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    La Guerre des Mondes sur Canal+ : "la série reflète le meilleur et le pire de nous-mêmes" pour son créateur
    Julia Fernandez
    Julia Fernandez
    -Journaliste Séries TV
    Elevée à « La Trilogie du samedi », accro aux séries HBO, aux sitcoms et aux dramas britanniques, elle suit avec curiosité et enthousiasme l’évolution des séries françaises. Peu importe le genre et le format, tant que les fictions sortent des sentiers battus et aident la société à se raconter.

    Alors que Canal poursuit la diffusion de la série avec deux nouveaux inédits ce soir à 21h05, le showrunner Howard Overman ("Misfits") évoque les défis rencontrés sur le tournage de cette deuxième saison.

    Alors que le final de la saison 1 nous laissait sur un cliffhanger, la saison 2 de La Guerre des Mondes reprend quelques mois après les derniers événements, alors qu'Emily (Daisy Edgar-Jones) disparaissait dans un vaisseau alien après avoir découvert que ces derniers avaient une apparence humaine.

    En s'inspirant librement du roman de H.G. Wells, tombé dans le domaine public en 2017, Howard Overman, créateur de la série, reprend le même point de départ - une invasion extra-terrestre - en ajoutant sa propre interprétation à ce titre reconnu.

    "Le livre était tellement en avance sur son temps", confie-t-il, "mais je ne me suis jamais senti limité par l'oeuvre, car je pense que l'idée centrale de son histoire, une invasion alien et ses conséquences pour l'humanité, peut être emmenée dans n'importe quelle direction."

    Après un saut dans le temps de quelques mois, l'intrigue de la série reprend là où nous l'avions laissée. Si peu de choses ont changé pour la plupart des personnages, ils ont dû s'endurcir. "Tom (Ty Tennant,  le frère d'Emily, ndlr) est un bon exemple de leur évolution. C'était un gamin innocent à la fac, il était tout le temps effrayé et perdu."

    "Lorsqu'on le retrouve en saison 2, cela fait quatre mois qu'il se bat sans arrêt ; il s'est secoué et est devenu un soldat. Je pense qu'on voit souvent ce genre de phénomène dans les zones de combat : les enfants perdent leur puérilité et changent assez vite."

    De la science-fiction vraisemblable 

    Si la série dispose d'un budget conséquent, le showrunner ne voulait pas pour autant imposer de coûteuses scènes de batailles avec un grand nombre de figurants et d'effets spéciaux, et a introduit un style à la fois intimiste et cinématographique.

    "Nous voulions raconter des histoires personnelles, intenses et intimes. Nous travaillons dur pour que les décors et les lieux où se déroule la série aient l'air crédibles, en filmant des plans longs et en donnant une vraie sensation cinématographique, en opposition avec un montage plus "télé", avec une alternance de gros plans et de plans larges" explique-t-il.

    Concernant l'apparence des aliens, Howard Overman voulait, avec ses équipes créatives, constituer une science-fiction qui fasse "vraie", citant l'exemple des déchets de métaux rouillés flottant dans l'espace dans la saga Star Wars :

    "Ca ne m'intéressait pas de faire des choses rutilantes et immaculées à l'aspect ultra-futuriste. Je voulais rester terre-à-terre, réaliste. Je pense que c'est ce à quoi ressemblera la technologie dans le futur. Les choses se font malmener et égratigner, on sera bien loin d'une vision éculée d'un monde blanc et parfait."

    Tourner en temps de COVID

    Lors du tournage de cette saison 2, filmée entre la France, le Pays de Galles et Londres, le principal défi était de réussir à tourner en plein milieu d'une pandémie mondiale. Mais contre toute attente, cette contrainte s'est révélée être un atout. 

    "En ce qui concerne les repérages, les lieux en intérieur dans des immeubles ou des maisons de particuliers sont habituellement difficiles à obtenir. Mais avec la pandémie, nous avons pu filmer dans des endroits comme des salles de cinéma, des centres commerciaux... Ce genre de lieux auxquels nous n'aurions jamais pu avoir accès, car trop coûteux ou bondés, étaient tous fermés à cause du COVID.

