Petits budgets pour gros succès. Depuis plus d'une décennie, la recette Blumhouse fait son effet. Des franchises Paranormal Activity et Insidious au très primé Get Out de Jordan Peele, la société de Jason Blum ne cesse de secouer le monde de l'horreur. Leur dernier film, The Vigil, réalisé par Keith Thomas, débarque dans les salles ce 29 juillet 2020 et s'appuie sur une tradition de la religion juive pour offrir aux spectateurs quelques frissons. Présenté au festival de Gérardmer en début d'année 2020, le long métrage suit Yakov (Dave Davis), un jeune homme ayant tourné le dos à la communauté hassidique, mais qui accepte, pour des raisons financières, une mission de shomer (dans la culture juive, le shomer reste près du corps d'une personne décédée le temps d'une nuit, NDLR). Seul et isolé avec ce cadavre recouvert d'un drap blanc, Yakov n'aura d'autre choix que de se confrontrer à un démon venu du passé et à ses peurs les plus profondes.
Une plongée dans la culture juive
Avec son tout premier long métrage, Keith Thomas souhaitait "faire quelque chose de différent, qui n'a jamais été fait auparavant". Il est vrai, qu'à quelques exceptions près, la culture juive est peu traitée dans le cinéma de genre. Né d'une mère croyante et d'un père athée, le cinéaste ne s'est intéressé au Judaïsme qu'après le lycée. C'est en lisant de nombreux textes qu'il a découvert le rôle du shomer. "Rester seul dans une pièce avec, pour seule compagnie, un corps sans vie, c'est l'idée parfaite pour un film d'horreur", s'amuse-t-il. Pour aborder ce sujet, il s'est informé auprès de plusieurs membres de la communauté juive : "Je connais quelques shomers et, bien sûr, ils ne trouvent pas ça terrifiant. Ils doivent prier toute la nuit et ne peuvent pas bouger, ni aller aux toilettes, par respect pour le mort."
De l'écriture du scénario au plateau de tournage, la mise en chantier de The Vigil a été plutôt rapide. "J'ai conçu le scénario en trois mois, je l'ai peaufiné pendant six mois et quatre mois plus tard, j'étais derrière la caméra pendant dix-huit jours", explique Keith Thomas. Véritable huis clos, le film repose principalement sur les épaules de son acteur principal, Dave Davis, qui incarne Yakov, le veilleur. "Quand je l'ai vu pour la première fois, j'ai su que c'était lui, se remémore le metteur en scène. Il avait un vrai équilibre, entre force et fragilité, qui était nécessaire au film. De plus, ce n'est pas un rôle très bavard, alors il me fallait un comédien qui soit expressif, que l'on puisse lire la peur sur son visage." Pendant trois semaines, Dave Davis a étudié de nombreux rites auprès de la communauté, au point même de se fondre dans la masse passé quelques jours.
Un monstre réaliste
Pour lui faire face, le réalisateur devait trouver une entité, un monstre. Une tâche plus compliquée qu'il n'y paraît car "la religion juive contient peu de démons". C'est finalement en la présence du Mazik - qui signifie "destructeur" en hébreux - que Keith Thomas a trouvé son inspiration. À l'écran, il le voulait le plus réaliste possible. "J'ai imaginé son apparence, mais je voulais utiliser le moins d'effets numériques possible. Il n'y a que deux plans en CGI dans le film. J'ai même essayé de trouver un acteur qui puisse tourner sa tête à 180°, en vain", précise-t-il. Pour instaurer un vrai climat de peur, le cinéaste mise plus sur le silence et l'attente que les jumpscares. "Le plus important, pour moi, c'est le moment de flottement, où l'on fait durer la tension. C'est comme la lente montée d'un manège à sensations fortes."
Après The Vigil, Keith Thomas s'attaquera à un nouveau projet et pas des moindres : une nouvelle adaptation de Charlie, roman de Stephen King, publié en 1980, et déjà adapté au cinéma quatre ans plus tard avec Drew Barrymore dans le rôle-titre."Lorsque Blumhouse a vu The Vigil à Toronto, ils m'ont proposé cette offre et je ne pouvais pas refuser", se réjouit-il. Le scénario est écrit par Scott Teems, qui signe la suite Halloween Kills, au cinéma en octobre 2021, et se voudra plus fidèle au livre que la première version. "Je suis impatient et c'est un film qui s'appelle Firestarter, alors attendez-vous à voir des gens brûler vifs (rires)."
Propos recueillis à Gérardmer le 1er février 2020.
Découvrez la bande-annonce de "The Vigil" :