© Rezo Films / © Emilie de la Hosseraye / Mandarin Cinema - Gaumont 2011
On se souvient de sa ressemblance frappante avec l'ancien président de la République. Et bien, Bernard Le Coq reprend le rôle de Jacques Chirac dans La Dernière campagne, un téléfilm proposé par France 2 qui s'intéresse à la vie du désormais retraité et du rôle qu'il a joué au cours de la campagne présidentielle de 2012. Partant sur une image d'archive du vrai Chirac annonçant son intention de soutenir François Hollande, le film imagine, entre fiction et réalité, l'influence exercée sur le candidat socialiste par celui qui a gouverné la France entre 1995 et 2007. Plus que tout, il s'agit en réalité d'un portrait d'un vieil homme seul et diminué qui tente de se convaincre qu'il n'est pas tout à fait à la retraite. Allociné a rencontré Bernard Le Coq qui a accepté de revenir sur la préparation de ce rôle pas comme les autres.
Mercredi 17 avril sur France 2 à 20h45.
Allociné : Deux ans après « La Conquête », vous retrouvez Jacques Chirac mais dans un rôle finalement assez différent. Votre préparation a-t-elle été la même ou l’avez-vous traité comme un tout autre personnage ?
Bernard Le Coq : L’intérêt si vous voulez c’est la continuité entre les deux films. J’avais fait un premier travail dans La Conquête où j’essayais de m’approcher au plus près du personnage que j’avais à interpréter, ce qui est la base du travail d’acteur. Se dire des informations dont on dispose, surtout lorsqu'il s'agit de personnages existants, et dont on essaie de s’approcher au plus près, sans les caricaturer, pour être au plus proche d’eux. A partir de là, ce personnage que j’interprétais dans La Conquête a évolué, vieilli, et se trouve avec ce film dans une situation très différente puisqu’il n’est plus au pouvoir, dans ses fonctions, et se retrouve face à sa réalité quotidienne, sou du moins la réalité inventée par les scénaristes. Alors il y avait beaucoup de choses à jouer, très différentes. C’est effectivement, un homme qui a à la fois accompli son destin, mais qui a encore le goût de ses choses, il aime encore le pouvoir, d’intervenir dans la vie de son pays, sa fonction car c’est ce qu’il aime faire. Donc c’était très intéressant à traiter, c’est un personnage en plus très connu Jacques Chirac, qui avait beaucoup d’humour, beaucoup de choses comme ça qui me semblaient tout à fait plaisantes à faire.
Le point de vue du film, inventé et même onirique, a-t-il facilité votre interprétation puisqu’il ne fallait pas coller exactement à la réalité ?
Il y avait plus de liberté dans la mesure où on est vraiment dans une fiction déclarée. Les personnages sont imaginés à travers le point de vue de Jacques Chirac, que cela soit Thierry Frémont (Nicolas Sarkozy) qui lui est est dans un rôle plus réaliste mais joue avec moi une scène rêvée de pure fiction ou encore Patrick Braoudé (François Hollande) qui lui n’avait que des scènes rêvées à une ou deux près. C’était amusant pour nous d'avoir cet espace de liberté puisque nous ne prétendons pas être les gens que l’on incarne, et cela reste un travail d’acteur et même un plaisir avant un travail je dirais. Les relations entre ces hommes qui sont à la fois dans la quête du pouvoir, pour le conserver ou de l'obtenir, c’est intéressant de tenter de comprendre ce genre d’ambition. Il est toujours intéressant pour un comédien d’aller se promener dans ce monde.
Il y a dans l’écriture du film des thèmes forts et même presque shakespeariens. Quelle a été votre ressenti lors de la lecture du scénario ?
Ça me passionne toujours personnellement d’être dans les sphères de gens qui se prétendant normaux mais sont différents du commun des mortels malgré tout. Il y a une quête énorme, à la fois du pouvoir et pas forcément pour des raisons négatives, avec des convictions qui sont souvent très fortes et des certitudes qui sont selon eux les bonnes réponses à la bonne marche de la société. Alors on pourrait aussi dire que certains n’ont les bonnes réponses qu’à leurs propres intérêts. Mais je ne crois pas à ça, pas uniquement en tout cas. C’est un mélange de toutes ces choses-là. Il faut une détermination sans limite pour arriver à cela j’imagine et une fois qu’on est là, ce sont des responsabilités très lourdes. 50% des gens sont contents quand ils votent, d’avoir leur candidat à l’Elysée, puis après cela peut changer et de toute façon les autres 50% ne seront pas contents donc ce sont des positions à tenir très difficiles. Mais c’est fascinant, car cette lutte peut rassembler aux tragédies, dans des intrigues shakespearienes, dans un monde qui est hors de notre quotidien bien entendu. Ce sont des gens qui tiennent les rênes de nos existences d’une certaine façon.
Après votre première interprétation, avez-vous reçu des échos de l’entourage de l’ancien président, voire de lui-même, sur votre performance ?
Non je n’ai pas eu de contact direct. Simplement, parce que je connais des gens de son entourage, j'ai envoyé à Jacques Chirac un DVD de La Conquête et lui m’a envoyé par le même biais le deuxième tome de ses mémoires. Mais je n’ai pas d’autres relations avec cet homme. J’ai évidemment un regard de citoyen sur sa vie et son travail et j'éprouve du respect pour lui. Mais en dehors de ça, les hommes politiques savent que c’est de leur image que nous évoquons et non pas de la personne elle-même, dans ses tréfonds et profondeurs. Les hommes et femmes de ce monde ne sont pas des idiots et s’intéressent à beaucoup de choses. Nous les acteurs interprètons des choses autour de ça, autour d’une certaine intimité, des centres d’intérêt qui ne sont pas uniquement la conquête du pouvoir. Il y aussi un regard sur la vie, un peu de philosophie, des choses comme ça chez ces gens-là. Ce ne sont pas pas uniquement des bêtes à concours, si l'on peut dire (rires).
En avez-vous fini avec Jacques Chirac ou aimeriez-vous l’incarner de nouveau si un projet intéressant s’offrait à vous ?
J’ai été gâté deux fois avec de très bons scénarios. J’ai dit qu’on allait peut-être me faire jouer Jacques Chirac à quatorze ou quinze ans et ce serait un gros boulot pour moi mais évidemment c’est une plaisanterie. Je ne sais pas, je ne fais jamais ce genre de projets à l'avance, je suis content quand les choses se font naturellement, quand on arrive à bien les faire et qu’ensuite il y a une reconnaissance auprès des spectateurs qui trouvent que c’est un bon travail. Si ça leur a plu alors ça me va très bien. On verra plus tard mais à l'heure actuelle, je n’ai pas d’autres projets non.
Propos recueillis par Clément Cusseau