    Filmer une série post-apocalyptique dans des rues désertes, des lieux vidés de leur public sous un ciel dépourvu de trafic aérien s'est donc avéré plutôt bénéfique pour les équipes de tournage. "D'habitude, nous devions enlever [ce genre de détails] avec des effets spéciaux. Evidemment, lorsqu'on filmait pendant le confinement, les rues étaient vides et il n'y avait pas d'avions."

    Des personnages en sursis

    Cette saison 2, qui s'inscrit dans le prolongement direct de la première, explore l'idée de savoir jusqu'où l'homme serait capable d'aller pour se préserver, et à quel point nous sommes différents de ceux à qui nous avons déclaré la guerre, poursuit le showrunner.

    Avec, à la clef, la révélation que nous puissions être notre propre ennemi, et que l'humanité doit se confronter à elle-même. "Je crois que c'est pour cette raison que depuis tout temps, les stratèges militaires ont toujours essayé de déshumaniser leurs ennemis. C'est plus facile de tuer des gens auxquels vous ne vous identifiez pas. L'une des choses que l'Histoire nous enseigne, c'est que lorsqu'on comprend que les gens ont plus de similarités que de différences, c'est plus difficile de les combattre."

    Maintenant que nous savons qui sont les aliens dans la série, cette saison 2 explore les raisons de leur attaque et de leur volonté de détruire l'humanité. "Tout est parti d'une citation de Stephen Hawking : l'idée que si un jour nous trouvions des extra-terrestres, les choses tourneraient mal, de la même façon que lorsque nous sommes allés dans d'autres pays et les avons colonisé. C'est en quelque sorte l'Histoire qui se répète."

    La Guerre des Mondes (Canal+)
    La Guerre des Mondes (Canal+)
    Sortie : 2019-10-28 | 52 min
    Série : La Guerre des Mondes (Canal+)
    Avec Gabriel Byrne, Léa Drucker, Bayo Gbadamosi
    Presse
    3,2
    Spectateurs
    3,1
    Voir via MyCanal

    Pour le showrunner, pas question de faire dans la dentelle quant à au traitement de ses personnages. "C'est une invasion extra-terrestre, des milliards de gens meurent ! C'est intéressant, lors d'une rencontre avec des journalistes pour la promotion de la saison 1, tout le monde m'avait reproché d'avoir tué cette petite fille dans le frigidaire dans un épisode. Et j'ai alors souligné le fait qu'avant cela, j'avais tué six milliards d'individus !"

    "Je crois que c'est important que des séries comme Game of Thrones nous montrent que nous vivons dans un monde dangereux. Si tous vos personnages principaux survivent, alors il n'y a pas de menace, et ça ne paraît pas réel."

    Et au vu de la saison 2, le sort des héros de La Guerre des Mondes n'est pas près de s'arranger puisque, selon lui, certains des personnages les plus appréciés de la série risquent bien de trépasser dans les prochains épisodes...

    Loin d'être aseptisée, la série nous confronte à la mort brutale de personnages auxquels on s'attache, mais aussi au fait qu'ils commettent des actes douteux pour suvivre, et qui nous interpellent :

    "Je vis une vie confortable et sécurisée, dans la classe moyenne, et c'est très facile de rester là à ne rien faire, et de se dire qu'on ne ferait jamais rien de mal ou d'immoral. Mais si quelqu'un menaçait de s'en prendre à mes enfants, alors je ne suis pas sûr qu'il y aurait une limite à ce que je pourrais faire."

    Bill Ward (Gabriel Byrne), le neuroscientifique qui tente de mettre au point un virus pour éradiquer les aliens, doit se poser cette question alors qu'il comprend qu' Emily serait un cobaye idéal : jusqu'où est-il prêt à aller pour protéger l'humanité ? 

    "Face à une pandémie, les gens ont été pris de panique et ont acheté des quantités astronomiques de papier toilette ; alors imaginez leur réaction face à une invasion extra-terrestre... Dans ce sens, j'espère que la série parvient à refléter le meilleure et le pire de nous-mêmes.

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