AlloCiné : Comment as-tu commencé à être comédien ?
Pablo Pauly : J’ai fait un parcours assez classique finalement. J’ai fait la classe libre au Cours Florent. J’ai fait le Conservatoire de Paris pendant un an, et je suis parti faire le Conservatoire de Londres. Ca m’intéressait plus car on travaille plus sur le corps. J’ai besoin de ça pour être l’acteur que j’aimerais être.
Et petit à petit, des tournages à droite à gauche, des petits rôles. Et à chaque fois, je le prends comme si c’était un rôle à Oscar. Tu donnes tout ce que tu as dans n’importe quel rôle et au fur à mesure, tu construis, tu construis, jusqu’à Patients.
Qu’est ce que ça fait de se voir à l’écran, petit ou grand, pour la première fois ?
C’était Les Lascars sur Canal+. Je suis un peu omniprésent dans la série, donc de te voir autant, c’est un peu spécial, même très spécial. Tu te dis : « là, c’est pas bien ; là, ça sonne faux pour moi... » Tu ne vois que les défauts. Et après, tu entends les gens rire, c’est toi à l’écran qui les fait rire, tu es hyper heureux.
Premier souvenir marquant de spectateur ?
Le plus vieux souvenir que j’ai d’un film qui m’ait vraiment choqué, c’était Ken Park de Larry Clark. Mon père me l’a emmené voir quand j’avais 13 ans, c’était un peu tôt, mais mon père voulait nous sensibiliser sur la sexualité des adolescents. Ce qui était une très bonne idée, mais c’était un peu choquant. Mais sinon, mon plus vieux souvenir de cinéma, je crois que c’est Zorro. J’ai dû regarder 3000 fois quand j’étais petit. Je regardais aussi Les Chevaliers de la table ronde. Je trouvais ça exceptionnel.
J’ai toujours aimé le cinéma depuis que je suis tout petit. Je n’ai pas voulu être acteur quand j’étais petit, mais le hasard a fait que je me suis retrouvé acteur au final assez naturellement parce que je faisais le con en classe. On m’interdisait de le faire ; là on m’autorise, on m’encourage à le faire ! En fait c’est totalement logique que je sois acteur, mais ce n’était pas prévu du tout.
Quand tu t’étais tourné vers une école d’acteur, c'était parce que quelqu’un qui t’y avait incité, te l’avait conseillé?
C’est quelqu’un effectivement qui m’a dit « t’es rigolo, va faire du théâtre ». J’ai un peu refusé au début : j’ai jamais lu un bouquin de ma vie, ça m’ennuie plus qu’autre chose. Et j’arrive au Cours Florent à 16 ans. J’ai arrêté l’école, je suis un peu perdu. Je mens, comme quoi j’ai 18 ans, pour pouvoir faire les cours avec les grands et non pas les ateliers jeunesse.
Mon professeur était Serge Brincat, il me dit « tu vas venir sur scène et jouer le texte de quelqu’un qui a écrit et tu vas faire rêver les gens, tu vas les faire rire, pleurer, les faire réfléchir, les élever peut être ». Je me dis que c’est exceptionnel. On nous demande de choisir un texte. J’en choisis un de Pierre Desproges, un sketch sur la mode. Je le fais et les gens sont morts de rire. Je réalise que j’ai pris un plaisir monstrueux à travailler et à jouer le texte devant eux, et eux rient et réfléchissent au sujet. Je me dis que c’est fabuleux comme métier. Faut que je fasse ça de ma vie !
J’ai essayé de rattraper le retard que j’avais, à lire, à lire, à lire, jour et nuit. Des pièces, des romans, des grands classiques… Découvrir des auteurs que je ne connaissais pas. Et je suis rentré là dedans. Ca me rend vivant de jouer, j’adore ça.
Y a-t-il des comédiens qui t’ont inspiré particulièrement, plutôt d’autres générations ?
Michel Simon énormément. Pour moi, c’est le meilleur acteur de tous les temps. Plus contemporain, j’admire beaucoup Vincent Cassel, les choix qu’il fait, la liberté qu’il a en tant qu’artiste. Il a une rigueur de choix et de rôles, et ça, ça m’inspire beaucoup. Ce n’est pas facile à obtenir une carrière comme ça, c’est un peu un fil conducteur dans ma carrière que j’aimerais construire.
Daniel Day Lewis, Jack Nicholson, et l’acteur ultime, c’est Brando... Il a la sensibilité qu’un enfant peut avoir, et un côté homme que n’importe quel James Bond n’a jamais eu. Chez les femmes, Gena Rowlands. Elle met une espèce d’intensité dans ses rôles.
Dans ta génération, as-tu des amis comédiens ?
Oui, bien sûr, j’ai baigné là-dedans depuis que j’ai 16 ans. Là, en ce moment, c’est beaucoup les gens de Patients, je suis très fier d’être à leurs côtés.
J’aime beaucoup Pierre Niney, je trouve qu’il a ouvert la voie à notre nouvelle génération. Je le remercie pour ça car il était un peu temps. C’est un peu le chef d’équipe de notre nouvelle génération. Il le fait admirablement bien.
Est-ce qu’une musique peut t’inspirer dans ton travail ?
Ah oui ! Mon plus grand regret dans la vie, c’est de ne pas être musicien. Je suis un grand mélomane mais je ne sais pas faire ! Pour moi, la musique est l’art le plus puissant. La même musique peut te donner plusieurs types d’émotions. J’ai besoin de musique, tout le temps.
Sur le plateau (de Patients), on avait beaucoup de musique, on échangeait beaucoup sur ça. La musique est omniprésente dans ma vie, donc elle a besoin de l’être dans mes rôles forcément. Ca va de la musique classique, au jazz, au hip hop. Ca passe par beaucoup de choses. En ce moment, je réécoute Erika Badu énormément, et beaucoup de soul.
Quel est le meilleur conseil qu’on t’ait donné ?
De croire en tes rêves, de croire en qui tu es, de ce que tu as envie de devenir. De ne pas se mentir, de ne pas changer pour devenir quelqu’un qu’on n’aime pas. J’ai l’intime conviction que si tu visualises ton rêve, que tu y penses, que chaque souffle que tu prends est pour accomplir ce rêve, je suis persuadé qu’on peut y arriver. Croire en soi.
Ce n’est pas facile comme métier, c’est lent, c’est long, c’est un peu éphémère. On se remet en question. Mais c’est ça qui est beau. Je fais ce que j’aime.
Passer derrière la caméra, est-ce une tentation ?
Oui, mais pas tout de suite. Pour l’instant, je me concentre sur le jeu. J’aimerais évoluer là-dedans. J’ai des amis réalisateurs que j’admire, je me vois mal me mettre à leur place. Aujourd’hui, je ne saurai pas faire, mais un jour ou l’autre...
Quels sont les réalisateurs qui te font rêver ?
Il y en a plein. J’aimerais bien tourner un jour avec Park Chan Wook, mais je ne parle pas coréen donc ça va être un peu compliqué pour le moment. Amenabar, j’aime beaucoup. J’aimerais beaucoup travailler avec Ozon. Ses films sont très précis, très beaux. J’aimerais bien travailler avec Jacques Audiard aussi. Je pense que c’est un directeur d’acteurs assez exceptionnel.
La bande-annonce de Patients, avec Pablo Pauly, à l'affiche depuis mercredi :