Parmi tous les noms qui ont circulé pour être la vedette de Jason Bourne : l'héritage (bande-annonce ci-dessous), beaucoup auraient sans doute signé les yeux fermés, et plutôt deux fois qu'une. Pas Jeremy Renner, qui a visiblement pesé le pour et le contre : "C'était [un rôle] de nature à bouleverser mon anonymat, et je tiens à ma vie privée comme à ma famille. J'ai donc dû prendre en compte la façon dont ça allait affecter ceux que j'aime, à commencer par moi-même." La suite, on la connaît, et l'acteur a ainsi pu participer à sa première franchise en tant que tête d'affiche, et même temps qu'il a confirmé qu'Hollywood ne pouvait plus se passer de lui, cinq ans seulement après qu'il ait commencé à marquer les esprits.
Revenons donc en arrière, jusqu'au 19 septembre 2007. Ce jour-là, les infectés de 28 semaines plus tard débarquent dans nos salles et, entre deux frissons, quelques nouveaux visages se font remarquer. Parmi eux, l'interprète de Doyle, un certain Jeremy Renner dont le nom, outre sa quasi-homonymie avec celui de Jérémie Renier, ne dit rien à personne ou presque. Car l'acteur n'en est pas vraiment à ses débuts : né le 9 janvier 1971, il tourne en effet depuis 1995 et la comédie ado Alarme totale, et s'est même offert des passages dans Angel (saison 1, épisode 11), L'Affaire Josey Aimes ou Les Seigneurs de Dogtown, où il n'est d'ailleurs pas crédité. Mais le problème, c'est que personne ne fait vraiment attention à lui, y compris lorsqu'il affronte Colin Farrell en grand méchant fourbe de S.W.A.T., film d'action que beaucoup aimeraient oublier.
28 semaines plus tard - © Twentieth Century Fox France
La donne change donc en 2007 et, après son rôle de militaire au grand coeur dans 28 semaines plus tard (photo ci-dessus), on le retrouve au côté de Brad Pitt, Casey Affleck, Sam Rockwell, Sam Shepard, Mary-Louise Parker, Zooey Deschanel..., bref, le casting de L'Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford (photo ci-dessous). Son temps de présence à l'écran n'y est, certes, pas des plus important, mais on se souvient quand même qu'il fait partie de la distribution, preuve son ascension est bel et bien en marche, même si sa véritable explosion n'interviendra pas tout de suite.
L'Assassinat de Jesse James... - © Warner Bros. France
2008 n'est en effet pas la plus marquante des cinq dernières années de la carrière de Jeremy Renner, que l'on aperçoit surtout à la télé, dans un épisode de Dr House, et le pilote, inédit en France, de The Oaks. Les heureux privilégiés présents à Venise, commençent toutefois à imprimer son nom et son visage, grâce à la bombe Démineurs (bande-annonce ci-dessus). Reparti bredouille du Lido, le film de Kathryn Bigelow entame alors une tournée des festivals où il se voit encensé à tour de bras, jusqu'à sa sortie, presqu'un an plus tard (fin juin 2009 aux Etats-Unis, septembre en France). Succès critique à défaut d'être public, Démineurs récolte toutefois de nombreux prix pendant que Jeremy Renner accumule les louanges pour sa performance intense. Une juste récompense pour celui qui, revenant sur les conditions de tournage sous la chaleur étouffante de la Jordanie, avouera avoir été poussé dans ses retranchements, et en qui beaucoup voient déjà un futur grand, ce que 2010 ne mettra pas longtemps à confirmer.
Pour Jeremy Renner, tout commence le 7 mars 2010. Pas sur un plateau, mais sur l'un des fauteuils du Kodak Theater, où se tient la 82ème cérémonie des Oscars. Assis tout près de Matt Damon, il ne sait pas encore que le destin va prochainement les lier et il a d'autres préoccupations en tête : nommé à 8 reprises, Démineurs y fait en effet figure de David face au Goliath Avatar. Et si Renner voit la statuette du Meilleur Acteur revenir à Jeff Bridges, il assiste au triomphe de Kathryn Bigelow, sans se douter qu'un siège lui sera également réservé l'année suivante. La "faute" à The Town (photo ci-dessous), deuxième réalisation de Ben Affleck, qui lui offre un rôle de chien fou instable, une nouvelle prestation de haut vol (sans mauvais jeu de mots) dans la peau d'un braqueur. Une fois de plus, le Lido s'enflamme, et Jeremy Renner commence l'année 2011 aux Oscars.
