Quand la fiction rattrape la réalité, à moins que ça ne soit l'inverse. Alors que la FIFA est plongée dans la tourmente suite à une gigantesque affaire de corruption, "United Passions - la légende du Football" fait un flop historique au Box Office.

A moins d'avoir vécu dans une grotte comme un ermite, vous n'êtes pas sans savoir que la FIFA est ébranlée par une énorme affaire de corruption. Le 28 mai dernier, 14 personnes furent arrêtées dont sept membres de la FIFA soupçonnés de corruption. Le 2 juin, nouveau coup de tonnerre : son tout puissant patron, Sepp Blatter, surnommé le "Machiavel suisse", démissionnait de son mandat, alors qu'il venait d'être fraîchement réélu.

Cette vague de mises en accusation et d'arrestations a été faite sous l'impulsion du Ministère de la justice américaine, qui a dressé un état des lieux accablant d’une corruption "endémique" au sein de la FIFA. Les quarante-sept chefs d’inculpation retenus contre neuf responsables de la FIFA, dont deux vice-présidents, et contre cinq partenaires, les accusent de "racket, fraude et blanchiment", sur une période de vingt-cinq ans, durant laquelle ces responsables du football mondial auraient "sollicité et reçu plus de 150 millions de dollars en pots-de-vin et rétrocommissions" en échange notamment des droits médiatiques et marketing pour les tournois internationaux de football. Sociétés écrans, comptes cachés à l'étranger, paradis fiscaux... Tout y passe.

Chronique d'un fiasco historique

A l'aune de cette brûlante actualité, une oeuvre comme United Passions - la légende du football, produit pour 24 millions d'euros dont près de 90% proviennent de la FIFA, prend une toute nouvelle dimension. De là à dire que le film a effectivement été produit avec de l'argent sale, il y a un pas que certains n'ont d'ailleurs pas hésité à franchir...

Pourtant, tout semblait bien commencer. Le film fut d'ailleurs présenté l'an dernier en marge du Festival de Cannes par son réalisateur, Frédéric Auburtin, accompagné de Gérard Depardieu qui incarne Jules Rimet, un des fondateurs de la FIFA; sans oublier un Sepp Blatter tout souriant sur le Red Carpet.

"Embarrassante hagiographie et invraisemblable film de propagande", voire carrément "pure merde cinématographique" écrivait le journal britannique The Guardian à propos du film, "dont la bande-annonce laissait déjà entrevoir un mélange louche entre les chariots de feu et le Parrain". United Passions - la légende du Football s'est copieusement fait étrillé un peu partout sur le globe. Sans oublier les acteurs qui ont aussi eut droit à leurs cartons rouges respectifs, à commencer par Tim Roth, qui incarne Sepp Blatter, "ce grand anti héros incompris du XXIe siècle" ironisait encore The Guardian. En France, le film n'a même pas eu droit aux honneurs d'une sortie en salle, passant directement par la case DVD et VOD.

Alors que le film bénéficie d'une sortie (très) limitée aux Etats-Unis depuis le 7 juin, son réalisateur, Frédéric Auburtin, a confié ses regrets et son embarras au Hollywood Reporter, pour "le gâchis d'un long métrage qui ressemble à de la propagande"; précisant qu'il voulait en fait réaliser un film à mi chemin entre "un Disney et un film de Costa-Gavras ou Michael Moore". Le résultat est "un gâchis et apparemment je suis quelqu'un qui fait de la propagande et qui réalise des films pour des gens corrompus" a-t-il déclaré.

Quand on parle dans le titre d'un fiasco historique, on doit probablement être encore en dessous de la vérité. Lorsqu'on jette un coup d'oeil aux résultats du Box Office américain, on se pince tellement la somme récoltée est dérisoire : 607 $. Certes, le film n'a été projeté que dans une dizaine de salles aux Etats-Unis, mais quand même. On parle bien de 607 $ de recettes au Box Office US. On a beau chercher, il est impossible de trouver un point de comparaison possible. Parfois, même la mauvaise publicité peut finalement se révéler être de la bonne publicité. Sauf dans le cas de United Passions - la légende du Football visiblement.

En octobre 2014, le quotidien britannique The Independent pointait déjà que le film, lancé en juillet, n'avait ramassé que 160.000 euros de recettes, soit même pas 1% de son budget. Le film n'était alors diffusé que dans sept pays, dont la Suisse, patrie de Sepp Blatter. Petit camouflet local supplémentaire : projeté dans un festival de films à Zurich en octobre 2014 dans une salle de 500 places, il n'avait attiré que 120 personnes. En Serbie, le film n'a récolté que 2100 € de recettes; à peine plus de 5000 € au Portugal. C'est en Russie, deuxième patrie de Gérard Depardieu et pays hôte pour la prochaine coupe du monde de football, que United Passions a le mieux marché si l'on peut dire, avec un peu plus de 114.000 € de recettes.

Pour voir à quoi cela ressemble, rien de tel qu'une petite bande-annonce..