazar ?
L’esprit de la série c’est vraiment de s’amuser à l’écriture. On est cinq ou six scénaristes, on travaille en groupe, on écrit les épisodes ensemble. Et on commence toujours en se disant "Est-ce que cette idée nous enthousiasme ?". Et l’enthousiasme vient effectivement souvent de choses très fortes, de concepts forts, de dispositifs forts. Et, bien sûr, ces concepts ont souvent déjà été traités, car il y a énormément de séries, tellement d’histoires qui ont été racontées.
Mais ce qui nous plaît c’est de mettre nos personnages dans des situations très fortes et de voir ce qui se passe. Et ça nous donne des cadres qui sont parfois des défis scénaristiques, comme l’épisode qui se passe presque entièrement dans un avion. La prise d’otages c’était aussi et surtout l’envie de voir Balthazar professeur. Mais il fallait que ce soit intégré à l’histoire donc il fallait qu’il se passe quelque chose d’assez fort dans ce cadre universitaire pour que le téléspectateur ait envie de suivre tout l’épisode.
Mais, oui, on a envie de jouer avec les genres, avec les codes. Pour un scénariste c’est un terrain de jeu incroyable. D’autant plus que Balthazar est un personnage tout-terrain qui nous permet de l’emmener n’importe où. L’épisode de l’avion on ne pourrait pas le faire avec n’importe quel personnage de série. Mais lui, il a ce côté presque super-héroïque parfois. On s’amuse beaucoup avec lui.
Le double épisode final nous emmène dans le village où Balthazar a grandi, on rencontre enfin ses parents. C’est quelque chose que vous aviez envie d’explorer depuis longtemps ?
C’est surtout quelque chose dont Tomer nous a parlé. Bien sûr, nous, on avait envie d’aller dans le thriller sur cette fin de saison, et d’explorer la psychologie du personnage. Et Tomer nous a dit "Mais au fond, on ne sait pas d’où il vient. Est-ce qu’on ne pourrait pas explorer le passé de Balthazar ?".
Et c’est ainsi qu’on a eu l’idée de ce village, et de ce retour au village, qui nous permettait de découvrir le personnage en profondeur. Il est énormément dans le présent, dans l’image qu’il projette, et on trouvait intéressant d’expliquer pourquoi il est comme ça. J’aime beaucoup ce final, car c’est vraiment l’aboutissement de la saison dans tous les sens du terme.
Sans trop en dire, les derniers épisodes questionnent aussi plus que jamais la santé mentale de Balthazar, qui a connu plusieurs black-out au cours de la saison. Au fond, est-ce que ce n'est pas ce que la série nous dit depuis le début : que Balthazar est sur le fil et que la folie le guette ?
Est-ce que la norme existe ? C’est ça aussi la question qu’on pose avec ce personnage et avec la série. Tout le monde peut basculer un jour. Et, effectivement, Balthazar va basculer.