Après sa présentation au Festival de Cannes à l'été 2021 par son réalisateur Sean Baker, Red Rocket est enfin sorti en salles ! AlloCiné a pu rencontrer l'acteur principal du film, Simon Rex, au Festival du cinéma américain de Deauville, où le film était présent en compétition et a remporté le Prix du jury et le Prix de la critique.
AlloCiné : Comment Sean Baker vous a-t-il contacté pour ce projet ?
Simon Rex : En juillet [2020], une amie m'a téléphoné pour me demander ce que je faisais des six semaines à venir. Nous étions en pleine pandémie, j'ai donc répondu "rien", et elle m'a expliqué que Sean Baker voulait me faire auditionner pour un rôle. Elle m'a donnée son numéro, on s'est appelé et il m'a demandé de lui jouer des scènes du film sur mon téléphone. Je lui ai envoyé le résultat et il m'a répondu "t'es engagé".
Pas d'agent, pas de directeur de casting, rien du tout. Il m'a dit que l'on tournait au Texas dans trois jours et qu'il fallait que je vienne en voiture car si je prenais l'avion j'allais être placé en quarantaine une semaine entière. J'ai donc conduit pendant trois jours et une fois arrivé, on commençait.
Etait-ce le scénario, le fait qu'il s'agissait du réalisateur de Tangerine ou les dialogues percutants qui vous ont convaincu si vite de faire ce film ?
Les trois ! Et le fait que c'était du travail à une époque où personne ne travaillait à cause de la pandémie.
Vous dites que vous avez tourné trois jours après avoir été engagé, avez-vous eu le temps de répéter avec vos partenaires, car votre alchimie à tous est palpable à l'écran ?
Nous avons eu une journée de répétition, donc nous avons pu répéter les premières scènes, pour le reste du film nous devions vraiment enchainer car nous avions peu de temps et peu d'argent. Je pense que c'est cette énergie, cette urgence, ce chaos, qui crée ce que vous décrivez et qui fonctionne à l'écran.
Cela ajoute aussi au réalisme des scènes, qui paraissent très improvisées, est-ce que cela été possible pour vous ou est-ce que les conditions de tournage imposaient de s'en tenir au scénario ?
Sean nous a laissé improviser tant que l'on ne sortait pas d'un certain cadre. La plupart du temps, nous mettions en boîte le scénario et de temps en temps, il nous disait : "Tentons-celle-là [en impro]" et il nous laissait jouer. Selon lui, le ratio du film terminé doit être de 20% d'impro pour 80% de scénario.
Ce qui est beaucoup, mais les moments magiques arrivent parfois quand vous ne jouez pas mais que vous parlez et que vous réagissez. Surtout qu'il engage des acteurs non-professionnels et locaux, donc tout devient plus réel, plus authentique. Les maisons sont réelles, les décors aussi... ça facilite mon travail.
Vous évoquez ces acteurs "non pro", qu'est-ce que cela a changé à l'interprétation de votre personnage d'avoir face à vous des gens qui découvrent le fait de jouer ?
Je les ai beaucoup aidés sur le plateau quant à l'aspect technique d'un tournage comme le fait de tenir sa marque au sol, car la caméra fait le point jusqu'à cet endroit précis et si tu n'y es pas, tu seras flou. (...) Sean avait beaucoup à faire donc je les ai coachés un peu et c'était marrant.
Vous incarnez un acteur porno sur le déclin, vous avez plusieurs scènes de sexe dans le film, comment avez-vous travaillé avec vos partenaires féminines sur ces scènes, qui sont toujours complexes à tourner ?
J'essayais de les détendre, car ces scènes sont plus difficiles pour elles, elles se sentent plus vulnérables, je voulais juste qu'elles se sentent à l'aise. (...) Nous couvrions nos parties génitales même si à l'écran on nous croirait entièrement nus grâce aux angles de caméra qui sont adoptés. (...) Et au moment où nous avons tourné ces scènes, nous étions déjà amis, ce n'était pas le premier jour de tournage, (...) c'était plus facile.
J'ai le sentiment que votre personnage ne se comporte pas de la même façon au lit avec les deux femmes qui sont dans sa vie, que vous avez cherché à instaurer quelque chose de différent pour chacune d'elles.
Je suis prudent dans la façon dont je vais dire ça, mais quand une relation est nouvelle, comme celle de Mikey, mon personnage, avec Strawberry (Suzanna Son, NdlR), vous êtes dans la phase ", tout est "licornes et papillons", et ça représente un nouveau fantasme pour Mikey. Pour son ancienne femme Lexi en revanche (jouée par Bree Elrod, NdlR), il a couché avec elle des millions de fois et je voulais qu'à l'écran, cela paraisse plus "robotique", plus ennuyeux pour lui.
Enfin, lors de la présentation du film à Cannes, vous avez décrit votre personnage comme un "sympathique trou du c*l", comment est-ce qu'on travaille en tant qu'acteur à partir d'un paradoxe comme celui-ci ?
J'avais si peu de temps que j'avoue l'avoir fait un peu à l'instinct. Dans le scénario, cette personne est horrible, donc j'ai essayé de le rendre sympathique, en le rendant drôle, charmeur, afin que le public soit embarqué et soit un peu de son côté. J'ai cependant gardé le fait que c'est quelqu'un qui ne parle avec les gens que pour en retirer un profit. Je l'ai joué comme un escroc (...).
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