Après Sully, Le 15h17 pour Paris et La Mule, Clint Eastwood se penche encore sur une histoire vraie pour son nouveau film, Le Cas Richard Jewell, désormais disponible en VOD. Il y retrace les événements qui vont bouleverser la vie du susnommé. Interpellé par ces faits, le réalisateur américain a décidé de retracer à l’écran le destin tragique de cet homme : « On entend souvent parler de gens puissants qui se font accuser de choses et d’autres, mais ils ont de l’argent, ils font appel à un bon avocat et échappent aux poursuites. L’histoire de Richard Jewell m’a intéressé parce que c’était quelqu’un de normal, un monsieur tout-le-monde. Il n’a jamais été poursuivi, mais il a été largement persécuté ». Le scénariste Billy Ray s’est nourri d’un article de Vanity Fair écrit en 1997 par Marie Brenner, après qu’elle a passé du temps avec Richard, sa mère Bobi Jewell et son avocat Watson Bryant.
Un héros ordinaire
Agent de sécurité pendant les Jeux Olympiques d’été à Atlanta, Richard Jewell découvre le 27 juillet 1996 un sac à dos suspect caché derrière un banc. Il y trouve un dispositif explosif et fait immédiatement évacuer les lieux, sauvant plusieurs vies et limitant le nombre de blessés (au final, une centaine de blessés ont été recensés et deux personnes ont trouvé la mort). Dès lors, Jewell multiplie les apparitions médiatiques, affirmant auprès des journalistes qu’il n’a fait que son travail.
Chasse aux sorcières
Mais très vite, les médias et la police deviennent obsédés par le profil de Richard Jewell, lui qui a l’ambition depuis des années de devenir policier, en vain. En effet, au début des années 1990, Jewell a travaillé tour à tour comme gêolier et comme agent de sécurité et a été contraint à démissionner à chaque fois pour avoir outrepassé ses fonctions et avoir fait preuve de trop de zèle. Il s’est notamment armé d’un pistolet et a menotté un homme en état d’ivresse alors qu’il n’en n’avait pas le pouvoir. Et s’il avait monté de toutes pièces cette opération pour s’ériger en héros ?
Billy Ray se souvient : « [la presse et la police] ont regardé ce brave gars un peu excentrique qui avait trouvé la bombe et ils se sont dit : ‘C’est la théorie du terroriste solitaire !’. Ça s’est transformé en une chasse aux sorcières, un terme aujourd’hui galvaudé mais qui désigne parfaitement ce qui est arrivé à Richard. [...] De nos jours, la société tire très vite des conclusions sur les gens, fondées sur leur physique ou sur les apparences, sans chercher à voir plus loin ». Le FBI fait de lui son principal suspect après avoir rapproché son profil de celui d’un autre agent de sécurité qui avait posé une bombe dans un bus lors des Jeux olympiques d'été de 1984 à Los Angeles.
Dès lors, Richard Jewell passe de héros à ennemi public n°1 et la machine médiatique s’emballe. Son parcours est passé au peigne fin et son domicile fouillé à plusieurs reprises par les autorités. Il finit par rester cloîtré chez lui, recevant quotidiennement près d’un millier de coups de téléphone. Barbara, sa mère, décide de défendre publiquement son fils et est invitée dans plusieurs émissions télévisées. Sa campagne paie et convainc la procureure générale Janet Reno qui demande aux agents du FBI de revoir leur enquête. En octobre 1997, Richard Jewell est finalement mis hors de cause après avoir été soumis à un nouvel interrogatoire.
Blanchi par la justice
Il décide de poursuivre en justice pour diffamation les médias qui l’ont accusé d’être le coupable de l’attentat. La plupart des procès s’achèvent sur un arrangement financier. S’il a été innocenté, l’homme peine à retrouver du travail par la suite et considère sa réputation ruinée à jamais.
En 2003, l’un des dix fugitifs les plus recherchés du FBI, Eric Rudolph, est capturé. En 2005, il avoue qu’il est (notamment) responsable de l’attentat d’Atlanta et est condamné à deux peines de prison à vie. Richard Jewell, qui a retrouvé un poste de policier, assiste au procès. Il meurt deux ans plus tard d’une crise cardiaque.
Notre podcast Spotlight consacré à Clint Eastwood et à la figure du héros américain dans son cinéma, en compagnie de Nicolas Pariser, réalisateur d'"Alice et le maire" :