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    Oscars 2019 : quand Spike Lee plonge dans le passé d'esclaves de ses ancêtres
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    En recevant son Oscar du meilleur scénario adapté pour son "BlacKkKlansman", Spike Lee s'est aussi fendu d'un discours émouvant revenant sur ses racines de descendant d'esclave, qu'il a notamment pu explorer en profondeur dans une émission en 2010.

    STARMAX / BESTIMAGE

    Ce dimanche 24 février, Spike Lee a donc enfin été récompensé aux Oscars, pour la première fois de sa carrière, dix-neuf ans après sa nomination pour le script de Do The Right Thing. Salué par un Oscar d'honneur en 2016, le cinéaste a littéralement bondi de joie (et dans les bras de son ami Samuel L. Jackson) sur la scène du Dolby Theatre en recevant l'Oscar du meilleur scénario adapté pour son BlacKkKlansman, avant de se lancer dans un discours puissant face à une standing ovation de la salle.

    "Je veux remercier Tonya, Jackson, Satchel. Le mot qui me vient est aujourd'hui est ironie. Le jour, le 24. Le mois, février qui est également le mois le plus court de l'année. Et aussi le mois de l'histoire noire. L'année 2019. L'année 1619. L'Histoire, son histoire. 1619, 2019. Il y a 400 ans, nos ancêtres ont été volés de notre Mère Afrique et emmenés à Jamestown en Virginie, en esclavage. Nos ancêtres ont travaillé la terre des premières heures du matin aux dernières heures de la nuit [...] Devant le monde, ce soir, je salue nos ancêtres qui ont construit notre pays jusqu'à aujourd’hui, qui ont vécu le génocide de son peuple autochtone. Nous nous connectons tous avec des ancêtres, nous aurons l’amour, la sagesse et retrouverons notre humanité. Ce sera un grand moment. L'élection présidentielle 2020 est toute proche. Mobilisons-nous soyons tous du bon côté de l'Histoire, choisissons l'amour au lieu de la haine, let’s do the right thing / faisons la chose juste" a déclaré le cinéaste.

    En vidéo, ce moment fort...

    Un sujet éminemment politique et culturel pour le cinéaste

    Chez Spike Lee, la question de l'esclavage et plus largement la question Noire, sujet éminemment politique et culturel, est si profondément ancrée en lui qu’il a même baptisé sa société de production 40 Acres And a Mule. Soit la promesse d'indemnisation faite aux esclaves afro-américains libérés après la Guerre de Sécession : 40 acres (16 hectares) de terre à cultiver, et une mule pour traîner une charrue…

    En 2010, Spikee Lee fut invité dans l'émission Who do You Think you are, qui propose aux vedettes de découvrir les origines de leurs ancêtres. Dans ses lointains souvenirs, Spike Lee avait entendu parler d'un oncle "un peu fou", prénommé Mars, par sa grand-mère décédée à l'âge de 100 ans en 2006. Grâce à l'émission, il a découvert que son arrière arrière grand-mère, du nom de Lucinda Jackson, décédée en 1934, fut mariée à un certain Mars Jackson.

    En fait, le véritable nom de famille était Woodall et non pas Jackson. La raison ? Les archives datées de 1860 et consultées par Spike Lee lui ont révélé que Woodall était le nom d'un certain James Woodall, qui était un propriétaire d'esclaves dans l'Etat de Géorgie. Après la Guerre de Sécession, Mars Jackson, affranchi, posséda quelques terres agricoles, qu'il fit fructifier habilement. "Cette argile rouge dans mes mains est la même que celle que Mars a travaillé après la guerre civile avec sa famille" s'exclamait Lee dans l'émission, logiquement ému. "Il a mis la barre si haut pour passer d'esclave à propriétaire terrien ! Désormais, je sais d'où vient cet esprit entrepreneurial au sein de la famille !" Spike Lee a continué à remonter la piste du côté de Lucinda jusqu'au père de celle-ci, un homme prénommé Wilson. Un esclave qui travailla dans une manufacture de pistolets pour les Confédérés. Une ironie qui n'a pas échappé à Spike Lee : un ancêtre forcé à assembler des revolvers destinés à tuer ceux qui venaient affranchir les esclaves...

    La Rédac' débriefe le palmarès des Oscars / César 2019

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