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    La Vie très privée de Monsieur - Jean-Pierre Bacri : rencontre avec un acteur rare
    Brigitte Baronnet
    Passionnée par le cinéma français, adorant arpenter les festivals, elle est journaliste pour AlloCiné depuis 13 ans. Elle anime le podcast Spotlight.

    A l'occasion de la sortie de La Vie très privée de Monsieur Sim de Michel Leclerc, Jean-Pierre Bacri nous a accordé un long entretien : ses débuts, ses choix de carrière en tant qu'acteur et scénariste. L'occasion de revenir sur quelques temps forts.

    Ce mercredi, face au nouvel épisode de Star Wars, Jean-Pierre Bacri sera à l'affiche de La Vie très privée de Monsieur Sim de Michel Leclerc. Son premier rôle depuis Au bout du conte, qu'il a co-écrit avec Agnès Jaoui, sorti en mars 2013.

    Il interprète François Sim, un VRP en brosse à dents écologique, un dépressif "joyeux et optimiste", confronté à l'ultra-moderne solitude..."Cette bonne volonté qu'il a à essayer de s'en sortir est émouvante", comme l'explique Jean-Pierre Bacri dans la vidéo ci-dessus.

    Les héros, ça m'emmerde un peu !

    Et d'ajouter à propos de ses choix de personnage : "Si je ne vois pas de vulnérabilité,  de fragilité, si je ne vois pas de l'humain, je ne suis pas intéressé par quelqu'un qui est heureux, qui n'a pas de problème."

    Discret et exigeant, Jean-Pierre Bacri tourne peu, choisissant méticuleusement chacun de ses projets en tant qu'acteur, quand il n'écrit pas avec Agnès Jaoui.

    Pourquoi est-il si rare à l'écran ? Pourquoi n'aime-t-il pas jouer les héros ? Nous avons échangé avec lui sur ces sujets...

    Impossible de revenir sur l'ensemble des films qui ont émaillé la carrière du comédien, soit plus de 50 à ce jour. Il a tourné pour Alain Resnais, Nicole Garcia, Noémie Lvovsky, Cédric Klapisch, Pascal Bonitzer, ou encore Luc Besson. De la comédie au drame, Jean-Pierre Bacri s'est illustré dans tous les registres.

    Ses premiers pas sur les planches remontent aux années 70. Il ne se destinait pourtant pas à ce métier. Comment tout a commencé ? C'est en suivant une jeune femme pour qui il avait eu un coup de coeur à un cours d'art dramatique qu'il a eu le déclic :

    "Ce métier, je l’ai fait par hasard, comme vous le savez peut être. Je suis rentré dans un cours d’art dramatique complètement par hasard, se souvient-il à notre micro. Je draguais plus ou moins une jeune femme qui m’a dit qu’elle n’était pas disponible le soir parce qu’elle allait au cours d’art dramatique. Donc j’y suis allé plus pour la retrouver, et quand je suis rentré dans ce cours et que j’ai vu en quoi ça consistait, j’ai eu un vrai coup de foudre. Et là je suis resté. Ca m’a tellement plu que j’ai voulu être acteur."

    Je ne suis pas tombé amoureux de cette fille finalement, mais du cours, oui !

    "Je ne suis pas tombé amoureux de cette fille finalement, mais du cours, oui. J’y allais tous les jours, d’être sur une estrade et passer devant les copains, d’être dans des scènes de Pinter, de Tchekhov, de Shakespeare, de Molière… Et puis j’ai tout découvert d’un coup, car j’ai fait une année de fac, mais je n’étais pas très très cultivé, et je me suis mis à aimer les grands textes, à lire beaucoup… Je suis plus une espèce d’autodidacte grâce aux cours et aux textes. Ce sont les textes qui m’ont ébloui."

    Garde-t-il des souvenirs des films qu'il a vu à cette époque ?

    "Oui, bien sûr. Entre autres, par exemple, Entrée des artistes qui parle de cours d’art dramatique, avec Louis Jouvet. Film que j’ai revu récemment et qui, bon, est un peu insuffisant... Mais en tout cas, ça m’avait beaucoup plu. Et puis, oui, je voyais beaucoup de films. A partir du moment où j’ai fait ce métier, je me suis gavé de films, les grands films en noir et blanc et j’allais au cinéma assez souvent."

    Son premier rôle au cinéma, il le décroche pour un film avec Alain Delon, Le Toubib de Pierre Granier Deferre, en 1979. Restauré et réédité cette année, nous lui tendons le coffret Blu-Ray.

