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    DieuMerci ! de Lucien Jean-Baptiste : "Ce film m’a appris qu’il ne faut rien lâcher" selon Baptiste Lecaplain
    Brigitte Baronnet
    Passionnée par le cinéma français, adorant arpenter les festivals, elle est journaliste pour AlloCiné depuis 13 ans. Elle anime le podcast Spotlight.

    Rencontre avec le tandem à l'affiche ce mercredi de "DieuMerci !" : le réalisateur et comédien Lucien Jean-Baptiste et Baptiste Lecaplain.

    Wild Bunch

    AlloCiné : Dans le générique de fin, vous mentionnez et remerciez Intérim. Pouvez-vous nous en dire plus ? 

    Lucien Jean-Baptiste : Il y avait un scénario qu’avait Farid Lahouassa (producteur de DieuMerci !, Ndlr.) qui s’appelait "Interim", également connu sous le nom "Les Compagnons", écrit par Grégory Boutboul. Ils m’ont appelé pour un petit rôle dans ce film : un sans papier qui au bout d’un moment devenait plus ou moins comédien à la place d’un autre mec, etc. J’avais répondu non, bof pour ce personnage. Mais je leur ai dit : « c’est marrant, ce personnage me fait un peu penser un peu à ma vie ». Et il me dit « c’est quoi ta vie ? ».

    Je lui raconte que j’ai une formation publicitaire, que pendant 10 ans j’ai bossé sur des concerts et qu’à 31 ans, j’ai eu un drame familial, et que de là j’ai tout perdu et j’ai décidé de devenir comédien. Et il me dit « ben, c’est ça ton prochain film ». Donc sur la base des ingrédients qu’il y avait dans "Interim", j’ai réécrit un film. Et c’est vrai que Farid voulait absolument depuis longtemps nous faire bosser Baptiste et moi. Donc j’ai repris ce scénario et y ait collé toute mon histoire. Voilà l’origine !

    Et cette histoire justement vous n’aviez pas songé à la raconter auparavant ?

    Non, non. Ce n’est pas très gai et j’ai beaucoup de pudeur. C’est quelque chose qui m’est arrivé avec mon épouse. Peut être qu’elle n’avait pas envie de le raconter. J’ai changé 2-3 petits trucs sur l’histoire vraie. Et puis finalement, c’est aussi ce pour quoi on fait ce métier.

    C’est bien de faire de la vanne, mais les artistes ont aussi besoin de sortir des choses pour, peut être, ne plus en parler ou se rééquilibrer. C’est de la catharsis, c’est psychanalytique.

    Quand ton métier peut rassembler tout ça, voilà ça peut donner ça. On a tous un rêve de gosse...

    C’était quoi, vous, votre rêve de gosse ?

    De faire le métier que je fais là en ce moment... Quand on vous dit que vous n’y arriverez jamais, il faut le prendre comme une motivation…

    Il y a cette étape, et l’étape dans laquelle est Clément, le personnage que joue Baptiste. Il n’a pas encore trouvé sa voie, tellement il est en perte de repères, il est dans une errance. Il ne sait pas trop.

    Ce qui est beau, c’est que la rencontre de ces deux mecs, ça va donner un petit sens à son existence. Il y a des gens qui sont dans des errances, et d’autres qui ont déjà l’idée du truc mais qui n’arrivent pas à le faire, et ceux qui le vivent, mais ça reste quand même un combat !

    Un extrait de DieuMerci

    Parlez moi de votre rencontre ! il paraît que vous vous êtes rencontrés à Venise ?!

    Baptiste Lecaplain : Farid Lahouassa était mon premier producteur sur Nous York. Il m’interrogeait sur mon envie de continuer le cinéma après ce rôle. Je lui dis oui, mais que je ne sais pas quoi faire comme film. Il me dit : « je veux que tu fasses un film avec Lucien Jean-Baptiste ». Je connais Lucien de La Première étoile. Je lui dis : « d’accord, mais tu as un film ? » « Non, non, mais je vois le duo se faire. » Donc j’ai lu aussi ce film "Intérim". J’en ai lu plusieurs versions et on me dit que Lucien est en train de le retravailler. Je jouais au Bataclan. J’ai appris que Lucien était venu me voir, mais qu’il n’était pas resté à la fin, donc on ne s’était pas vus. Notre agent nous parlait encore du film.

