Retraçant les premières années de l'affaire Grégory survenue en 1986, Une Affaire française, diffusée chaque lundi soir sur TF1 et mettant en scène Guillaume de Tonquédec, Guillaume Gouix, Laurent Stocker et Blandine Bellavoir, retrace avec précision le déroulement des événements qui ont conduit un fait divers bouleversant dans une petite ville de l'Est de la France à devenir l'une des affaires médiatiques les plus retentissantes du pays.
Si l'ensemble des protagonistes liés à l'affaire sont restitués le plus fidèlement possible, tant dans leurs propos que dans les situations dans lesquelles ils sont représentés, ce n'est pas le cas pour l'un des personnages : celui de la journaliste Jeanne Lombardie, interprétée par Laurence Arné (La part du soupçon), envoyée par France Inter pour couvrir l'affaire Grégory.
Dénotant au milieu des noms des personnes bien familiers du public du fait de la médiatisation de l'enquête, la productrice de la série, Aimée Buidine, explique la fonction de ce personnage.
"On est dans une fiction du réel. Tous ces protagonistes qui portent leur point de vue sont des personnes réelles, et il y a Jeanne Lombardie, une journaliste fictive qui représente à la fois une génération et certains journalistes de l'époque qui ont essayé de mener l'enquête, de vérifier leurs sources, et qui comme beaucoup de gens, se sont retrouvés pris dans l'émotion du moment."
Selon la productrice, Jeanne sert de porte d'entrée dans l'histoire pour le spectateur, afin de ne pas perdre le fil devant la multiplicité de protagonistes et d'éléments narratifs, mais aussi de liant entre les autres personnages. "On a une liberté avec ce personnage fictif qu'on aurait pas avec des personnes réelles pour interagir avec certaines personnes, pour donner une opinion aussi. Il y a parfois des conversations entre Jeanne et Antoine (Stanley Weber) sur la machine médiatique, des questions sur la responsabilité collective..."
"J'étais contente d'interpréter ce personnage parce que ça permettait aussi de montrer un certain état dans le milieu médiatique", renchérit Laurence Arné. "C'était encore assez patriarcal à l'époque, et je trouve ça très intéressant de montrer que c'était mal vu au début d'aller sur le terrain pour une femme, d'avoir une carrière journalistique, et se battre aussi sur place contre ses confrères qui commencent à partir dans une course au scoop, alors qu'elle tente de garder une éthique."
Pour l'actrice, Jeanne Lombardie est "un mélange des journalistes qui étaient pro-Villemin", tout en étant "plus fictive que le personnage de Laurence Lacour". Correspondante à Europe 1 pour le journal L'Est de la France au moment de l'affaire Grégory, Laurence Lacour publie quelques années plus tard Le Bûcher des innocents, un livre à charge contre les dérives médiatiques qui ont entouré l'enquête. Si cette dernière n'est pas directement citée dans la série, elle a bien fait partie des sources d'inspiration pour le personnage de Jeanne Lombardie, admet la productrice.
Dans son livre, Lacour critique notamment les pratiques de son confrère Jean-Michel Bezzina, journaliste pour RTL, qui a abreuvé la plupart des grands titres nationaux pour lesquels il écrivait de spéculations sur la thèse de l'infanticide, ayant contribué à ce que Christine Villemin soit mise en examen. Une approche retranscrite dans la série de TF1, où Lombardie se montre ouvertement en conflit avec Bezzina, incarné à l'écran par Michaël Youn.
Pour Laurence Arné, ce personnage sert enfin à défendre le parti de Christine Villemin. "Être dans une solidarité et une sororité avec elle, dans le combat contre certains journalistes qui veulent la diaboliser. Il y avait quelque chose d'un combat féministe qui me plaisait beaucoup dans ce personnage."