Lancé le 17 mai sur Canal+, le deuxième chapitre de La Guerre des Mondes version franco-britannique, plus sombre que jamais, prend une dimension troublante en cette période de crise sanitaire. Peur de l'Autre, attaque bactériologique dévastatrice, ordre mondial bouleversé : l'adaptation du roman de H.G. Wells par le showrunner Howard Overman donne une perspective bien sombre à l'humanité.
Dans la série, Gabriel Byrne, acteur irlandais révélé dans Miller's Crossing des frères Coen et devenu une star internationale avec la série En Analyse, joue Bill Ward, un neuroscientifique de renom déterminé à trouver un remède contre les aliens qui ont quasiment éradiqué l'humanité en quelques jours.
Grand fan du roman original, l'acteur a trouvé un écho pertinent avec l'actualité lorsqu'on lui a présenté le projet d'adaptation quelques années plus tôt : "A l'époque, on m'avait demandé ce qu'étaient les aliens selon moi, et j'avais répondu l'environnement. Je pense que c'est ce que représentent ces créatures, la véritable menace de l'humanité, et comment nous allons devoir nous y confronter."
"Le pouvoir de ce type de récit c'est de vous inciter, à un niveau inconscient, à réfléchir sur le monde. Quand je lis un script, je me demande toujours : quel en est le contenu ? Quel est son message ? Si dans son contenu je trouve une bonne raison de m'engager sur un projet, je le fais."
Dans cette deuxième saison, le personnage de Bill se retrouve anéanti après avoir vu ses proches périr dans la catastrophe. Comment avancer lorsqu'on a tout perdu ?
"C'est un scientifique. Parce qu'il a un désir inhérent de résoudre les problèmes, il se lance dans une course pour essayer de trouver la solution à cette horreur. Pour moi, ça lui donne une raison encore forte d'essayer de résoudre cette menace. C'est presque comme s'il se vengeait lui-même, en réparation de la mort de sa femme et de son fils."
A travers l'élaboration d'un virus, Bill Ward tente dans cette saison d'analyser les aliens afin de pouvoir les détruire de l'intérieur. Pour cela, il doit d'abord comprendre ce qu'ils sont et d'où ils viennent... Quand des agents doubles ne se cachent pas parmi les survivants.
En effet, cette saison 2 explore l'idée que l'envahisseur puisse être humain avec, en sous-texte, l'idée que nous sommes nos propres ennemis, selon l'acteur :
"L'idée du virus a été écrite avant la pandémie. Parfois, il y a des choses dans l'air du temps sur lesquelles on tombe par hasard. Mais ce n'est pas juste à propos d'un virus au sens littéral : pour moi ça parle aussi du virus de la désinformation, et comment nous avons tous été contaminés par les "faits alternatifs" selon l'expression de Kellyanne Conway (conseillère de l'ex-Président Donald Trump, ndlr). Maintenant, les gens ont du mal à définir ce qu'est la vérité."
Le rôle du scientifique qu'il incarne devient alors le maigre espoir auquel se raccrochent Catherine Durand (Léa Drucker) et son équipe dans cette saison, afin de mettre un terme au massacre de l'humanité.
"La véritable menace ne vient pas des aliens, elle vient de l'humanité. C'est une des choses que la série dit plutôt clairement (...) Pourquoi trainons-nous encore des pieds aujourd'hui face au changement climatique ?" s'emporte-t-il. "Combien de temps nous reste-t-il si nous n'agissons pas ? C'est là où la série est très pertinente : nous devons avoir peur de ça, pas des monstres dans les films."
Dans cette perspective, l'acteur se montre très critique envers les films de super-héros. "Leur sous-texte, c'est qu'un seul individu peut sauver le monde. C'est délirant. La seule façon dont le monde peut être sauvé réside dans l'action collective."
Pour Gabriel Byrne, la fiction permet de placer nos peurs à un endroit précis et de les résoudre de manière symbolique. Mais la véritable question est de savoir si nous sommes capables de résoudre concrètement les problèmes auxquels nous faisons face aujourd'hui.
"Souvent, nous avons du mal à identifier qui est le véritable ennemi. Nous sommes distraits des véritables problèmes : est-ce que les cheveux de Donald Trump sont faux, quelle sera la couleur du bébé du prince Harry... Des discours vides de sens qui ne résolvent rien."
Très sombre, et n'épargnant pas le spectateur, cette nouvelle saison de la série nous place face à notre propre responsabilité en tant qu'individu : sommes-nous capables de faire les bons choix face en temps de crise ?
"Il n'y a rien de ce qui se passe aujourd'hui qui ne soit pas déjà arrivé par le passé", poursuit l'acteur. "Toutes les sociétés sont fragiles : l'Empire romain, la Grèce antique, les Phéniciens... Elles se sont toutes effrondées. L'humanité a survécu. Mais l'histoire se répète, et ce n'est pas un hasard si on ne nous l'enseigne pas correctement. Parce que si on peut oublier le passé, on ne se préoccupe pas du présent."
"La chose seule qu'on ne peut pas prédire, c'est le futur", conclut-il. "Le seul moyen de l'appréhender, c'est à travers la science-fiction. C'est ce qui rend ce genre si passionnant."
La Guerre des Mondes saison 2, chaque lundi à 21h05 sur Canal+.