Ici tout commence a été lancée en novembre 2020 et fête bientôt son premier anniversaire. Avec du recul, vous attendiez-vous à un tel succès ? La série arrivait face à trois autres quotidiennes préexistantes...
Catherine Davydzenka : En toute honnêteté, je me suis vraiment pas posé la question. Pour moi, le plus important, c'était de travailler mon personnage et de réussir à proposer quelque chose avant tout. J'étais super stressée, donc ça a occupé toute ma tête et je ne me suis pas vraiment posé la question de si ça allait faire un boum. Le reste, ça concerne plus le public plutôt que moi.
C'était un gros défi de tenir un personnage aussi longtemps dans un format quotidien ?
Oui, surtout que le personnage est complètement composé. C'était pas forcément prévu dans le sens où j'avais très peu d'infos sur Hortense. J'avais "jeune fille solaire, a fait médecine, est spontanée." Bon. (rires) Du coup, j'ai pris un pari, un risque, et cette proposition, je l'ai faite vraiment à fond le premier jour du tournage. Je suis arrivée sur le plateau, j'ai monté d'un cran ma voix, j'ai eu ces mimiques avec les lunettes, et je me suis dit soit ça passe, soit ça casse !
Je trouve ça cool parce que quelque part en France, on n'a pas beaucoup l'occasion de composer des personnages. C'est très anglophone, très américain de pouvoir composer des personnages ; nous ici on est plus dans le jeu "vrai", avec des personnes qui ressemblent beaucoup à ce qu'elles sont dans la vie. Avoir la chance de pouvoir travailler quelque chose qui est à dix mille lieues de moi, jusqu'à la voix, c'est un pur plaisir.
Hortense a vécu plusieurs épreuves douloureuses au cours de cette première année, avec des thématiques autour du slut-shaming lorsqu'elle devenait escort. Désormais, elle vit une relation épanouie avec Mehdi (Marvin Pellegrino). Avez-vous été surprise de cette évolution et de cette romance ?
J'étais super heureuse de ça. Ça amenait un nouveau côté, une nouvelle facette à Hortense. Pour donner du réalisme à un personnage, il faut qu'il ait autant de facettes qu'un être humain. Donc plus on me donne de choses à jouer, plus il y a de couleurs à mettre et plus je la rends réelle. J'ai eu l'occasion de traiter du harcèlement scolaire, du slut-shaming, de la prostitution étudiante, des parents qui rejettent leurs enfants pour leur rêve... C'est assez incroyable de jouer une nana comme elle qui s'en sort avec force, et d'un coup, en ayant retrouvé un peu d'espoir, tombe éperdument amoureuse d'un mec qui va probablement mourir.
Oui car la thématique de la maladie était abordée dans l'intrigue autour de la relation naissante d'Hortense et de Mehdi, qui souffre d'une leucémie.
Hortense n'avait pas le droit de se décomposer pour lui, et c'était beau de la voir essayer de le faire vivre, parce que c'était ça le but : elle voulait qu'il vive, ne serait-ce que jusqu'au bout de sa maladie. Finalement, il est en rémission, donc j'avoue que je ne sais pas où ça va aller après, mais je n'ai pas été surprise dans le sens où ce personnage-là, comme il n'est pas vraiment "catégorisable", il peut lui arriver tout et n'importe quoi. Et comme elle dit tout le temps qu'elle aime l'amour, qu'elle aime aimer quelqu'un, pas un corps ni un sexe mais une personne, on peut l'amener un peu n'importe où, et c'est ça qui est beau.
Hortense incarne la figure de la petite fille modèle, promise à un avenir brillant et qui va finalement briser le moule en s'opposant à son père qui la pousse à faire médecine. Peut-on s'attendre à en découvrir bientôt plus sur ses proches, et sur ses rapports familiaux au-delà de son père ?
Moi, je kifferais rencontrer ma mère ! J'ai envie de savoir ce qu'ils vont en faire, parce qu'en vrai, le père d'Hortense en a beaucoup parlé, mais on ne l'a jamais vue, et je me demande si ce n'est pas un petit truc qui pourra servir plus tard. Mais en tout cas, j'ai très envie d'en savoir plus parce que finalement, on a eu des infos sur sa famille, on n'a pas un vrai contexte familial, on ne les a pas vus ensemble. Donc ça laisse une belle ouverture.
