Né à New York de parents ayant fui le nazisme en Europe, Peter Bogdanovich grandit à New-York et commence très tôt à prendre des cours de théâtre. Il a notamment pour professeur Stella Adler, célèbre pour avoir enseigné l’art dramatique à Marlon Brando et Robert De Niro.
Cinévore acharné
Féru de cinéma (il visionne jusqu’à 400 films par an), le jeune Bogdanovich commence par travailler au Musée d’art moderne de New-York au début des années 1960. Il y présente de grands réalisateurs, comme Orson Welles, John Ford, Allan Dwan ou Howard Hughes.
Suivant le modèle des Cahiers du Cinéma, il devient un critique de films réputé, aux connaissances très développées sur le sujet. Influencé par la Nouvelle Vague, il décide de devenir réalisateur et se rend à Los Angeles avec sa femme (et collaboratrice) Polly Platt, où il fait la rencontre décisive de Roger Corman.
En 1966, Peter Bogdanovich endosse plusieurs fonctions (assistant réalisateur, scénariste, acteur, etc.) sur le tournage des Anges sauvages de Roger Corman, lequel le pousse rapidement à la réalisation. Après avoir mis en scène un documentaire sur Howard Hughes, il réalise son premier long métrage de fiction, le méconnu "Voyage to the Planet of Prehistoric Women" et poursuit avec La Cible, un film d’horreur avec Boris Karloff dans le rôle principal.
La Dernière séance, c'était lui
Mais c’est par le biais de son film suivant qu’il acquiert véritablement le statut de réalisateur en vogue, dont le travail est parfaitement en phase avec les constantes définissant Le Nouvel Hollywood. La Dernière séance, centré sur la vie de jeunes gens ordinaires dans un petit village isolé du Texas des années 1950, est un énorme succès critique et commercial. Révélant Cybill Shepherd (qui devient la compagne de Bogdanovich) et Jeff Bridges, le film est nommé pour 8 oscars (incluant celui du Meilleur réalisateur) et en remporte 2 (meilleurs seconds rôles pour Ben Johnson et Cloris Leachman).
A la suite de ce triomphe, Bogdanovich enchaine avec deux autres grandes réussites : On s'fait la valise, docteur ? (1972) et surtout La Barbe à papa (1973), comédie en noir et blanc évoquant la relation entre un escroc (Ryan O'Neal) et une petite fille qui pourrait être sa fille (Tatum O'Neal qui, à 10 ans, remporte l’oscar de la Meilleure actrice dans un second rôle) durant les années 1930.
A cette époque, le cinéaste est à son apogée. Mais après ces trois succès, la carrière de Bogdanovich est affectée par les échecs successifs de "Daisy Miller" (1974), "Enfin l'amour" (1975) (tous les deux avec Cybill Shepherd) et Nickelodeon (1976). Trois ans plus tard, il ne parvient toujours pas à reconquérir le cœur du public.
Drame personnel
En 1981, il tourne Et tout le monde riait avec Audrey Hepburn, Ben Gazzara et le mannequin Dorothy Stratten, avec qui il entame une liaison. Apprenant la nouvelle, le mari de cette dernière tue la jeune femme, viole son cadavre et se suicide.
Ce fait divers des plus sordides pousse le réalisateur à mettre un terme à sa carrière ("Si la réalité est pire que ce que l’on peut voir au cinéma, je ne vois pas l’intérêt de faire des films…", confie-t-il). Bogdanovich se tourne alors vers sa première vocation, et écrit un livre consacré à son amour assassiné intitulé "The Killing of the Unicorn". Il ne renonce toutefois pas totalement à la mise en scène, et obtient un succès modeste avec Mask en 1985, où la chanteuse Cher tient le rôle principal.
Texasville, suite de La Dernière séance
En 1990, il réalise Texasville, la suite de son chef d’œuvre La Dernière séance, mais qui se solde par un échec en salles… Tout comme Bruits de coulisses (1992) et The Thing Called Love (1993). Constamment boudé par le public, son dernier film pour le cinéma sort en 2001 (Un Parfum de meurtre avec Kirsten Dunst).
A partir des années 1990, Bogdanovich effectue quelques apparitions sur grand écran, comme par exemple dans Mr. Jealousy et Studio 54. Il choisit cependant de se focaliser sur la télévision, devant et derrière la caméra (il joue notamment un petit rôle dans 15 épisodes des Soprano et réalise plusieurs téléfilms et épisodes de séries).
En 2015, Peter Bogdanovich fait son grand retour derrière la caméra avec la comédie dramatique Broadway Therapy. Fort de son prestigieux casting (Owen Wilson, Jennifer Aniston), le film suit le parcours d'une ancienne escort-girl devenue actrice qui noue une relation avec un metteur en scène à Broadway.
Continuant à faire l'acteur, il décède le 6 janvier 2022 alors qu'il travaillait à une nouvelle réalisation One Lucky Moon.
Figure emblématique du Nouvel Hollywood, Peter Bogdanovich est très représentatif de cette époque particulière : à l'instar d'Hal Ashby et bien d'autres, il n'a pas réussi à reproduire le succès de ses premiers films novateurs.