Après cinq semaines de suspense insoutenable, la mini-série Defending Jacob diffusée sur Apple TV+ est arrivée à son terme ce vendredi 29 mai, laissant une partie des téléspectateurs circonspect face à cette conclusion que l'on pourrait qualifier d'ambiguë. Ceux qui avaient lu le roman dont c'est l'adaptation ont d'ailleurs été surpris qu'elle soit différente. Le créateur Mark Bomback et la star Chris Evans ont justifié ces décisions dans un entretien accordé au Hollywood Reporter.
ATTENTION SPOILERS !
Dans le final, la série ne répond pas de manière frontale à LA question centrale de départ : Jacob est-il coupable ou non de la mort de son camarade de classe ? C'est aux téléspectateurs de trancher. Andy et Laurie Barber ont été traversés par le doute tout au long des huit épisodes, ils sont même l'un comme l'autre complices pour avoir tenté de dissimuler son comportement suspicieux, au même titre que le père d'Andy (JK Simmons), qui a voulu le faire innocenter en demandant au pédophile local de confesser le crime qu'il n'a pas commis. Après avoir appris toutes ces informations pour le moins perturbantes, Laurie fonce droit dans un mur avec sa voiture alors que Jacob est avec elle. Un acte désespéré, qui paraît délibéré, mais dont Laurie dit ne pas se souvenir alors qu'elle et son fils sont finalement hors de danger.
A la fin du livre beaucoup plus sombre de William Landay sorti en 2002, la jeune femme que Jacob rencontre lors des vacances de la famille est retrouvée morte alors qu'elle est saine et sauve dans la série, et Jacob meurt dans l'accident de voiture, tué sur le coup. La réponse n'est donc pas non plus totalement claire, mais les indices de sa culpabilité sont plus nombreux.
"Au bout du compte, ce n'est pas cette question binaire sur sa culpabilité, "a-t-il commis le crime ou non ?" qui m'intéresse" défend le créateur. "Si nous avions donné une réponse définitive, le public aurait été un peu frustré je pense car les deux possibilités ont déjà été longuement explorées. Ce qui m'intéressait, c'était de créer une expérience très subjective pour le spectateur, qu'il ressente ce que ces parents traversent (...) pour eux, quoiqu'il arrive, un doute subsistera toujours."
Une autre différence majeure, c'est qu'ici Andy révèle à Laurie l'implication de son père, quitte à prendre le risque de tout détruire entre eux. Pour Chris Evans, cette version de la fin est plus intéressante et plus riche : "Tout le monde doit gérer la honte et la culpabilité à la fin de la série, et chacun réagit différemment (...) Pour Laurie, quand elle comprend qu'elle fait partie des mensonges, qu'elle a sa part de responsabilité, sa manière de réagir c'est d'intenter à sa propre vie face au meurtre de cet enfant. Et c'est ça que je trouve plus fort dans la série : il y a plus à comprendre et disséquer. Faut-il nettoyer la vérité pour se libérer ou peut-on compartimenter les choses et trouver un équilibre en acceptant sa part d'ombre ?"
Pour autant, l'acteur ne pense pas que Laurie a prémédité son geste : "Je pense que c'est le résultat d'un choix inconscient. Elle ne l'a pas calculé. Elle est au bout du rouleau." A-t-elle vraiment oublié ce qui s'est passé ? Pour Bomback, "une partie d'elle doit savoir qu'elle était très mal ce matin-là. Mais elle a envie de croire à la version de son mari (...) Ce qui m'intéressait c'était aussi ce retournement de situation pour Jacob : sa mère, à son tour, est-elle coupable ou non ? On laisse ces personnages dans les prisons mentales qu'ils se sont forgé et dans lesquelles ils vont devoir continuer à vivre."
Si Defending Jacob semble, selon une étude, se plaçer dans le peloton de tête des séries Apple TV+ qui ont le mieux fonctionné, une suite ne serait pas à l'ordre du jour alors qu'il a toujours été question qu'il ne s'agisse que d'une mini-série bouclée.