Que tournez-vous en ce moment dans la série ?
Ici tout commence fonctionne par arches et par intrigues A, B et C. Et moi, l'année dernière, on m'a énormément vue à l'écran ! Cette année, il y a les nouveaux qui arrivent, et qu'il faut absolument exploiter parce qu'ils sont géniaux. Donc je vais jouer un rôle un peu plus secondaire mais qui m'amuse tout autant parce que ce sont les moments où on n'a rien à dire qui sont les plus drôles, parce que, du coup, faut que je trouve quelque chose ! Si c'est pour arriver, dire deux phrases et partir, ce n'est pas intéressant. Il faut que ce soit deux phrases qui déclenchent au moins un petit rictus, que ça fasse quelque chose. C'est encore un autre exercice, et c'est ça qui est cool.
Est-ce que la série, qui se déroule au coeur d'une prestigieuse école de gastronomie, a changé votre rapport à la cuisine ou à la nourriture? Est-ce que ça vous a rendu plus exigeante sur ce que ce que vous mangez ?
J'aimais déjà beaucoup la cuisine avant. J'ai commencé un CAP de cuisine que je n'ai pas pu finir car je faisais médecine en même temps pour de vrai. Quand j'ai lu le descriptif du personnage d'Hortense, je me suis demandé s'ils n'avaient pas enquêté sur ma vie ! (rires) Et oui, ça, c'était une vraie bonne coïncidence, parce que j'ai quitté médecine pour me consacrer à fond à la comédie. J'ai fait médecine pour faire plaisir aux parents, mais j'ai toujours joué.
Pendant mes études, j'ai fait Le Bureau des Légendes, ça a toujours été présent en fond. Mais du coup, j'ai toujours eu un rapport particulier à la nourriture : j'aime manger, j'adore cuisiner, et quand j'étais petite, je me cachais un peu parce que mon papa cuisinait très bien, sauf qu'il ne me laissait jamais entrer dans la cuisine. Et donc, je me cachais pour essayer de voir ce qu'il faisait, et je pense que ça a créé un truc dans ma tête où la cuisine, c'est génial. Au fur et à mesure, ça m'a intéressée.
Je me souviens d'une réplique quand Hortense est face à mon père, et où je lui dis : "tu sais, grâce à toi, j'ai compris que quand on a des rêves, on s'accroche et on fait tout pour qu'ils fonctionnent." On a une très belle relation avec mon papa fictif, dans le sens où on n'a pas vraiment besoin de répéter, tout se passe hyper naturellement. Il y a des moments où j'ai eu l'impression d'être face à mon propre père.
Par contre, ce qui est devenu un peu plus compliqué par rapport à la nourriture, c'est que dans le Sud, on mange très bien, et dans le village dans lequel on tourne, on n'a que des produits naturels, des marchés du coin... Mon palais s'est un peu développé, et j'avoue que parfois, quand je vais manger une tomate-mozza ailleurs, elle ont moins de goût... (rires)
Avez-vous eu l'occasion de travailler sur d'autres projets en marge de la quotidienne ?
J'ai passé des castings, et je vous avoue que ce n'était pas forcément des choses dans lesquelles j'étais à fond. L'année dernière, j'étais vraiment beaucoup à l'écran, et on me donnait des trucs tellement fournis à jouer que j'étais très heureuse comme ça. En ce moment, je commence à passer un peu plus d'essais, donc on va voir où ça va me mener, pourquoi pas une série à l'étranger, comme je suis quadrilingue. J'ai parlé anglais avant de parler français. Je l'ai appris plus tard, à l'école.
Et puis maintenant, avec ITC, on est vraiment entraînés comme des machines de guerre. Il faut arriver, être bon tout le temps, direct, et donc préparer un truc bien costaud avant pour que quand tu arrives à 6 heures et demie au maquillage et que ton début de tournage est à 7h45, il faut être au taquet. Et pour ce qui est des textes à apprendre, maintenant, ma mémoire, c'est un truc de dingue : je lis mon texte deux fois et je le connais !