    Je suis parti à Venise après le Bataclan, et lui y est allé aussi. On s’est retrouvé là : ça faisait un an que chacun parlait de l’un l’autre. Ma meuf faisait la gueule : « ah non, ne parlez pas du film, on est en vacances ! » Donc on s’est dit qu’on allait se voir à Paris. Et puis voilà, j’ai passé les essais avec Lucien, et le film est né comme ça.

    Entre le moment où on s’est dit qu’on allait faire un film tous les deux et le tournage, il s’est passé deux ans et demi. Ca a été très long. Lucien n’a jamais lâché. C’est là que je le remercie aussi parce que quand le film n’arrivait pas à se monter, que c’était compliqué, que le budget allait être serré, il aurait pu dire : « écoute, il me faut un mec plus bankable ». Il aurait pu trouver d’autres acteurs et il m’a imposé. On a attendu et on l’a fait. Mais ça a été très long.

    Lucien Jean-Baptiste : Maintenant, c’est beau, le film est terminé, mais c’est vrai qu’il n’y avait pas grand monde qui voulait mettre de l’argent là-dessus. C’est la règle du jeu. Je ne m’en plains pas, c’est comme ça.

    Il y a justement une question de ténacité : est ce que tu lâches ou pas ? Mais cette histoire, à partir du moment où j’ai dévoilé des trucs très perso comme ça, je ne vais jeter ça à la poubelle. Ca n’aurait pas été bien de ma part, même si j’avais d’autres sollicitations. Parlant de trucs très forts, je voulais aller au bout.

    Que retenez-vous de cette expérience ? Que pensez-vous avoir appris de nouveau en tant que comédien ?

    Baptiste Lecaplain : Ce film m’a appris que plus on prépare un rôle en amont, plus on gagne de temps. Même dans des conditions très difficiles, on a rentré des scènes dans des journées très dures, mais on a pu le faire parce qu’on a beaucoup bossé en amont.

    Lucien a été un coach, un sparring-partner de fou ! On a lu le scénario 5-6 fois chez Lucien, scène par scène. Ensuite, on a travaillé toutes les scènes. On les a toutes jouées. Ensuite, on a travaillé les scènes de théâtre. On a tout fait en long, en large et en travers. On a même joué des scènes qui n’existaient pas. « Viens, on dit qu’il y a ça dans le film ! On s’en fout, on la joue quand même » pour voir où ça nous amenait. Au moins, on arrive sur le plateau, on n’est pas battu quoi.

    Ce film m’a appris qu’il ne faut rien lâcher. Il faut bosser bosser bosser pour donner l’illusion que ces mecs sont des branques dans un cours de théâtre ! C’est beaucoup de travail et beaucoup de patience.

    Wild Bunch

    Vous parliez des difficultés à financer ce film. Un film qui aurait peut être été plus facile à monter est la suite de La Première étoile…

    Lucien Jean-Baptiste :  C’est vrai qu’on m’attend là-dessus mais j’ai l’impression de faire ce métier pour des raisons qui sont pour moi les bonnes. Si je commence à privilégier ce qui m’a amené, à une époque, dans le mur, c’est à dire ne penser qu’à l’argent, là je suis foutu.

    Pour tous mes projets, c’est la passion, le rôle, avant de voir l’aspect économique. Oui, l’argent vient en deux parce qu’il faut qu’on bouffe, mais mon premier moteur, c’est l’artistique, c’est « qu’est ce que je vais défendre ? ».

    Faire ce métier pour me répéter, refaire un truc que j’ai déjà fait, j’irai contre mes valeurs, contre ce qui a fait mon petit succès aujourd’hui. Ce qui fait que j’arrive à emmener une équipe, à motiver des comédiens, c’est ça.

    Vous tournez actuellement un nouveau long métrage. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

    Lucien Jean-Baptiste : Le film s’appelle Il a déjà tes yeux. C’est l’histoire d’un couple de noirs qui adopte un enfant blanc. C’est une histoire que j’ai envie de raconter. C’est plus un film sur le vivre ensemble qu’un film sur l’adoption. C’est une belle comédie avec Zabou, Vincent Elbaz et Aïssa Maïga. Je suis en plein tournage.

    La bande-annonce de DieuMerci :

    Propos recueillis au Festival de la comédie de l'Alpe d'Huez, en janvier 2016 

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