Ils ont rendu possible le projet fou de "La Vie pure", qui au moment de notre entretien en 2014, n'avait pas encore de distributeur. Retour sur notre rencontre à l'époque avec les jusqu'aux boutistes Jérémy Banster et Stany Coppet, réalisateur et acteur du film, rediffusé à 20h50 ce soir sur France Ô.
Allociné : "Attention aux histoires que vous racontez à vos enfants avant de les endormir", nous aviez-vous conseillé juste avant la projection de votre film. Quelles sont celles que l'on vous a racontées à vous, lorsque vous étiez petit ?
Stany Coppet, acteur et coproducteur : Mes parents me racontaient que tout était possible, qu'il ne fallait pas prendre un "non" pour une décision finale, qu'on se devait de rêver et d'aller jusqu'au bout. C'est notamment la grande leçon que mon père m'a apprise : "Quand tu commences quelque chose, tu vas jusqu'au bout." C'est ce que j'ai fait jusqu'ici.
J'ai toujours aimé plus que tout raconter des histoires...
Jérémy Banster, réalisateur, coproducteur et acteur : C'est moi qui racontais des histoires, enfant. Il n'y a pas très longtemps, mes cousines m'ont rappelé qu'à 7-8 ans -j'étais déjà fou de cinéma à cette époque,- j'aimais le soir raconter aux autres des histoires nées d'un mélange entre des deux ou trois films que j'avais vus dans la semaine et de ce que j'avais vu par ailleurs. C'est ce que j'ai toujours aimé faire plus que tout.
En voyant La Vie Pure, on ne peut s'empêcher de faire un parallèle entre la folie de votre projet et celle du héros que vous mettez en scène. Dans quelle mesure vous sentez-vous proche de ce dernier ?
Stany Coppet : Le personnage nous parlait à tous les deux. On s'est rencontrés sur un court métrage que Jérémie tournait en Guyane, dans lequel j'avais un rôle. Une belle et étonnante rencontre. C'est mon père qui nous a raconté cette histoire vraie, en voyant naître entre nous une réelle amitié. Il ne pensait pas qu'on se l'approprierait ainsi, cela dit. On a commencé à écrire très vite, on a cherché les financements, ça a été le parcours du combattant mais on a tenu bon. On est tous les deux des aventuriers dans l'âme. On est tous les deux acteurs et faisons ce métier en se donnant à 100%. On s'est identifiés tous les deux à Raymond. On s'appellait entre nous "Maufrais", du nom de notre héros, parce qu'en créole, cela signifie "mon frère"...
spoiler: Il fallait cette folie douce pour faire le film, une folie mesurée, responsabilisée mais une folie quand même...
Jérémy Banster : Il était devant la caméra et moi derrière mais notre travail a été le même : tendre vers l'impossible, le toucher du doigt. Il fallait qu'on soit animés par la même détermination que le personnage, Stany dans son implication physique et sa performance, et moi dans ce navire à mener à bon port. Il nous fallait cette folie douce. Une folie mesurée, responsabilisée mais une folie quand même. Le plus beau dans la vie est de réussir des défis qui paraissent impossibles. L'histoire de l'Humanité est faite de ces challenges-là.
Ce film n'est pas un film comme les autres, ce n'est pas un "film de plus"...
On est si heureux de ce film qui n'est pas un film comme les autres et pas un film de plus. Aujourd'hui faire un film c'est très compliqué, notamment lorsqu'on est jeune acteur et jeune réalisateur. C'est un film organique, qui prend aux tripes, auquel on s'identifie. Quand en plus on dit qu'on va le faire en Amazonie dans un endroit où jamais personne n'a posé une caméra et qu'il faut transporter le matériel en pirogue, ça fait réfléchir. On a dû à la force du poignet convaincre et on continue pour que le film, universel, soit vu sur le plus d'écrans possibles, le plus loin possible...
Le tournage a été extrêmement difficile on l'imagine. Qu'est-ce qui, au-delà de tout, a été le plus dur pour vous ?
JB : Il y a eu des journées hybrides, mélange de grands moments de bonheur de faire ce film, de raconter cette histoire à l'endroit où on voulait. ; et de difficultés au quotidien car l'Amazonie concrètement, c'est la pluie, le fleuve, la boue, les difficultés logistiques, les antipaludiques, le fait d'être constamment sous Malarone, les insectes et autres choses qui vous empoisonnent la vie.
Le combat consistant à distribuer le film a été plus difficile encore que celui qu'on a mené sur le tournage...
SC : C'était difficile mais je n'ai retenu que le plaisir car je me suis trouvé dans la création, la sueur, la détermination, les heures interminables, les moustiques. Tout cela a nourri mon personnage. Ce que je trouve difficile par contre, c'est de surmonter tous ces obstacles et d'arriver à faire ce film, de le monter et de le montrer et de continuer à avoir le même genre de difficultés qu'au départ, avant que le film ne soit prêt. On a eu des aides, on a été soutenus, on a produit nous-mêmes, mais ça a été encore le parcours du combattant. Un combat moins concret avec des déceptions et défections.
Parlez-vous de votre histoire d'amour avec La Guyane ?
JB : Stany est né là-bas et moi j'en suis tombé amoureux, notamment de son fleuve, de sa forêt. C'est un département et une terre qui nous parlent (même si Stany n'aime pas vraiment l'eau !). J'y ai découvert une diversité culturelle incroyable, des peuples qui pour communiquer sur le fleuve se sont même inventés une langue, le taki-taki. Et on est en France, même sur le continent sud-américain. Ce n'est pas une île comme La Réunion ou La Martinique. C'est un continent qui mêle la France mais aussi les autres pays d'Amérique du Sud et même l'Afrique et qui est très très différent de son littoral, à sa forêt ou à son fleuve.
Le cinéma, le vrai, parle de destins hors normes...
Pour moi le cinéma, le vrai, parle de grandes histoires dans de grands espaces, de destins hors normes, de grands hommes et de grandes femmes. J'aimerais préciser d'ailleurs qu' il y a eu un vrai challenge pour les personnages féminins de La Vie Pure, car ils sont importants mais peu présents.... Ce n'était d'ailleurs pas facile je pense pour les actrices que sont Elli Medeiros, Barbara Cabrita, Marie-Gaëlle Cals (ma femme à la ville comme à l'écran) qui ont mis avec générosité leur pierre à l'édifice en cernant l'importance du film plus que celle du rôle.
Je suis, pour conclure, plus attiré par le monde et la découverte de cultures. Le cinéma est pour moi une petite lucarne qui donne à voir. Mon prochain projet en tant que réalisateur ne se fera pas en région parisienne par exemple...
Nous avons récemment rencontré l'acteur phare de la série "Un Si Grand Soleil":