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    L'Image Fantôme en VOD : un making-of passionnant de Ghostland aux côtés de Pascal Laugier et Mylène Farmer
    Yoann Sardet
    Il a tremblé devant Shining, dévoré les zombies de Romero, affronté des boogeymens, convoqué démons et fantômes… Bref, il aime flipper.

    Après "Martyrs", Pascal Laugier livrait en 2018 avec "Ghostland" son quatrième long métrage : une claque horrifique multi-primée à Gérardmer, dont les coulisses sont racontés dans "L'Image Fantôme". Rencontre avec son réalisateur Thierry Sausse.

    Thierry Sausse

    L'Image Fantôme - Sur le tournage de Ghostland de Thierry Sausse

    • Disponible à l'achat et à la location en VOD

    Durant l'automne 2016 à Winnipeg au Canada, Pascal Laugier, accompagné de sa troupe de comédiens, s'attelle à la fabrication de son quatrième long métrage. Au plus proche des intervenants qui nous confient tour à tour leurs doutes, leurs joies et leurs envies, vivez le tournage de Ghostland aux côtés de ceux qui le font. 

    L'Image Fantôme - Sur le tournage de Ghostland
    L'Image Fantôme - Sur le tournage de Ghostland
    Sortie : 2 mars 2021 | 1h 13min
    De Thierry Sausse
    Spectateurs
    3,3
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    AlloCiné : Que signifie le titre de votre film, "L'Image fantôme" ?

    Thierry Sausse (réalisateur) : "L'Image fantôme" est le terme qu'emploie Pascal Laugier pour décrire une idée qui lui tient à cœur lorsqu'il fait un film. Il s'agit de ce que peut susciter chez le spectateur, le raccord entre deux plans qui se répondent parfaitement l'un à l'autre : un troisième plan invisible, une image fantôme. Cette image, qui n'est qu'une sensation, une idée qui ne serait pas montrée dans le film mais pourtant bien ressentie par le spectateur, se trouverait dans la jonction des deux premiers plans, quelque part entre les deux. L'association de ces deux idées en créé donc une troisième, bien plus forte. C'est ce type de moments de grâce au cinéma qu'il cherche alors qu'il fait ses films, et il m'en parlait alors que je l'interviewais pour le making-of. Au delà de me partager cette jolie pensée, il m'a servi le titre de mon film sur un plateau !

    Thierry Sausse

    Votre film n'est pas un making-of classique, qui va de la pré-production à la livraison du film fini, avec un suivi des différentes étapes de fabrication. Au contraire, vous proposez des séquences particulières qui permettent de comprendre le travail intime de Pascal Laugier. Cette approche était-elle prévue dès le départ, ou l'avez-vous adoptée au fur et à mesure du tournage ?

    Non, en effet, il ne s'agit pas d'un making-of pur et simple. J'avais envie de faire un film un peu singulier, de m'intéresser autant à Ghostland qu'aux gens qui le font. J'avais déjà une vague idée de l'allure que je voulais donner à ce making-of avant de le tourner. Je souhaitais donner une "impression" du tournage, du temps qui passe, du film entrain de naître sous nos yeux, mais aucune certitude quant à la manière de procéder. Je suis arrivé au Canada avec l'intention de me laisser guider par le cours des évènements, d'improviser en fonction de ce qui se déroulerait sous mes yeux. Mais après quelques jours de tournage, je m'apercevais que je filmais tous les jours sensiblement la même chose : un tournage. Des répétitions, des prises de vues... Je m'ennuyais un peu... Et j'ai vite changé mon fusil d'épaule, je suis revenu à mon envie première : parler aux gens, connaître leurs états d'esprit alors que s'enchainaient ces laborieuses semaines. Et Pascal et sa "troupe" d'acteurs, comme il les appelait, se sont avérés être de fiers alliés dans ma démarche !

    Thierry Sausse

    Dans le film, Pascal Laugier demande à ce que l'équipe technique préserve et respecte ses échanges avec ses comédien(ne)s. Comment avez-vous réussi à le convaincre de vous accueillir dans ce cercle très intime pour capter ces échanges, et comment vous êtes-vous rendu "invisible" ?

    Pascal a lui-même réalisé un making-of et sait à quel point ces moments d'intimité peuvent être précieux pour la réalisation d'un beau journal de bord. Ainsi, il m'a bien volontiers laissé accès à ses instants de partage avec ses actrices et ses moments personnels hors plateau. J'ai mis un point d'honneur à ne jamais déranger personne (je n'ai par exemple jamais filmé quelqu'un contre sa volonté) ou pénétrer dans la sphère familiale (la famille de Pascal était présente à ses côtés au Canada), mais au delà de ces deux grands principes, j'ai absolument tout filmé.

    La fabrication d'un film ne se limite pas à ce qu'il se passe sur le plateau alors que la caméra tourne. Entre le premier et le dernier clap, tout n'est que cinéma, et au détour d'une pause café, dans la voiture sur le chemin du retour, quelque chose de prodigieux peut se dérouler pour le making-of et il faut être prêt ! Pour ce qui est de me rendre invisible, vous n'avez vu que ce que j'ai bien voulu monter ! Mais le principe du "fly-on-the-wall" ne peut pas toujours s'appliquer lorsque l'on filme dans de vrais décors, souvent très petits, au milieu d'une équipe de tournage, souvent très nombreuse. Mais j'ai été chanceux, l'équipe a bien vite compris ma démarche, ce que j'étais venu faire parmi eux, et j'avais ma place autour de la caméra, au même titre que chaque technicien du film.

