Vous êtes passée, sans transition, d'un premier film indépendant à un très gros film de studio...
Cathy Yan : Ca a été très vite. J'ai fait mon premier long métrage, Dead Pigs, avec lequel je suis allé à Sundance, l'an dernier, et trois mois après j'ai obtenu ce job. Bien sûr, le fait que ce soit un film d'action, et l'ampleur du projet font que c'est très différent et même si beaucoup plus de gens travaillent sur ce film, on a toujours à peu près les mêmes repères, donc j'ai pu utiliser mon expérience sur un film indépendant et la transposer facilement, et je crois que j'ai vraiment eu le feu vert de la part de DC pour faire absolument ce que je voulais.
Qu'est-ce qui vous a excité dans le projet ? L'opportunité de travailler sur des personnages DC ? Sur ces personnages en particulier ? Sur cette histoire ?
D'abord, c'était un super scénario et un super concept. J'adore le ton du film, à la fois très drôle et très dark. J'ai grandi en regardant des films de Batman, j'adore l'univers de Gotham et c'était une merveilleuse occasion de créer un nouveau Gotham, un Gotham pour les femmes. Et puis, le personnage d'Harley est incroyable. Margot a fait un travail génial en l'introduisant dans Suicide Squad, et c'était évident qu'il y avait encore beaucoup à explorer avec elle. C'est vraiment un film choral, chaque personnage a son background et son arc narratif et c'était très important que chaque comédienne soit capable de donner de la profondeur à son personnage, de le penser en trois dimensions. Il y a eu trois à quatre mois d'entraînement pour chacune et elles font presque toutes leurs cascades elles-mêmes, y compris Margot.
Comment décririez-vous Margot Robbie actrice et Margot Robbie productrice ?
Elles sont toutes les deux super ! (Rires) Elle porte les deux casquettes à merveille. Elle est une actrice très investie, toujours prête à prendre des risques, elle fait énormément de recherches et ne rechigne jamais à travailler dur. Comme productrice, elle est très présente, c'est un projet auquel elle tient vraiment, qu'elle a pitché il y a trois ans et auquel elle reste très attachée. C'est son bébé.
C'était une merveilleuse occasion de créer un nouveau Gotham, pour les femmes.
D'où vient le sous-titre du film, Birds of Prey et « la fantabuleuse histoire de Harley Quinn » ?
Je crois que c'est Christina Hodson, qui l'avait choisi comme titre temporaire dans le scénario original et finalement, on s'est dit : Pourquoi ne pas le garder ? Comme pour Birdman [ou la Surprenante Vertu de l'ignorance] ou Docteur Folamour [ou : comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer la bombe], ça colle parfaitement avec le ton du film !
Visuellement, quelles étaient vos références ?
Stanley Kubrick, en particulier Orange mécanique ; Taxi Driver… Esthétiquement, il y a un côté vintage, mais en même temps, c'est très moderne, on s'est donc volontairement inspirés de film très différents, réalisés à plusieurs décennies d'écart. L'idée, c'était que l'on se sente dans un environnement familier, mais aussi complètement plongés dans un univers parallèle. Avec le chef décorateur, K. K. Barrett, qui est un véritable génie, on a beaucoup parlé de cet aspect et de quelles technologies on voulait dans le film. Par exemple, les voitures sont essentiellement des voitures des années 1990, les téléphones portables ne sont pas trop récents... On voulait des choses familières, mais pas trop non plus. Les vêtements sont d'inspiration seventies, mais avec une vibe très contemporaine. On voulait vraiment qu'une forme d'étrangeté règne sur l'atmosphère du film.
Esthétiquement, il y a un côté vintage, mais en même temps, c'est très moderne.
Envisagez-vous ce film comme faisant partie d'une franchise ?
Non, pas du tout. Je le vois juste comme un film, au même titre qu'un film indépendant. Je ne pense pas à une franchise, ou à une suite. D'ailleurs, ce n'est pas une suite de Suicide Squad et c'est un film qui fonctionne très bien tout seul.
Quels écueils des films de super-héros avez-vous voulu éviter ?
Tous, pour être honnête. Le scénario, déjà, était unique. J'espère que ça se verra dans le produit fini, mais on a vraiment essayé de faire quelque chose de très différent de tout ce que l'on a pu voir jusqu'à présent.
Diriez-vous qu'il s'agit d'un film féministe et pensez-vous qu'il ouvre la voie à d'autres réalisatrices ?
Plutôt deux fois qu'une ! C'est totalement un film féministe ! Bien sûr, j'espère que je ne serai pas la dernière à avoir l'opportunité de réaliser un tel film. Il n'y a aucune raison que les femmes n'en soient pas capables et il n'y a pas non plus de raison qu'elles soient reléguées simplement aux films féministes, d'ailleurs ! J'adorerais qu'une femme réalise Batman ou James Bond. Tout le monde indépendamment de son sexe devrait pouvoir se mettre autour de la table et participer à n'importe quel film.
Propos recueillis à Los Angeles le 21 mars 2019.
La bande-annonce de Birds of Prey, en salle le 5 février :