Eté 1984 - Alors que Margaret Thatcher est au pouvoir, le Syndicat National des Mineurs vote la grève. Lors de leur marche à Londres, un groupe d’activistes gay et lesbien décide de récolter de l’argent pour venir en aide aux familles des mineurs. Mais l’Union Nationale des Mineurs semble embarrassée de recevoir leur aide. Le groupe d’activistes ne se décourage pas. Après avoir repéré un village minier au fin fond du pays de Galles, ils embarquent à bord d'un minibus pour aller remettre l'argent aux ouvriers en mains propres. Ainsi débute l’histoire extraordinaire de deux communautés que tout oppose qui s’unissent pour défendre la même cause...
Et si c'était vrai ?
Dans Pride, presque tout ce qui est relaté est vrai. Si cette alliance incongrue entre des homosexuels et des mineurs paraît irréaliste, idéaliste même, encore plus dans les années 80 qu'aujourd'hui, elle a bel et bien existé ! Quand le scénariste Stephen Beresford en entend parler pour la première fois, il y croit à peine. Autour de lui, on évoque une légende urbaine qui traînerait dans la communauté gay depuis des années. Dès lors, il se dit qu'un jour, si l'histoire est avérée, il écrira dessus. 20 ans plus tard, lorsqu'un producteur lui demande quelle histoire il rêve de mettre en scène, il repense à cette "légende" et la raconte. L'assistance reste perplexe mais il est déterminé à les convaincre que ce film doit voir le jour.
Après maintes vérifications qui ont confirmé son existence, Beresford se lance dans l’écriture du scénario, son premier pour le cinéma. ll retrouve quelques membres du groupe LGSM (Lesbians & Gays Support The Miners) via les réseaux sociaux, qui l’orientent vers le co-fondateur du mouvement, Mike Jackson, détenteur des archives, dont une particulièrement précieuse : un documentaire fait maison intitulé All Out! Dancing in Dulais! racontant leur folle aventure avec des images de l'époque. Il l'utilise pour décider de ce qui va être de l’ordre de la fiction et de l’histoire vraie dans son film (voir le documentaire).
Bill Nighy, qui incarne le rôle de Cliff, a d'ailleurs confié à ce sujet : "On ne peut pas se permettre de raconter n’importe quoi, d’autant plus que ces événements n’ont cessé d’être dévoyés et déformés depuis qu’ils ont eu lieu." Les figures emblèmatiques du groupe LGSM sont évidemment présentes dans Pride, mais quelques nouveaux personnages ont également été créés de toute pièce afin de faciliter le récit et ajouter du liant et une touche de romanesque. Par exemple, le jeune Joe, qui n'assume pas encore son homosexualité, a été inventé afin d'aider le spectateur, n'importe quel spectateur, à se plonger dans la communauté gay londonienne des années 80 et comprendre les codes très particuliers de son fonctionnement. De même, il était primordial pour le scénariste que "la Gay Pride soit représentée comme un événement politique, et pas comme un carnaval." à travers ce héros qui la découvre de l'intérieur.
Et après ?
Lors de l'avant-première londonienne, la plupart des protagonistes de Pride -en dehors de ceux qui ont été emportés par l'épidémie du SIDA peu de temps après les événements du film- ont répondu présents à l'appel de Berensford et ont pu assister à une standing-ovation, à la fois pour le film mais surtout pour eux, ces héros, pour ce combat qu'ils ont mené, pour ce semi-échec dans les faits qui a pourtant été une victoire. Ainsi, Dai Donovan, l'un des mineurs gallois, a spontanément offert un discours bouleversant. Il a notamment déclaré, au nom de tous ses camarades : "Aucun d'entre nous ne pensait que cette histoire entrerait un jour dans la lumière. C'est un témoignage pour le futur, il existe désormais pour toujours".
Payés en tant que figurants pour la scène finale retraçant la grande marche londonienne, ils admettent tous avoir l'espoir que ceux qui verront le film comprendront l'importance de l'engagement politique, notamment parmi les plus jeunes, fascinés par Pride mais jusqu'alors peu mobilisés, tant du côté des unions des travailleurs que des activistes gays, lesbiens, bi et transgenres.
Si vous avez aimé "Full Monty", "Billy Elliott", "Les Virtuoses"...
S'il y a bien un genre dans lequel les anglais excellent, c'est celui de la comédie sociale (même si les français tentent peu à peu des choses intéressantes telles que Les Femmes du 6ème étage ou Le Nom des gens). Sur des thèmes graves et importants, ils parviennent à offrir des films lumineux et positifs, souvent feel good, qui possèdent une véritable portée politique et qui réussissent à ne jamais tomber dans la facilité et le pathos. Ils sont tout simplement à leur image, et le reflet d'une histoire, d'une culture, d'une mentalité. Pride s'inscrit dans cette parfaite lignée. Entre Ken Loach et Richard Curtis.
Auréolé d'une "Queer Palm" lors du dernier Festival de Cannes, le film de Matthew Warchus ne s'adresse pas simplement à une communauté mais bien au plus large public possible, quel que soit sa sexualité. Il n'a rien à envier à des succès marquants tels que Full Monty, Billy Elliott, Les Virtuoses ou encore Good Morning England, puisant sa force dans l'humour, le réalisme, des personnages hauts en-couleurs, une bande-originale festive et bien sûr des discours, toujours valables et forts 30 ans après les événements relatés, que ce soit sur les droits des homosexuels, l'importance du féminisme et la critique, toujours acerbe, du gouvernement de Mrs Thatcher.
Un divertissement intelligent en somme, à côté duquel Bill Nighy ne pouvait passer : "C’est l’un des meilleurs scénarios que j’aie jamais lu (...) Je n’ai pas hésité une seconde à donner mon accord. J’irais même jusqu’à dire qu’il s’agit du film le plus important de l’année (...) C’est l’une de mes meilleures expériences."