Comme beaucoup de cinéastes de sa génération, Monte Hellman a démarré aux côtés du vétéran Roger Corman. D'abord engagé comme monteur, il participe entre autres à The Terror, pourtant signé par le seul Corman, puis réalise en 1959 un film d'horreur à très petit budget, Beast From Haunted Cave.
C'est sur le tournage du premier qu'il fait la connaissance de Jack Nicholson. Une rencontre décisive puisqu'en 1964, ils tournent ensemble, coup sur coup, un film d'aventures et un film de guerre, respectivement intitulés Flight to Fury et Back Door To Hell, qui sont quasi-ignorés par la critique.
Deux westerns à redécouvrir
La chance tourne grâce à leurs deux films suivants, deux westerns novateurs qui établiront la renommée de Hellman : L'Ouragan de la vengeance (1965), écrit et interprété par Nicholson, et The Shooting (1967), dans lequel il se contente de jouer.
A une époque où le genre est tombé en désuétude, le duo le renouvelle en osant l'épure, l'onirisme voire la violence sèche et frontale. Il annonce ainsi l'arrivée des movie brats ("mauvais garçons") de Hollywood comme Arthur Penn ou Robert Altman. En outre, il lance des acteurs aujourd'hui confirmés comme Harry Dean Stanton ou Warren Oates.
Un acteur fétiche
Après une pause de cinq ans lors de laquelle il assiste Corman sur des productions à petit budget, Monte Hellman revient à la réalisation avec son film le plus célèbre, Macadam à deux voies (1971), road-movie contemplatif et énigmatique qui hélas ne rencontrera pas le public, en dépit du concert de louanges issu d'une partie de la critique.
Le film offre un rôle important à Warren Oates, qui devient alors l'acteur fétiche de Hellman puisqu'il le retrouvera pour les films d'aventures Cockfighter (1974) et China 9 Liberty 37 (1978).
Vaches maigres
Le manque d'engouement public pour ses films conduit néanmoins Hellman à accepter des commandes mineures, comme Shatter (1974), un film d'action tourné à Hong-Kong, ou encore Baretta, téléfilm policier anodin diffusé en 1975, mais aussi à finir les films des autres : ainsi achève-t-il The Greatest, documentaire sur Muhammad Ali entamé par Tom Gries, et Avalanche Express, du vétéran Mark Robson, tous deux morts en cours de tournage.
Réalisateur maudit ?
Après une décennie sans tourner, il réalise un film d'action bizarre et érotique, Iguana (1988), et un film d'horreur de série Z, Silent Night, Deadly Night 3: Better Watch Out! (1989), deux nouveaux échecs commerciaux qui contribuent à construire la légende du réalisateur comme « poète maudit » du cinéma.
Producteur de Tarantino !
Mais s’il ne trouve pas son public, Monte Hellman est parvenu à devenir culte pour toute une génération de cinéastes amateurs de "séries B" et de cinéma "underground", à commencer par Quentin Tarantino dont le cinéaste coproduira le premier film, Reservoir Dogs en 1992.
A la demande de Vincent Gallo, il aurait dû aussi réaliser Buffalo'66 si les producteurs n’avaient pas eu peur de sa réputation.
"Underground" jusqu'au bout
Confronté durant les vingt années qui suivent à une difficulté toujours plus grande à faire ses films, Monte Hellman se contente de réaliser de rares courts métrages et d'apparaitre occasionnellement dans son propre rôle au casting de quelques films d’admirateurs comme le finlandais Mika Kaurismäki (I Love L.A., 1999).
Le cinéaste fait pourtant son grand retour au cinéma à la Mostra de Venise en 2010 où il présente le thriller Road To Nowhere qui met en scène une affaire de meurtre pendant le tournage d'un film. Il y croise d’ailleurs certains de ses plus grands défenseurs, Quentin Tarantino, Président du Jury, et Vincent Gallo qui y reçoit le prix d’interprétation pour Essential Killing de Jerzy Skolimowski.
Hellman y reçoit un Prix d'honneur (le seul de sa carrière), et Road to Nowhere sera son dernier long métrage.
AlloCiné avait rencontré le cinéaste à Venise, en 2010 :