C’est une histoire semblable à la sienne. Dans La Vraie famille, son second long métrage, Fabien Gorgeart met en scène une famille d’accueil qui doit se séparer d’un enfant. Il a, lui aussi, grandi avec un petit garçon qui a dû retrouver ses parents biologiques. “J’essaye de raconter cette expérience depuis 25 ans”, révèle le réalisateur.
Encouragé par sa productrice, Marie Dubas, le cinéaste se lance et partage son vécu avec ce film bouleversant porté par une excellente distribution : Mélanie Thierry, Félix Moati, Lyes Salem ou encore Gabriel Pavie, qui joue Simon, 6 ans. Au festival du film francophone d’Angoulême, en août 2021, La Vraie famille séduit les spectateurs. Il est primé à deux reprises avec le Valois du jury et celui de la meilleure actrice.
Bien qu’il s’inscrive dans la pure tradition du mélodrame, le film en évite les écueils avec des personnages sans manichéisme. Mélanie Thierry joue une femme à la tête d’une famille aimante qui élève un petit garçon de ses 18 mois à ses 6 ans. Félix Moati, lui, incarne son père biologique. Un jeune homme veuf qui tente de se reconstruire. Si l’une doit désapprendre à être mère, l’autre doit se réapproprier son rôle de père.
“J’étais ravagée à la fin de la lecture du scénario, lance Mélanie Thierry. Cela ne m’arrive pourtant jamais de pleurer quand je lis un script. Il y avait quelque chose de tellement sincère. C’est vécu de l’intérieur donc ça ne triche pas.” Dans le film, elle porte le rôle qui s’inspire directement de la mère du metteur en scène. “C’est beaucoup de responsabilité, j’étais pas tranquille”, ajoute-t-elle.
Félix Moati, de son côté, ne savait pas que le récit était autobiographique, même si “le terreau de vérité était évident.” “Ce que je trouve très beau dans ce film c’est que tous les personnages ont leurs raisons, précise-t-il. Ce qui explique la mélancolie, le chagrin et cette impuissance pour le spectateur à prendre parti.”
Tout au long du récit, Fabien Gorgeart prend soin de respecter une zone grise : “Il y a de l’amour partout et pourtant cette histoire reste complexe. Des erreurs sont commises des deux côtés.” Pour le cinéaste, la “vraie famille” n'existe pas : “Ce n’est qu’une cellule en constante mutation.”
Trois classiques du cinéma ont inspiré le film : Kramer contre Kramer de Robert Benton, Le Kid de Charlie Chaplin et… E.T. l’extra-terrestre de Steven Spielberg. “Cette histoire, c’est celle d’E.T., lance le réalisateur. On accueille quelqu’un chez soi, on s’attache à lui, on crée un lien presque surnaturel avec lui et on doit le laisser partir.”
Beaucoup d’éléments rappellent le classique de science-fiction : le décor du lotissement, la veste à capuche rouge d’un des personnages, une scène à vélo… “Mon désir de cinéma et de raconter cette histoire personnelle est né le jour où j’ai découvert E.T., poursuit le cinéaste avant d’ajouter, le sourire aux lèvres : Une famille d’accueil, c’est aussi accueillir un extra-terrestre.”
Propos recueillis par Thomas Desroches, à Angoulême, en août 2021.
La Vraie famille, au cinéma le 16 février 2022.