The Town - © Warner Bros. France
Nommé dans la catégorie Meilleur Second Rôle Masculin, il est certes mis K.O. par Christian Bale, mais trouve vite de quoi se rattraper, en apparaissant dans Thor. Une apparition (non-créditée) qui tient vraiment du caméo et qu'il semble avoir tournée en solo dans sa nacelle, mais qui lui permet de valider son ticket pour l'aventure Avengers (photo ci-dessous), grand raout super-héroïque planifié par Marvel depuis Iron Man... et qui a bien failli le priver du rôle principal de Jason Bourne : l'héritage. De passage à Deauville, le réalisateur Tony Gilroy nous a en effet expliqué que, s'il était tout en haut de leur liste, Jeremy Renner n'était surtout pas disponible aux dates de tournage prévues.
Avengers - © The Walt Disney Company France
Dans un premier temps en tout cas, puisqu'un changement de planning du côté de Joss Whedon a fait les affaires de tout le monde, à commencer par l'acteur. Au coeur de nombreuses rumeurs (pour le remake de New York 1997), il termine 2011 sur les chapeaux de roue, en voleur de scènes dans Mission : Impossible - Protocole Fantôme (interview ci-dessous). Dans la peau d'un analyste plus trouble que prévu, il y tient la dragée haute à Tom Cruise et s'offre son plus gros succès commercial. Mais ce record personnel ne va pas tenir longtemps...
Une fois n'est pas coutume, Jeremy Renner ne débute pas l'année 2012 par la cérémonie des Oscars, et il faut attendre la fin avril pour le revoir sur grand écran (bande-annonce ci-dessous). Invisible pendant une bonne partie du long métrage et n'existant qu'à travers le personnage de Scarlett Johansson pendant son absence, son Oeil-de-Faucon n'est donc pas le plus marquant d'Avengers (et s'est même dit déçu de sa prestation), mais nul doute que pouvoir écrire "a participé au troisième plus gros succès de tous les temps", ça embellit un CV. Surtout que, quelques semaines avant, les toutes premières images de Jason Bourne : l'héritage sont tombées, et ont fait taire les sceptiques. Malgré les réserves qu'ils peuvent aujourd'hui avoir sur le long métrage lui-même, ces derniers sont toujours silencieux depuis sa sortie. Car si l'on ne donne pas cher de la peau de Matt Damon dans un combat contre Jeremy Renner (c'est dire le niveau), celui-ci campe un personnage plus vulnérable, avec l'intensité qui le caractérise et des cascades faites maison (sans doute l'influence de Tom Cruise). De quoi lui permettre de s'installer durablement tout en haut de l'échelle hollywoodienne, dont il a vite gravi les échelons, sans s'éparpiller.
A notre micro, lors du dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville, Jeremy Renner a reconnu que son ascension avait été fulgurante, mais qu'il n'y avait eu aucun plan de carrière de sa part : "Je pense que j'ai eu une chance folle", nous a-t-il expliqué. "Mais j'ai surtout cherché à faire ce que je connais, ce que j'aime et le genre de films que j'apprcié. Je suis heureux d'avoir pu profiter de ces opportunités, mais je n'ai pas cherché à arriver au sommet d'Hollywood pour autant."
Oui, Jeremy Renner sait aussi rejouer les affiches de ses films en live...
2013 s'annonce donc, pour lui, comme l'année de la confirmation, et celle-ci se fera en mode "grand écart", puisqu'on le verra successivement dans Hansel et Gretel, relecture fun et décomplexée du célèbre conte du même nom, en février, puis dans le nouveau film de James Gray, The Nightingale, où il se glissera dans la cape d'un magicien du début du XXème siècle, face à Marion Cotillard et Joaquin Phoenix. Egalement annoncé dans les peaux de Steve McQueen et Julian Assange, Jeremy Renner a donc largement de quoi re-prouver qu'il a bien le talent dans la peau, en attendant de le retrouver dans Avengers 2, Mission : Impossible 5 et le prochain Bourne, où son Aaron Cross pourrait "devenir serveur au McDo" et "être pote" avec Jason Bourne. Tout un programme...
Maximilien Pierrette
Jeremy Renner et l'équipe de "Jason Bourne : l'héritage" au micro :
La bande-annonce de "Hansel et Gretel" :