Pour la comédie Mon Ket, son premier long métrage en tant que réalisateur, François Damiens a opté pour un dispositif particulier mais qu'il connaît bien : tourner le film sous forme de sketchs en caméra cachée. Un principe favorisant l'authenticité des situations, et accentuant leur aspect comique, comme le comédien belge l'explique : "Ça donne souvent de très grands moments, partant du principe que l’on ne peut pas être plus juste, plus réel que ce qu’on est dans la vie… Je trouvais intéressant de pousser l’exercice à un récit de long métrage."
1. UNE GRANDE MAJORITÉ DE GENS PIÉGÉS
Il y a trois types d'acteurs dans Mon Ket : les comédiens professionnels, les amateurs et les gens piégés par les caméras qui n'ont jamais joué de leur vie. La première catégorie est composée de Damiens et Tatiana Rojo (qui incarne sa femme), la seconde de Mattéo Salomone (le fils), Christian Brahy (le parrain) et Nancy Sluse (la deuxième femme) et pour finir la troisième, la plus nombreuse, qui englobe tous les autres. En ce qui concerne Rojot, Salomone, Brahy et Sluse, le réalisateur leur a donné quelques vagues indications sur ce qui allait se passer pendant le tournage de leurs scènes. Mais tous les anonymes ne savaient rien.
"Cela représente tout de même environ 25 personnes qui n’étaient au courant de rien, filmées à leur insu et dont il a fallu gérer les réactions, évidemment totalement improvisées ! Rien n’était classique dans ce projet : le scénario ne faisait pas plus d’une trentaine de pages et les dialogues étaient juste au stade de quelques idées jetées sur le papier avec Benoît Mariage… Je n’ai jamais emmené ce scénario avec moi sur le tournage car j’avais exactement en tête depuis trois ans ce que je voulais faire. Je voulais garder de la fraîcheur…", raconte le cinéaste.
Damiens et son équipe ont rencontré 600 personnes et tourné pas loin de 650 heures pour ne garder que quinze personnes au final.
2. CHANGEMENT DE LOOK POUR PASSER INCOGNITO
L'une des contraintes les plus évidentes liées au dispositif voulu par Damiens provient de la notoriété propre à ce dernier. Ainsi, pour éviter de se faire reconnaître lors du tournage et parvenir à piéger les gens, le metteur en scène se faisait maquiller durant quatre heures et ce chaque jour : prothèses dentaires, décolleurs d’oreilles, faux ventre, fausses cuisses, etc. Un rituel nécessaire mais très contraignant qui, en plus, n'était pas idéal pour la peau, dans la mesure où les solvants utilisés étaient en contact avec les yeux et la bouche. Damiens ajoute :
"C’est en effet le gros écueil de la caméra cachée : quand vous êtes reconnu, vous devez jeter la prise à la poubelle et quand vous pensez avoir été reconnu, ça fausse le jeu et ça plombe la scène… C’est comme raconter une blague à quelqu’un en se demandant s’il ne connaît pas déjà la chute ! Et puis autre élément important : dans les caméras cachées, si je jouais un guichetier de péage refusant d’ouvrir la barrière ou piquant une carte bleue, c’est moi qui menait la situation. Là, j’étais en quelque sorte le client, soumis à la réaction des piégés qui pouvaient ou pas jouer le jeu. Je dirais que 8 fois sur 10 ça a bien fonctionné pour Mon Ket…"
3. UN DISPOSITIF TECHNIQUE LOURD À INSTALLER
La présence de caméras cachées n'a pas pour autant facilité les choses pendant un tournage qui a, au final, nécessité un dispositif particulièrement lourd à mettre en oeuvre. Damiens a ainsi dû gérer une équipe pouvant dépasser les quarante personnes et composer avec une logistique très pesante : l’installation des caméras (il y en avait sept pour chaque scène) et des micros bien sûr, mais aussi le fait que les personnes piégées ne devaient pas se croiser quand l'équipe de tournage était contrainte de refaire une séquence qui n’avait pas fonctionné... Le metteur en scène développe :
"Il faut donc faire de vrais et longs repérages, discuter avec les responsables des lieux, (comme ceux de l’hôpital par exemple) qui, au premier rendez-vous, sont très sympathiques mais qui changent vite d’humeur en se rendant compte du dispositif à installer ! Au final, j’ai pu compter sur une équipe formidable et compréhensive, composée de mes collaborateurs habituels, avec qui je travaille en caméra cachée depuis une dizaine d’années, et des techniciens de cinéma. Il a parfois fallu arrondir les angles mais après quelques soirées, tout le monde a fini par se parler et bien se connaître !"
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