    - Vous voulez le garder ?

    - Ah non, je le regarde comme ça, mais non, surtout pas, lance-t-il encore surpris de revoir la jaquette de ce film. C’est mon premier rôle au cinéma. J’avais un masque comme je suis chirurgien, j’avais un truc comme ça (il met ses mains devant le visage). J’étais mort de trouille parce que Delon... Contre toute attente, il a été hyper mignon, hyper gentil avec moi. J’avais très peur et il a été très sympa. Comme quoi, il ne faut pas penser des choses des gens avant de les avoir connus. 

    J’avais très peur et il a été très sympa. Comme quoi, il ne faut pas penser des choses des gens avant de les avoir connus

    Est-ce, indirectement, une façon de faire allusion à cette image qui lui colle à la peau de bougon, image popularisée par sa marionnette aux Guignols ? Un personnage de bonhomme colérique, mais attachant, et surtout irrésistiblement drôle qu'il a promené de comédie en comédie.

    Chez Claude Berri par exemple, dans Une Femme de ménage; chez Diane Kurys aussi, dans La Baule-les-pins, ou encore aux côtés d'Alain Chabat dans Didier, ou même pour sa petite apparition mémorable dans La Cité de la peur dans la peau d'un projectionniste en sursis !

    Sans oublier Mes meilleurs copains de Jean-Marie Poiré, comédie devenue culte grâce à ses diffusions à la télé, et dont on lui parle encore beaucoup aujourd'hui, 26 ans après sa sortie :

    Dans les années 90, le tandem Agnès Jaoui - Jean-Pierre Bacri signe son premier scénario pour le cinéma : Cuisine et Dépendances. Juste après, tous deux collaborent avec Alain Resnais pour l'adaptation de Smoking / No smoking, puis On connait la chanson pour lequel Resnais leur a laissé "carte blanche totale". "On l’aimait beaucoup. C’était un homme extrêmement doux. On a beaucoup aimé travailler avec lui."

    Focus sur On connait la chanson dans Merci Qui ?

    Jean-Pierre Bacri joue, écrit, et a un "péché mignon", diriger les acteurs sur les films qu'il a co-écrit avec Agnès Jaoui :

    "Oui , j’adore ça. D’abord parce que j’adore la musique, je suis vraiment un fou de musique, j’en écoute beaucoup beaucoup. Et quand on joue, il y a beaucoup de musique. D’ailleurs, on appelle ça jouer, ce n’est pas pour rien. Quand un acteur joue, c’est musicalement que ça se passe. C’est comme ça que vous entendez la vérité ou le mensonge. C’est comme ça que vous vous dites : « Mais c’est faux, ça ne marche pas ! » Comme j’aime ça, j’aime la justesse. Je suis toujours tenté d’intervenir.

    Quand Agnès réalise un film, nos scénarios, je suis toujours tenté d’intervenir, de lui dire « c’est dommage, il me semble qu’elle pourrait faire autre chose là, etc… » C’est un péché mignon que j’ai, j’aime beaucoup diriger les acteurs."

    Quant à leur inspiration, elle provient toujours d'une "démangeaison", nous indique-t-il : "C'est parce que ça démange que l'on se gratte. On veut se gratter, on veut en finir avec cette démangeaison, donc on écrit. Il faut qu'on soit motivés par quelque chose de puissant et d'urgent."

    Le tandem est justement en train de terminer un nouveau scénario, qui sera mis en scène par Agnès Jaoui, et dont Jean-Pierre Bacri, a accepté de nous dévoiler les grandes lignes :

    Avant de lancer le tournage de son nouveau film réalisé par Agnès Jaoui, on pourra découvrir Jean-Pierre Bacri dans le prochain long métrage de Pascal Bonitzer (avec qui il avait déjà tourné dans Cherchez Hortense), Tout de suite maintenant, dont la sortie est prévue le 27 avril 2016. 

    "C’est un scénario qui réunit surtout Vincent Lacoste et Agathe Bonitzer, et dans les rôles secondaires, il y a Isabelle Huppert et moi qui jouons. D’ailleurs, j’avais rencontré Isabelle sur Coup de foudre il y a très longtemps, et encore on se croisait à peine, et là on a vraiment joué ensemble, c’était hyper agréable d’avoir ces quelques scènes ensemble. Comme j’aime bien Pascal, j’étais content de retravailler avec lui.

    La Vie très privée de Monsieur Sim de Michel Leclerc sort sur les écrans ce mercredi. Découvrez la bande-annonce :

     Propos recueillis à Paris le 2 décembre 2015

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