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    Mandy : "Nicolas Cage est un pur artiste" selon le réalisateur Panos Cosmatos

    Notre interview du réalisateur de "Mandy", Panos Cosmatos, qui offre à Nicolas Cage un rôle incroyable qui a secoué la Quinzaine des réalisateurs du dernier Festival de Cannes.

    Koch Media GmbH

    Le réalisateur Panos Cosmatos revient sur le tournage de Mandy, un film d'horreur esthétique qui offre un rôle dément à Nicolas Cage, loin des Direct-To-DVD sans saveur de ces dernières années. Mandy sort aujourdh'ui en salles en Belgique au Cinema Palace et au Cinema Aventure de Bruxelles, le SPHINX Cinema de Ghent et le Cinema ZED Louvain en Flandres.

    AlloCiné : Sur scène lors de la présentation du film, vous avez dit que vous gériez la mort de vos parents en préparant ce film. En quoi pensez-vous que cela a influencé votre travail sur "Mandy" ?

    Panos Cosmatos : [Mon premier film intitulé] Beyond the Black Rainbow et Mandy sont des films compagnons. Je les ai écrits au même moment. Ma mère était décédée depuis dix ans puis mon père est mort soudainement et j'ai réalisé que je n'avais jamais fait le deuil de la mort de ma mère. J'ai donc suivi une thérapie pour exprimer ces sentiments et pendant cette thérapie j'ai écrit ces deux films. Je crois que Black Rainbow parle du contrôle et Mandy de quelqu'un qui tient à ses proches (...).

    Pourquoi huit ans se sont-ils écoulés entre les deux films ?

    Après Black Rainbow, j'ai rapidement voulu retourner un long métrage. J'ai eu des problèmes avec la boisson dès le décès de ma mère, je suis à jeun désormais, mais je me disais "je dois faire un film avant de mourir". J'ai donc mis tout mon cœur à cela. Et les huit ans entre les deux films sont liés au fait que j'ai dû patienter pour pouvoir faire le film que je voulais. [Mes producteurs] UMedia et XYZ sont patiemment restés à mes côtés le temps que j'arrive à avoir la bonne situation permettant de concrétiser le projet.

    Je n'ai pas vu votre précédent film qui possède apparemment le même style, ce qui fait que j'ai été surpris -dans le bon sens du terme- par l'esthétique de "Mandy".

    Pour ces deux films, je voulais un grain spécifique, qui rappelle les films du passé. Chaque plan devait être spécial.

    GTRES / BESTIMAGE

    Vous n'utilisez pas la caméra à l'épaule, sans dire que cela fait partie de votre style...

    (il interrompt) Ça fait complètement partie de mon style. Je n'aime pas la caméra à l'épaule, tout est fixe. Je sens que la caméra statique et le travail sur les angles donne un rendu plus cinématographique.

    Comment s'est passée votre rencontre avec Nicolas Cage ?

    Je l'ai contacté car je voulais qu'il joue le méchant, Jeremiah Sands. Quand nous nous sommes rencontrés, il m'a fait comprendre qu'il préférait jouer le héros, j'ignore pourquoi. J'étais très déçu, même si l'entretien s'est bien passé. Et quelques mois plus tard, je me suis réveillé en me disant que nous devions être fous pour ne pas vouloir qu'il joue [le personnage principal] Red Miller. (...)

    On ne l'a pas tant vu que ça en méchant.

    Je trouvais aussi. (...) Nous étions sur la même longueur d'ondes et je trouve que c'est un pur artiste. Lorsqu'il trouve un film dans lequel il peut donner tout ce qu'il a, ça peut donner un résultat magique !

    On ne spoile rien dans cet entretien, je vais juste vous demander de raconter si et comment Cage s'est préparé à une scène comme celle de la salle de bain ?

