AlloCiné : Vous venez de la musique expérimentale et vous avez déjà composé plusieurs bandes originales, comme celle de The Bling Ring, de Sofia Coppola. Qu'est-ce qui vous a amené composer pour le cinéma ? Qu'est-ce qui vous plait dans cette discipline en particulier et comment avez vous travaillé avec les frères Safdie ?
Daniel Lopatin (Oneohtrix Point Never) : J'aime l'émulation que provoque la collaboration. J'adore m'enrichir de ce qui inspire un autre artiste pour faire en sorte que ma musique l'incarne. J'ai aussi un truc avec les réalisateurs en général… Souvent, ils sont drôles et intelligents et ils savent ce qu'ils veulent, même s'ils n'ont pas le vocabulaire musical, ils le savent. J'aime être entouré de leur énergie. C'est le cas des bons réalisateurs, en tout cas. Avec les frères Safdie, on se voit beaucoup ! On est devenus proches pendant le processus de création autour du film, on travaillait souvent ensemble dans mon studio. Josh était très impliqué, à chaque instant, parlant du rythme et de la cadence d'une manière étrange. On a inventé une manière de parler de la musique, si vous aviez été une petite souris, on vous aurait semblé complètement fous, mais pour nous, c'était très naturel et assez cocasse.
Pouvez-vous nous parlez de Heat, de Michael Mann, et de la manière dont la BO a inspiré celle de Good Time ? Quelles autres influences avez-vous injectées dans le score ?
Je me suis beaucoup intéressé à deux bandes originales et les deux utilisaient énormément la guitare. La première était celle de Heat, composée par Elliot Goldenthal. La seconde était le score composé par Howard Shore pour Crash de Conenberg. Ils utilisent les guitares de manière complètement différente. L'idée d'Eliott pour Heat était de créer une sorte d'ambiance orchestrale rien qu'avec les guitares. Le score d'Howard Shore ressemble davantage à l'application idiosyncrasique d'un ensemble de musique de chambre, mais il traitait les instruments avec beaucoup de profondeur. Les deux mettent tout en œuvre pour créer un paysage métallique. Des cordes pincées et distordues, c'était vraiment ce que je cherchais. Pour raconter l'histoire des conflits intérieurs et des déchirures de Connie, et pour recréer la toile de fond de l'infrastructure de la ville de New York, j'ai senti qu'il était nécessaire de rester dans la lignée de ce que je pensais être déjà au service de ces éléments.
Iggy Pop a-t-il accepté tout de suite de travailler avec vous sur le titre « The Pure and the Damned » ? Comment s'est passée la collaboration ?
Je lui ai envoyé une démo du morceau, avec une voix éraillée que j'avais fabriquée à partir d'un sample d'un chanteur de gorge touvain [de la région de Touva en Russie, ndr], car j'essayais de retranscrire sa voix de baryton. Ca lui a plu, donc nous avons organisé une session en visio – Iggy était à Miami et nous étions à New York. En deux prises, c'était plié. Et la majeure partie était totalement improvisée. Du pur génie.
Les frères Safdie nous parlent du générique de fin de Good Time avec Iggy Pop, "The Pure and the Damned" :