L'un des temps forts de ce 69e Festival de Cannes sera sans nul doute la présentation Hors Compétition de The Nice Guys, le nouveau buddy movie de Shane Black. Au casting, Ryan Gosling et Russell Crowe, un duo de choc et de charme que nous avons rencontré lors du tournage du film.
Saviez-vous qu’entre vous cela allait être une complicité parfaite?
Russell Crowe : Loin de là. On ne sait jamais vraiment à qui on a affaire jusqu’au début du tournage. Deux solutions : ça passe ou ça casse. Mais Ryan me fait vraiment rire et c’est ce qui me motive. Il a un talent fou pour amuser les autres et j’adore travailler avec lui.
Comment avez-vous travaillé : avez-vous répété, fait une lecture du script au préalable?
Ryan Gosling : Oui et c’est là que nous avons vraiment fait connaissance.
RC : En fait, nous n’avons pas eu beaucoup de temps de préparation pour ce film. On a dû se jeter à l’eau très vite ! Nous avons donc énormément improvisé et trouvé notre voie au fur et à mesure.
Qu’est-ce que vous provoquez en l’autre?
RC : Je n’arrête pas de parler depuis le début du tournage alors que je ne suis pas un grand bavard d’habitude.
RG : De mon côté, j’apprends beaucoup de Russell. Le regarder travailler m’inspire…
On aurait pu penser que le « buddy movie », dans la droite lignée de « L’Arme Fatale », s’est essoufflé avec le temps. Et pourtant…
RC : Tout est dans l’écriture. Or, Shane Black a écrit un fabuleux scénario. Un mélange d’humour noir et de drame, dans un style – en l’occurrence, son style - déjanté. Tout est là pour nous guider et nous mettre sur les rails. Et puis je crois que le public aime voir une telle relation se développer à l’écran. C’est magique quand il y a une parfaite alchimie qui s’opère entre deux individus, comme Ryan et moi.
Y’a-t-il un autre buddy movie auquel vous pensez pour décrire ce film?
RC : Papillon ! C’est vraiment un film fantastique qui m’a toujours ému. Je crois qu’il y a la même émotion au cœur de The Nice Guys.
RG : Moi ce que j’aime ici, c’est que c’est ma première incursion dans le film d’action et la comédie policière. Je n’ai jamais joué ça auparavant et c’est rafraîchissant.
RC : Tandis que pour moi c’est presque la routine… [Rires]
En quoi ce film est-il caractéristique de Shane Black ?
RC : Sans aucun doute l’humour sarcastique et ironique. Rien que le postulat de départ est « Shane Blackien » ! Un collecteur de dettes qui vit seul dans un petit appartement au-dessus de la scène d’un théâtre comique… C’est fou non? Il ne communique avec personne et pour lui, écouter ces blagues sont un lien avec le monde extérieur. Ce que j’aime avec Shane, c’est que son humour est à la fois intellectuel et émotionnel pour certaines scènes et physique pour d’autres, un peu à la Rush Hour ou Le Flic de Beverly Hills.
RG : Le sens de l’improvisation est vraiment caractéristique de Shane Black. Il avait en tête les héros de L.A. Confidential, lorsqu’à la fin du film, ils ne font presque plus qu’un. Ici c’est la même chose. Je me souviens d’une scène de fusillade où nous nous passons un flingue pour tirer sur l’ennemi. Et puis Shane aime alterner le tournage à 1 caméra et 3 caméras quand il filme de l’action. Cela lui permet de s’assurer un large champ visuel et d’improviser des mouvements de caméra élancés.
Shane Black est un réalisateur hors pair
Tous les deux vous venez aussi de réaliser un film. Est-ce que d’être réalisateur change votre travail d’acteur?
RC : Pour ma part, je suis plus "conscient” du rôle de la caméra et de son positionnement. J’y fais attention même si j’essaie évidemment d’oublier qu’elle est là. Cela devient comme une seconde nature d’appréhender ce que va faire le chef opérateur avec la caméra quand on est aussi réalisateur. Mais je fais confiance à Shane Black, c’est un réalisateur hors pair. Je m’assure ici de rester dans ma position d’acteur. La réalisation, c’est son boulot, quant à moi, je joue la comédie!
RG : Réaliser un film fut un travail épuisant, donc c’est presque “des vacances” de venir sur un tournage où je n’ai pas à me soucier du mouvement de la caméra ou de l’éclairage. J’oublie totalement que je suis réalisateur et je m’en remets totalement au talent de Shane Black.
Est-ce que vos personnages changent, évoluent au cours du film?
RC : En un sens oui : au début, ils ont l’habitude de travailler en solo et très vite ils se rendent compte qu’ils doivent collaborer. À la fin, ils forment presque un “couple” parfait, fin prêt pour de nouvelles aventures, si le film a du succès... Je pense qu’ils finissent par apprendre beaucoup l’un de l’autre. Ils abandonnent leur côté loup solitaire et deviennent deux partenaires, unis et soudés.
RG : Même si, à la fin du film, nous ne sommes pas totalement des potes ! Donc on évite le cliché à l’eau de rose. Ceci permet aussi d’entrevoir une suite où les personnages peuvent continuer d’évoluer et de poursuivre leur propre chemin initiatique….
Le film se déroule dans les années 1970 avec, en toile de fond, le monde de l’industrie automobile. Est-ce que ceci a une grosse influence sur l’histoire et vos personnages?
RC : Oui et non. Je pense que c’est un choix artistique, esthétique mais en fin de compte c’est une histoire qui aurait pu se passer à n’importe quelle autre époque. Ceci dit, il y a effectivement un fond social et politique. Détroit était un fleuron de l’industrie automobile avant de finir totalement ruinée et abandonné de tous ! Le choix de l’époque et le milieu dans lequel se déroule notre histoire ajoute un peu de piment au film… et à nos personnages.
Propos recueilli par Emmanuel Itier sur le tournage du film.
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