En 1972, Claude Sautet réalisait un film devenu culte, notamment grâce à son couple mythique, Yves Montand en César, et Romy Schneider en Rosalie, complété par Samy Frey. César et Rosalie, ou l'histoire d'un triangle amoureux, que le cinéaste a imaginé avec son fidèle complice scénariste, Jean-Loup Dabadie, avec la collaboration de Claude Néron.
A l'occasion de la diffusion du film ce soir sur C8, et son arrivée dans le catalogue de la plateforme de streaming Netflix, retour sur la formation d'un couple iconique Montand-Schneider, dont César et Rosalie restera la seule collaboration à l'écran.
Avant d'être proposé à Yves Montand et Romy Schneider, le projet avait été imaginé avec d'autres comédiens... 10 ans auparavant ! Le film aurait pu être précisément celui que Sautet aurait réalisé après Classe tous risques (1960). Le rôle principal avait alors été proposé à Vittorio Gassman, et Jean-Paul Belmondo avait également été imaginé dans le rôle finalement tenu par Sami Frey. Gassman refuse le projet et finalement cette première version du scénario, écrite en 1963, n'aboutira pas avant plusieurs années, et l'intervention de l'agent de Claude Sautet -Jean-Louis Livi- qui rachète le projet auprès de Michèle de Broca qui en détient les droits.
Je ne suis pas Rosalie. Mais je serai ta Rosalie.
L'idée de ce film ressurgit avec un casting différent : Catherine Deneuve et Yves Montand. Dans "Conversation avec Claude Sautet", de Michel Boujut, on apprend que Catherine Deneuve était "très enthousiaste". Mais le temps file et son contrat n'est toujours pas signé... "Pris de panique, j’ai télégraphié à Romy qui tournait l’Assassinat de Trotski au Mexique avec Losey. Elle a accepté après avoir lu un résumé de vingt pages. Nous nous sommes retrouvés plus tard en Italie", se souvient Claude Sautet dans ce livre d'entretien. Il raconte que Romy Schneider lui aurait dit d'emblée : "Je ne suis pas Rosalie. Mais je serai ta Rosalie." Le cinéaste indique par ailleurs que la comédienne avait parfaitement conscience qu'elle n'était pas le premier choix pour ce casting...
Claude Sautet ne tarit pas d'éloge sur ce que Romy Schneider a précisément apporté au personnage, lui apportant une certaine épaisseur : "Elle aimait bien les scènes où elle se retrouvait paumée. Elle n’avait pas cette pudeur. Il faut dire qu’alors les rapports de Romy avec son mari, Harry Mayen, s’étaient détériorés. Elle était tout à fait égarée dans sa vie privée. Son angoisse profonde déteignait sur Rosalie et lui donnait plus d’épaisseur."
Yves Montand et un rôle qui colle à la peau
Le choix d'Yves Montand est une évidence pour le réalisateur. Mais le comédien aurait d'abord exprimé quelques réserves avant d'accepter... "Il a d’abord eu peur. Peur de jouer un “cocu”. Du reste, Gassman avait eu la même réaction : “Cornuto ? Impossibile !” C’est Simone Signoret qui l’a finalement persuadé. Elle et Romy s’aimaient beaucoup", confie-t-il auprès de Michel Boujut. L'estime et le respect de Sautet envers Montand sont réciproques : "J’aurai toujours une grande tendresse pour Claude Sautet. Il m’a vraiment percé à jour, à mon insu, si je puis dire. Il a très bien compris que ce qui pouvait être considéré chez moi comme de la faiblesse, ou un manque de connaissances, n’était qu’une forme de mala-dresse et de naïveté qui l’est bien sûr beaucoup moins aujourd’hui, puisqu’il me l’a révélée."
Et d'ajouter : "Il a su utiliser ce qu’il lui fallait pour son personnage : à la fois une grande santé et cette grande naïveté. (...) Il y a des rôles, comme ça, qui vous libèrent et vous enrichissent", explique-t-il dans Yves Montand d’Alain Rémond (Veyrier, 1980). Ce rôle lui collera à la peau par la suite. "Ayant découvert dans César une partie de lui-même, il a eu tendance plus tard à en faire un procédé. Et donc, à cabotiner un peu", dit sans détour Claude Sautet.
Si Montand et Sautet s'apprécient, le tournage de César et Rosalie ne sera en revanche pas de tout repos. Il y a des tensions, et le climat n'est pas toujours au beau fixe entre comédiens. "Je devais sans cesse intervenir, alternant le chaud et le froid pour panser les blessures d’amour-propre et de susceptibilité. Ce furent quatorze semaines de tension et sûrement le tournage pendant lequel j’ai été le plus de mauvaise humeur !", résume Claude Sautet. Le comportement d'Yves Montand aurait eu tendance à irriter ses partenaires. Ces tensions ne transparaissent pas dans le film, révélant un couple mythique du cinéma français. A (re)découvrir ce soir sur C8.
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