    Thierry Sausse

    Quel cinéaste avez-vous découvert en côtoyant Pascal Laugier ? Le film le montre comme un conteur en quête de moments de vérité totale : est-ce que cela vous semble être une bonne définition ?

    Je ne sais pas si l'on peut parler de recherche de vérité, mais plus simplement de capter et retranscrire au mieux des sensations qu'il a pu ressentir étant enfant, alors qu'il découvrait les contes auxquels il fait référence dans Ghostland. Pascal est un pur cinéphile et une grande quantité de films lui ont certainement traversé l'esprit alors qu'il travaillait à son film à lui. Mais je crois qu'afin de préserver la fraicheur de son envie, celle de mêler l'univers des contes merveilleux et du monde moderne, il pensait surtout aux dessins et gravures qui illustraient les livres de son enfances. Ma plus belle découverte, en côtoyant Pascal sur la fabrication de Ghostland, n'a donc pas été le travail d'un cinéaste en particulier, mais plutôt l'imposante oeuvre de l'illustrateur Gustave Doré et particulièrement son travail de gravures sur les contes de Charles Perrault, que Pascal mentionnait souvent.

    Thierry Sausse

    Les comédiens que vous avez rencontrés semblent totalement enchantés de leur expérience avec Pascal Laugier...

    De tous les éléments qui composent la fabrication d'un film, je pense que le travail avec les comédiens est parmi ceux qui passionnent le plus Pascal. Cela saute aux yeux lorsqu'on le côtoie au travail, et j'ai tenu à en faire un élément central de mon film. Regarder Pascal diriger un acteur, c'est passionnant. Il est tous les personnages à la fois, exigeant, rassurant et bienveillant. Je suis convaincu que tout le casting a adoré son aventure "Ghostlandienne".

    Pascal Laugier évoque une scripte ou différents techniciens qui ont quitté ses films, face à son approche jusqu'au-boutiste. Comment était l'ambiance sur le plateau de "Ghostland" ? Avez-vous eu parfois le sentiment que des séquences allaient trop loin ?

    Non, jamais. Ghostland est un film violent, au même titre que les contes de fées dont il se nourrit. Et les gravures de Gustave Doré justement, déjà vieilles de plus d'un siècle, nous le montrent bien ! C'était ça Le Petit Poucet, Hansel et Gretel...La scripte n'était pas en accord avec le film et a préféré partir, c'est son droit le plus entier. Ce n'était simplement pas son truc. Mais je peux vous assurer qu'au delà du stress, du doute et de la pression de la montre que j'illustre beaucoup dans le making-of, il régnait sur le plateau une ambiance très bon enfant !

    Thierry Sausse

    On sent dans le film la frustration de Pascal Laugier d'être confronté à une équipe technique nord-américaine qui est là pour faire un travail, quand lui est là pour capturer des instants de vérité. Comment avez-vous vécu ces moments d'incompréhension entre deux visions très différentes du cinéma ?

    J'ai vécu ces moments avec beaucoup d'intérêt, c'est l'avantage de faire un making-of. Que les instants soient joyeux ou désespérés, il y a toujours matière à prendre ! J'étais le spectateur du tournage et je filmais en toute neutralité. Mais oui, vous avez raison, Pascal s'est bien difficilement acclimaté à la manière nord-américaine de procéder. Cette grosse machine déployée autour de son film n'était pas la façon dont il espérait le tourner. Il envisageait les choses bien plus simplement, moins de monde, moins de contraintes liées au protocole de tournage, plus de liberté en somme. Mais objectivement, il ne s'en est pas trop mal tiré !

    Thierry Sausse

    Le film se conclut sur son désarroi vis à vis de la mauvaise considération que le cinéma français peut avoir du cinéma de genre. C'est une blessure sur laquelle Pascal Laugier s'est beaucoup confié ?

    En effet, Pascal me parlait souvent de son envie de filmer "sa terre à lui", ses mythes à lui, plutôt que de devoir s'exiler à chaque fois à l'autre bout du monde pour tourner ses histoires en anglais. Je pense qu'il est réellement triste de ne pas être en mesure de le faire en France. Mais le cinéma l'emporte à chaque fois. Et au fond, quelle que soit la langue, le sujet ou le genre, l'important pour lui reste de faire des films qu'il aime et qui lui ressemblent. Et si cela implique une vie entière de voyages pour poser sa caméra, je sais qu'il est prêt à le faire. A partir de l'instant ou ce qu'il se passe à l'écran le satisfait pleinement, je suis convaincu que le reste n'a finalement que très peu d'importance pour lui.

    Qu'est-ce que Pascal Laugier a pensé de votre film ?

    C'est à lui qu'il faut poser la question mais il me semble qu'il l'a plutôt apprécié.

     

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