Allociné : L’Opéra est une de vos premières expériences à la télévision, vous êtes surtout une habituée des plateaux de cinéma. Pourquoi avoir choisi de jouer dans la série ?
Ariane Labed : Quand j’ai lu les scénarios de L’Opéra, j’ai eu un vrai coup de cœur. C’était pour moi l’occasion rêvée de retrouver mon premier amour : la danse classique. C’était un domaine que j’aimais beaucoup quand j’étais petite fille et adolescente. Je pensais d’ailleurs devenir danseuse un jour mais j’ai finalement changé de parcours. J’étais donc forcément émue à l'idée de jouer une danseuse étoile.
La construction des personnages de la série m’a aussi beaucoup plu. Ils sont vraiment riches et possèdent de nombreuses facettes, ce qui fait qu’ils ne sont pas du tout binaires. J’avais l’opportunité de dépeindre une danseuse étoile qui a un comportement à la limite de l'irresponsabilité, très noire, qui est un peu décalée par rapport à l'image qu’on se fait habituellement d’une danseuse étoile mais qui dans le même temps possède une force puissante. C’était pour moi évident que je devais incarner Zoé.
Vous avez donc fait de la danse quand vous étiez plus jeune mais vous avez tout de même dû réapprendre à danser. Comment s'est déroulé le processus de préparation pour la série ?
Pendant plusieurs mois, nous avons travaillé avec une équipe de chorégraphe et de danseurs. C'était un entraînement quotidien et très exigeant. Je tenais aussi à pouvoir danser autant que possible. Je voulais essayer de retrouver un niveau et de remettre des pointes que je n'avais pas remises depuis 20 ans. C'était un beau challenge à relever. J’ai eu suffisamment de temps pour travailler la danse ce qui m’a offert l’opportunité de danser et de jouer dans un même projet.
Vous avez réussi à vous entraîner suffisamment pour jouer quasiment toutes les scènes de danse. Quels ont été les moments où vous avez dû avoir recours à une doublure ?
J'ai essayé de tout danser effectivement, mais il y a eu des moments où le plan était plus impressionnant si c’était une danseuse professionnelle qui faisait le pas ou le mouvement. J’ai essayé d’atteindre le meilleur niveau possible avec le temps que j’avais mais, évidemment, sur certains détails, c'était important d’avoir quelqu’un dont c’était le métier.
Certaines scènes de L'Opéra, surtout les scènes de danse, sont très impressionnantes. Quelle a été la scène la plus dure à tourner ?
Mon plus gros défi physiquement a été la séquence du lac des cygnes, car quasiment toute la scène est sur pointe, plus précisément sur la pointe gauche et cela pendant très longtemps. C’était aussi un pas de deux, que j’avais très peu fait, voire pas du tout quand j’étais plus jeune car j’ai abandonné la danse au moment où on commence à l’apprendre. C’était vraiment le plus dur pour moi.
La série aborde de nombreuses problématiques liées au monde de la danse, comme la représentation des minorités, la pression mise sur les danseuses que ce soit au niveau de la forme physique ou au niveau du corps. Est-ce que c'était des problématiques dont vous aviez conscience avant de lire les scénarios de L'Opéra ?
Oui, c'était d’ailleurs l’une des raisons pour laquelle j'avais arrêté la danse classique. J’ai senti à un moment donné que je ne pourrais pas m’épanouir en tant qu’adolescente et jeune femme en restant dans ce monde-là. L’Opéra a été d’une certaine façon un moyen pour moi de me réconcilier avec la danse classique. J’ai pu me rappeler du bonheur et de la joie que l’on peut ressentir quand on maîtrise son corps.
Mais on ne peut pas nier que toute la culture autour du corps de la ballerine est très dure. Heureusement, les choses sont en train de changer. Il y a aujourd’hui des étoiles qui ont des corps différents et qui ne sont pas forcément tous blancs. Mais il faut se battre contre une longue tradition d’un certain standard de beauté. J’ai beaucoup aimé pouvoir aborder ces sujets-là car c’est quelque chose que j’ai traversé quand j’étais adolescente. C’est très difficile d’être en paix avec son corps quand on fait de la danse.
Avez-vous cherché l'inspiration dans le travail d’autres danseuses étoiles afin de créer le personnage de Zoé ?
Je me suis mise à suivre beaucoup de danseuses étoiles sur Instagram parce que j'avais besoin de voir à quoi pouvait ressembler une danseuse, mais je n’ai pas vraiment eu une personne en particulier. Si je pouvais citer un nom, ce serait celui de Marie-Agnès Gillot. Je trouve qu’elle est très proche du rôle, elle a un côté un peu “dark” qui m’émeut beaucoup et qui m’inspire. Mais mon personnage n’est pas basé sur quelqu’un en particulier.
Avez-vous reçu sur le tournage des conseils ou de l'aide d'anciennes étoiles ?
Non, j'ai eu de l'aide de danseurs en général mais pas d'étoiles. Et je ne voulais pas forcément en avoir, car il y a un côté très noir chez Zoé, que nous ne voulions pas forcément calquer sur une danseuse en particulier.
Et puis L'Opéra est une fiction. Il fallait que Zoé puisse toucher des gens qui n’ont pas forcément de liens avec la danse. Je voulais me baser sur le personnage de fiction créé par Cécile Ducrocq plutôt que d'isoler du réel chez les vraies danseuses étoiles. Nous étions tellement entourés de danseurs sur le tournage que nous avions quand même une idée concrète de ce qu'était le métier.
Combien de temps prenait l'apprentissage d'une chorégraphie ?
Pour seulement quelques secondes à l'écran, il fallait plusieurs mois d'apprentissage. Au final, même si au montage, on ne gardait que quelques secondes, c'était des chorégraphies qui étaient plutôt d’une durée de deux ou trois minutes.
Mais, ce n’est pas forcément l’apprentissage des chorégraphies qui était le plus long, c’était surtout l’exécution et donc l'entraînement. J’ai dû beaucoup travailler mes pointes. Il fallait que je remuscle des muscles que nous n’utilisons pas habituellement.
C’était des mois de travail. Par chance, le confinement nous a donné le temps de bien nous préparer. Nous avions des Zoom avec les danseurs où nous faisions des barres et des barres au sol et cela 6 jours par semaine. ça nous a permis de pouvoir développer tous les muscles nécessaires pour pouvoir faire ces chorégraphies.
Le tournage de certaines scènes s'est déroulé à l'Opéra Garnier. Pour une personne passionnée de danse, ça devait être un rêve devenu réalité ?
C'est un rêve de petite fille. C'est d'ailleurs aussi une des raisons pour laquelle j'ai fait la série. J'avais visité l'Opéra quand j'étais petite fille, j'ai même retrouvé une photo de moi à 9 ans en bas des marches que j’avais fait lors d’une visite touristique. Et là d'y être, de tourner là-bas et d'y travailler, c'était évidemment très émouvant. C'est un lieu incroyable, qui est chargé d'histoire.
La série a déjà été renouvelée pour une saison 2 qui est entrée en tournage en juin dernier. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce qui attend votre personnage ?
Je ne peux rien dire de très précis. Mais je peux déjà vous dire que nous avons repris l'entraînement physique.