C’est une évidence : le western est indissociable de la filmographie de Kevin Costner. Et même de l’image de l’acteur-réalisateur, qui n’a cessé de revenir au genre depuis ses débuts sous le stetson de Silverado en 1985. Outre ses réalisations (Danse avec les loups, Postman et Open Range), il a ainsi repris les colts dans Wyatt Earp (1994) et la mini-série Hatfields & McCoys (2012). Même Les Incorruptibles ou Revenge relèvent clairement d’une dimension "westernienne", malgré leur apparente modernité. Ce n’était donc qu’une question de temps avant que Kevin Costner ne reprenne à nouveau le chemin de l’ouest. En promotion pour le polar Criminal - Un espion dans la tête, qui lui offre un rôle aussi sombre que touchant (en salles le 4 mai), il a accepté de parler western… et projets.
AlloCiné : Le western est indissociable de votre filmographie. Que représente le genre pour vous ?
C’est un genre qui est avant tout indissociable de notre pays, de l’Amérique. Sachant que l’Amérique a été fondée par les Européens. Je crois que personne ne me prend pour autre chose qu’un Américain. Et je l’accepte totalement : c’est ce que je suis. Ça ne m’empêche pas d’apprécier le reste du monde et de voyager pour découvrir comment fonctionnent les autres pays, mais je reste américain. Je ressens donc régulièrement le besoin de revenir au western. C’est pour cette raison que je vais en réaliser un nouveau au printemps prochain. Ce sera un western de 10 heures.
10 heures ??? Vous le développez sous forme de série ?
Je ne sais pas encore. Peut-être que ce sera sous la forme de trois ou quatre films au final. La forme n’est pas encore définie, mais c’est une seule et même histoire. (…) Je veux vraiment réaliser ce projet, baptisé Horizon. Mais comme les studios ne sont pas certains de son potentiel, j’ai voulu en faire d’abord un livre, Explorer’s Guild, que j’ai co-écrit avec Jon Baird. C’est un peu un retour à ce que faisaient Jules Verne ou Rudyard Kipling. Il y a beaucoup d’illustrations, le livre est très joli et j’espère pouvoir en faire des films. Les projets que j’aimerais mener à bien demandent beaucoup de temps. Donc au lieu de faire des films qui ne m’intéressent pas, j’ai attendu pour faire mon western.
On célèbre cette année les 25 ans de "Danse avec les loups". Que représente ce film pour vous ?
Ce film représente une grande partie de ma vie, même si ce n’est pas une chose à laquelle je pense constamment. Qu’on m’en parle vingt-cinq ans après montre surtout la portée de ce film, qui a su toucher et résonner chez beaucoup de gens à travers le monde, qu’ils viennent d’Europe ou d’ailleurs. C’est ce qui est unique avec le continent américain : l’Europe connaît l’architecture depuis des centaines et même des milliers d’années, alors qu’il n’y avait rien en Amérique il y a 200 ans. Il y a donc cette image très forte de gens qui vivaient à même le sol. Une sorte de Jardin d’Eden, avec une faune abondante, des saumons dans toutes les rivières… Des gens ont vécu des milliers d’années dans ce cadre, pas dans des bâtiments comme en Europe, mais dans la nature. Danse avec les loups a embarqué beaucoup de gens sur le cheval avec moi, ils ont découvert un monde sauvage et immaculé, ils ont découvert un autre peuple avec qui il était impossible de communiquer, ils ont découvert cette femme dont on tombe amoureux malgré cela… On peut faire beaucoup de choses au cinéma, mais l’Ouest Américain fascine les Européens car ils y ont aussi participé. Quand ils débarquaient à New York, les places étaient déjà prises et il leur fallait donc aller toujours plus à l’ouest. Danse avec les loups a permis aux spectateurs de faire le voyage avec moi, dans un mélange de violence, de beauté, de poésie et d’amitié qui les a visiblement touchés.
Avez-vous vu "The Revenant" ? Qu’en avez-vous pensé ?
J’ai trouvé The Revenant vraiment fantastique. C’est un film incroyablement violent du début à la fin. Il ne vous lâche jamais. Et c’est vraiment très réussi. Danse avec les loups parle de l’incapacité des gens à se comprendre : certains ne voulaient pas dialoguer, d’autres voulaient attaquer, d’autres voulaient créer un échange... Il y avait donc une situation complexe autour de la communication. Et même s’il y a de la violence, ce n’est pas le cœur du film. Le cœur du film, finalement, c’est de tenter de se rapprocher d’un animal sauvage et de comprendre les merveilles du monde. Là où The Revenant est un pur survival. Ce sont donc deux films très différents au final.
Vous pensez qu’on pourrait produire un film comme "Danse avec les loups" aujourd’hui ?
On pourrait sans doute, mais il faudrait impérativement le tourner de la même façon. J’ai vraiment porté le film. Comme récemment avec Black or White, que j’ai payé de ma poche. Pourquoi ? Parce que j’avais la conviction que c'était quelque chose que les gens devraient voir. Les films de trois heures comme Danse avec les loups ont du mal à obtenir le feu vert des studios, mais si vous croyez vraiment au film, il faut trouver le moyen que le film se fasse. Et devinez quoi ? Les gens iront le voir. C’est quelque chose que l’industrie hollywoodienne n’a pas compris. Les studios croient tout savoir. Et c’est malheureux.
Kevin Costner vous donne rendez-vous dans Criminal – Un espion dans la tête