AlloCiné : Nos années folles parle d'une histoire incroyable mais vraie et méconnue de la Première Guerre Mondiale. Pouvez-vous nous présenter cette histoire en quelques mots ?
Pierre Deladonchamps (Paul / Suzanne) : Ca se passe pendant la première guerre mondiale. Paul Grappe que j'interprète est parti au front. Il n'a pas du tout envie d'y aller. A juste titre d'ailleurs car il vit l'horreur. A tel point qu'il s'auto-mutile pour être déclaré inapte à pouvoir user d'une arme. Sa femme qui travaille dans une usine de confection de vêtements l'aide à s'échapper de l'hopital car il est passible de la peine de mort, et à se déguiser en femme pour passer inaperçu parce qu'il devient déserteur. De là part l'odyssée de Paul / Suzanne et Louise.
Nos années folles est aussi une grande histoire d'amour...
Pierre Deladonchamps : Oui, parce que je pense que Paul et Louise ont beaucoup fait de choses dans leur vie par amour. Par amour l'un pour l'autre, mais aussi par amour pour lui-même ou pour le personnage de Suzanne qu'il est devenu par la suite. Mais en tout cas, ils s'aiment tellement que parfois j'ai eu l'impression qu'ils avaient une puissance décuplée, et qui lui se sentait en confiance que quand sa femme n'était pas loin, et que Louise acceptait tout ça de Paul, qu'il l'aimait et qu'il continuait à lui dire et lui faire ressentir.
spoiler: Parfois maladroitement, avec distance, parce que l'alcool qu'il a fini par prendre avec excès l'a éloigné de tout ça, l'a rendu un peu fou. Mais je crois qu'ils se sont aimés jusqu'à leur mort.
Comment avez-vous abordé la question du travestissement ?
Pierre Deladonchamps : C'est passé comme une lettre à la Poste ! Avec des doutes au début, mais une très grosse envie de prendre les habits d'une femme. J'assume de dire que c'est exaltant. C'est pour ça que tout le monde, dans les soirées, aime bien se déguiser, se travestir, en homme, en femme. Il y avait ce côté jubilatoire, ce côté jeu. Et en même temps, essayer de ne pas aller trop loin dans ce côté jeu, car c'est la vraie vie, c'est sérieux. Il fallait être crédible, il ne fallait pas se faire repérer.
Il y avait ce côté jubilatoire, ce côté jeu !
En terme de préparation, elle s'est faite avec André Téchiné, la maquilleuse, la coiffeuse… On a cherché les couleurs, les longueurs, les textures de cheveux, le maquillage, les yeux, la bouche… Expérimenter sur mon visage et mon corps des trucs en terme de maquillage, de tenues, de faux seins, de hanches… La seule chose qui ne me plaisait pas du tout, c'était de m'épiler tout le corps.
Est-ce que vous avez été surpris par l'affiche du film ?
Pierre Deladonchamps : C'était une exquise surprise ! On a tous les deux très vite aimé. Céline a été surprise que l'on voit autant son anatomie de dos. Mais ça va !
Céline Sallette : Ce n'est pas vraiment mon anatomie, c'est tout à fait retouché ! Ce n'est pas très retouché, mais c'est toujours un peu arrangé ! (sourire)
Pierre Deladonchamps : Toute l'image de manière générale est prise d'une scène qui a réellement existé dans le film. C'est une affiche sublime, elle me plait beaucoup. Elle représente bien le film.
Que représente le cinéma d'André Téchiné pour vous ? Peut être même que ses films ont compté dans votre cinéphilie ou votre vocation ?
Pierre Deladonchamps : J'aime voir des films mais je ne sais pas si je peux dire de moi que je suis un cinéphile. Je ne suis pas un cinévore, je ne vois pas tout. Je n'ia pas la culture de tous les films français ou du monde.
Mais ce que je savais d'André, c'est que c'était un grand metteur en scène. De ce que j'ai vu dans ses films, c'est que les acteurs sont toujours dirigés d'une manière assez particulière, qu'on a ressenti, nous, pendant le tournage. Sa façon de nous diriger était un peu « à la serpe » : il débroussaille beaucoup, il garde l'essence. Une fois qu'il a l'essence, on repart de zéro et on garde ça pour aller dans notre terrain de jeu avec notre liberté. C'est très impressionnant.
Rencontrer André Téchiné a profondément changé ma manière d'être, de jouer, de travailler
Céline Sallette : Je ne me suis jamais projetée dans le métier avec des films de cinéma parce que j'ai vraiment commencé par le théâtre. Mon expérience du métier d'actrice a vraiment été une expérience intérieure, donc je ne peux pas tellement dire qu'André ou un autre cinéaste ait compté dans le fait qu'il soit advenu que je fasse du cinéma.
En revanche, je sais que le rencontrer a profondément changé ma manière d'être, de jouer, de travailler, parce qu'il a une exigence et un œil dingue, qu'il est dans un rapport à la vérité qui est assez saisissant. Par ailleurs, sa bienveillance, sa joie, sa jubilation de faire du cinéma, son amour du cinéma ont fait qu'on a vécu de grandes choses sur ce tournage. C'était très intense.
La bande-annonce de Nos années folles :