De quoi parle-t-on ?
La maison de production indépendante Hammer Film voit le jour en 1934 grâce au britannique William Hinds, comédien à l'époque, qui usait du pseudonyme de Will Hammer. Enrique Carreras, immigré espagnol installé à Londres, se joint à lui et ils fondent ensemble Exclusive films. Leur marque de fabrique ? Des séries B pas chères qui rapportent suffisamment à la firme pour la faire perdurer. Leurs premiers films sont des comédies : The Public Life of Henry the Ninth ou -déjà- de l'épouvante : The Mystery of the Marie Celeste avec Bela Lugosi.
En 1939, les fils des deux producteurs, James Carreras et Anthony Hinds, reprennent en main la société. Sitôt la Seconde Guerre mondiale achevée, Exclusive films devient Hammer Film Productions Limited. Elle adapte alors des téléfilms, et le succès survient avec la série science-fiction des Quatermass, six épisodes d’une série diffusée sur la BBC en 1955. La série, réalisée par Val Guest, conte les aventures du professeur Quatermass aux prises avec des forces extraterrestres. L’Angleterre est conquise, et la Hammer constate que le fantastique fait recette. Quatermass fait l'objet de plusieurs autres séries, et le succès est toujours au rendez-vous.
L'horreur comme marque de fabrique
L'idée majeure de la compagnie est de refaire un Frankenstein. Le livre est libre de droits, et le rachat est une formalité. C’est le réalisateur Terence Fisher qui participe avec Frankenstein s'est échappé (1956) à un tournant majeur de la firme. Il impose un "style Hammer" à son histoire et réinvente le mythe de la créature du roman de Mary Shelley. Le succès est phénoménal, et la Hammer rachète les droits sur les classiques de la littérature gothique à Universal, et déverse un flot de films reprenant les personnages de Dracula, la momie ou du loup-garou. Le style Hammer : de la création originale et un style gothique. Le public adhère, et la maison de production devient mythique.
Plusieurs films vont affirmer ce style : Le Cauchemar de Dracula (1957), La Revanche de Frankenstein (1958), Le Chien des Baskerville (1958), La Malédiction des pharaons (1959). Suivent -en plus des suites aux aventures du baron Frankenstein, de Dracula et de la momie- Les Deux Visages du Docteur Jekyll (1959), La Nuit du loup-garou (1960), Le Fantôme de l'Opéra (1961). Et les films s'enchaînent ainsi jusqu'en 1970. Le public répond présent et en redemande, à l'inverse de la presse qui regorge d'imagination dans la critique acerbe.
Ci-dessous, Nicolas Stanzick, auteur d'un ouvrage de référence consacré à la Hammer, Dans les griffes de la Hammer, nous parle de la mythique firme britannique.
Le déclin
Il commence en 1970, avec l'apparition de films mineurs, qui compensent une faiblesse scénaristique par la surenchère de cynisme (Les Horreurs de Frankenstein), voire d'autres astuces comme mêler vampires et kung-fu (Les Sept Vampires d'or), vampires et hippies (Dracula 73) ou vampires et nudité (Comtesse Dracula). La Hammer est également concurrencée par le cinéma italien des Mario Bava, Antonio Margheriti, Lucio Fulci et Dario Argento. De même, aux États-Unis une vague de films repousse les limites de l'horreur en faisant du gore, supplantant la Hammer et la reléguant au second plan. La Nuit des morts-vivants (1968), L' Exorciste (1973), Massacre à la tronçonneuse (1974) sont autant de nouvelles références du cinéma d'horreur.
Le studio Hammer fonctionnera au cinéma jusqu’en 1979, puis se tournera vers la télévision dans les années 80, avant de disparaître. Mais comme les créatures fantastiques qu'elle a remis au goût du jour, la Hammer renaît de ses cendres en 2010 en supervisant Laisse-moi entrer , La Dame en noir, le plus gros carton au Box-Office britannique depuis 20 ans, et sa suite, La Dame en noir 2 : l'ange de la mort. Au fond, la peur est éternelle, et les monstres (sacrés) ne meurent jamais...
Ci-dessous, La réception en France des films de la Hammer selon Nicolas Stanzick..