    Cette scène m'a été inspirée par mes amis. Je vois cette scène comme celle d'un théâtre miniature de l'absurde en un acte. (...) J'ai eu l'idée de cet homme cherchant à noyer sa peine de façon très animale, humoristique et folle. (...) Je pense qu'il n'y a rien de plus drôle qu'un homme en colère.

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    Comment s'y est-il préparé ?... S'il s'y est préparé !

    Nicolas Cage a un endroit qu'il peut atteindre dans son esprit pour atteindre ce niveau-là. (...) Je dois reconnaître que j'ai pensé à la scène de Leaving Las Vegas dans laquelle Cage prend une douche et que j'ai voulu donner ma version de cette scène, avec un peu plus de folie.

    Merci d'avoir permis à Nicolas Cage de se battre avec une tronçonneuse et une hache.

    Je vous en prie (rires).

    S'est-il entraîné à leur maniement ?

    Oui ! Avec l'excellent chorégraphe néo-zélandais Ben Cooke, qui a travaillé sur Thor: Ragnarok. Nous n'avions pas beaucoup de temps d'entraînement, surtout que Cage s'est brisé la jambe sur un autre film, ce qui a repoussé notre date de tournage. Dès son arrivée, il s'est mis à s'entraîner avec Cooke.

    Vous avez été meneur de jeu de rôles, est-ce que cela a influé sur votre écriture ?

    Inconsciemment, je pense, oui. La structure d'une aventure "Dungeon Crawl" [dans laquelle les personnages explorent un endroit fermé, NdlR] donne une certaine liberté car le meneur de jeu peut injecter ce qu'il veut dans un lieu prédéterminé. (...) J'ai été très marqué par Donjons et Dragons car c'est totalement et immédiatement entré en correspondance avec mon imagination enfantine ; un monde mythique pouvait exister, avec ses artefacts (...). Et dans le film, Nicolas Cage forge ses propres artefacts.

    Je crois que c'est la dernière scène que vous avez filmé, d'ailleurs.

    C'était la dernière scène de Cage, j'ai continué ensuite.

    La musique est très importante dans la structure du film, et vous avez été l'un des derniers metteurs en scène à travailler avec feu le compositeur Jóhann Jóhannsson.

    Je suis dévasté car j'avais une connexion créative très forte avec lui, j'espérais travailler avec lui pour le restant de mes jours. Il avait vraiment ressenti l'histoire de Mandy de façon très personnelle. (...) Je trouve qu'il a composé une bande originale très diversifiée (...) aux influences diverses. Je lui parlais de façon abstraite de sentiments, d'odeurs des endroits où se passent le film...

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    Souhaitez-vous rester dans ce qu'on appelle par raccourci le "cinéma de genre" ou souhaitez-vous travailler pour les studios ?

    Je ne me vois pas passer d'un genre à l'autre avec un film pour chaque genre. J'aime les mélanger. Je ne pense pas qu'il faille des restrictions entre les genres. (...) Donc plutôt cinéma de genre, avec plein de genres différents dans le même film (rires) !

    Vous n'avez pas encore été contacté pour des blockbusters ? Hollywood pioche souvent ses réalisateurs de grosses productions dans le cinéma d'horreur ou le cinéma de genre ces temps-ci.

    On m'a contacté pour plusieurs remakes, des choses comme ça. Je pense que ça dépend de plusieurs facteurs, notamment la liberté de faire le film que je veux. Je préférerais faire des films sous la barre des millions des blockbusters où je pourrais m'exprimer personnellement. Je ne veux pas dire "jamais" mais je ne sais pas.

    Le travail sur la performance capture ne vous intéresserait pas ?

    Ce qui est intéressant avec la performance capture c'est ce que fait mon ami Neill Blomkamp avec Unity engine [notamment le film Adam, NdlR], c'est-à-dire créer un monde. Il ressemble beaucoup à une cinématique de jeu vidéo, mais c'est intéressant. Je pense que c'est une partie de l'avenir du cinéma.

    Mandy en images, actuellement en salles en Belgique :

     

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