De quoi ça parle ?
Dans une ville de bord de mer industrielle et labyrinthique, des inconnus s’enflamment brutalement, sans raison. Suicides ? Meurtres ? Phénomènes surnaturels ? Pour le découvrir, Louise, une jeune journaliste, et Gabriel, un psychiatre, vont mener l’enquête.
Créée par Arnaud Malherbe & Marion Festraëts. Les jeudis 22 et 29 octobre sur Arte et Arte.tv. 6 épisodes vus sur 6.
à quoi ça ressemble ?
ça vaut le coup d'oeil ?
Moloch, la nouvelle proposition de thriller fantastique social d'Arte après Au-delà des murs, Transferts, Ad Vitam -entre autres tentatives plus ou moins marquantes et réussies- est peut-être la plus aboutie visuellement, assurément la plus flamboyante, même si le piège habituel de ce "monstre délicat" qu'est l'ennui se referme sur elle au fur et à mesure des épisodes, après un départ de feu impressionnant. Moloch ne manque pas d'atouts, de son pitch fort à ses thématiques contemporaines aux échos troublants en passant par ses interprètes impeccables, mais la promesse n'est pas tenue jusqu'au bout.
Arnaud Malherbe, créateur, co-scénariste et réalisateur de la série, qui a travaillé précédemment sur Chefs pour France 2, avec des contraintes plus fortes, l'assume : il a voulu faire de belles images, et elles sont bel et bien sublimes, et prendre le temps de dérouler son récit sans obligations de rythme et d'action perpétuelle. C'est donc initialement grâce à son ambiance, son identité visuelle -les combustions spontanées comme des fulgurances- ses personnages singuliers et la colère sourde qui la traverse que la série fascine, en particulier sur ses trois premiers épisodes de très bonne facture. La suite perd en intensité, au point de se demander si le jeu en valait la chandelle, et la réponse est : oui. Malgré tout.
Jamais très éloignée du polar nordique cher à Arte, dans ses décors, sa noirceur et même son dispositif, Moloch a la bonne idée de mettre les personnages de policiers au second plan pour miser sur son duo central composé d'une journaliste rock, ambitieuse et obstinée, incarnée par la magnétique Marine Vacth, et un psychiatre endeuillé, inquiétant et mystérieux, porté par le charismatique Olivier Gourmet. Le flic, parce qu'il y en quand même un, est joué par Arnaud Valois, que l'on voit finalement assez peu, avec un personnage sans grand relief. Marc Zinga, dans la peau d'un homme possédé, est celui par qui le fantastique entre, mais à force de vouloir multiplier les pistes et les genres tout en maintenant un suspense sur six longues heures, cet aspect de la série est parfois sacrifié.
Qu'ils évoluent ensemble ou séparément, Louise et Gabriel, deux êtres solitaires, torturés et fondamentalement insondables, nous entraînent dans des méandres bourbeux dont on ne saisait pas toujours les enjeux, mais qui poussent à la contemplation et la réflexion. Moloch raconte nos sociétés avec une pertinence qui semble presque lui avoir échappé, tant la réalité s'est rapprochée de la fiction au cours de son écriture. Pour cela, au moins, et pour sa mise en scène hypnotique aussi, la série se distingue en cette fin d'année de tout ce qui nous est proposé. Et c'est déjà beaucoup.