Adapter Dune sur grand écran n'a pas été chose aisée tant l'oeuvre de Frank Herbert est riche et foisonnante. Avant que Denis Villeneuve ne réussisse à livrer sa version, David Lynch et Alejandro Jodorowsky ont tous les deux tenté de livrer la leur, sans succès.
Malgré les difficultés, le réalisateur de Twin Peaks est tout de même parvenu à sortir son film sur grand écran en 1984, malheureusement charcuté par les studios. Quant au cinéaste à qui l'on doit El Topo, il a dû abandonner son projet à la fin des années 70. L'entreprise était trop ambitieuse, trop chère, trop folle, comme le relate le documentaire Jodorowsky's Dune (2016).
Le metteur en scène a passé un temps considérable à tenter de réaliser ce film, réunissant une troupe incroyable de talents, de David Carradine à Orson Welles en passant par Alain Delon et Salvador Dalí. Parmi ces grands noms, une jeune femme d'une trentaine d'années avait tapé dans l'oeil de Jodorowsky : Charlotte Rampling.
Le cinéaste lui propose le rôle de Jessica Atréides, mère de Paul, qui aurait dû être joué par Brontis Jodorowsky, fils du réalisateur. Dans la version de Villeneuve, c'est Rebecca Ferguson qui interprète ce personnage face à Timothée Chalamet. Rampling prend le scénario que lui tend Alejandro et se met à le lire.
Je ne peux pas jouer dans un film qui fait chier deux mille personnes !
La comédienne revient ensuite vers le metteur en scène pour lui asséner un refus catégorique. Hors de question pour elle de jouer dans cette production. "Dans le scénario, il y avait un personnage qui s’appelait Rabban. Lui et son armée devaient baisser leurs pantalons et chier [pour insulter le duc Leto, campé par David Carradine]. Alors elle me dit : “Mais je ne peux pas jouer dans un film qui fait chier deux mille personnes !” C’est l’unique actrice qui a méprisé Dune", a confié Alejandro Jodorowsky.
C'est donc pour une histoire d'excréments que Charlotte Rampling a décliné l'offre du cinéaste. Ironie du sort, elle se glissera dans le costume de la Révérende Mère Gaius Helen Mohiam dans le Dune de Villeneuve, plus de 40 ans plus tard.
À noter que Jodorowsky a aussi dû composer avec les caprices de Salvador Dalí, qui demandait 100.000 dollars de l'heure pour incarner l'empereur Shaddam IV. Le célèbre artiste a aussi exigé une séquence dans laquelle il trône sur des toilettes ornées de deux dauphins entrecroisés. Leurs deux gueules devaient servir à séparer l'urine des selles. "Parce que le pipi et le caca ne doivent pas se mêler, c’est trop disgracieux", avait-il déclaré.
Décidément, avec toutes ces histoires autour de déjections humaines, il n'est pas étonnant que Michel Seydoux, producteur du film, ait décidé de tirer la chasse d'eau afin d'évacuer ce projet dans les égoûts des oeuvres avortées.
LA BANDE-ANNONCE DE JODOROWSKY'S DUNE