En guise d'introduction, Guillaume Gouix répond à notre questionnaire "Jeunes comédiens"...
Quand on lui demande si le cinéma était une vocation, Guillaume Gouix nous répond que non : « C’est un hasard, au début je faisais ça pour me marrer, je m’en foutais un peu ». Le ton est donné, à la langue de bois, Guillaume Gouix préfèrera l’honnêteté.
Profession acteur
C’est le téléfilm Dérives, de Christophe Lamotte, qui lui donnera le goût du jeu et surtout des plateaux. S’ensuivent des cours de théâtre, un peu de figuration et une formation d’accessoiriste jusqu’à ses 16 ans. « Mais l’école, c’était pas trop [son] truc », à tel point qu’il nous avoue avoir beaucoup séché lorsqu’il était au Conservatoire de Marseille. C’est lorsqu’il rejoint une école de théâtre à Cannes que l’adolescent tumultueux commence à s’assagir. Point trop n’en faut… Alors qu’il considère avoir fait le tour de la ville, il suit des amis et monte à Paris. Des amis vraiment ? « En fait, il y avait une fille qui me plaisait, je suis monté comme ça et ça s’est bien passé donc je suis là ». Quand on voit l’énergumène, c’est tout de suite plus crédible. Spontané, Guillaume Gouix suit ses envies, ses instincts et prend les choses comme elles viennent. Mais Guillaume, le cinéma, c’est un jeu ou un métier ? « C’est devenu un métier maintenant ». Le sourire aux lèvres, le regard pétillant, on perçoit un jeune homme passionné par ce métier justement. Parlons-en… « Ce qui me fascine dans le cinéma, c’est de réunir des énergies et de voir tous ces gens travailler pour un même objet. Le travail d’équipe est concret ».
En 2008, Guillaume Gouix s’illustre dans Les Hauts murs : un second rôle qui lui vaut d’être remarqué par la critique. Petit à petit, les choses évoluent pour lui et les propositions se font plus nombreuses. À l’affiche de Réfractaire aux côtés de ses amis Grégoire Leprince-Ringuet et Arthur Dupont, il donne également la réplique à Léa Seydoux dans Belle épine, et à Isabelle Huppert dans Copacabana. Jusqu’ici, beaucoup de rôles de second plan. Il ne s’en plaint pas, loin de là et comme ses comparses, Guillaume aura lui aussi son premier rôle.
2011 : Devant...
Puis vint 2011… Une année chargée pour l’acteur qui multiplie les projets. Une année placée sous le signe des premières fois : premier 1er rôle, première comédie romantique, première expérience hollywoodienne et premier film… Mais commençons par le commencement.
En janvier, sort sur nos écrans le très intriguant Poupoupidou. De ce polar décalé, l’on retiendra Sophie Quinton, la révélation, mais aussi la prestation de Guillaume Gouix, dans la peau d’un policier taiseux mais audacieux. Surement grâce à son regard opalescent qui illumine l’écran, sa dégaine d’homme viril mais fragile… Quoi qu’il en soit, c’est décidé, ce jeune acteur, on le surveille de près. Deux mois plus tard, il est Jimmy Rivière, un gitan partagé entre sa foi et ses deux passions, la boxe thai et sa fiancée, Sonia (Hafsia Herzi). Son interprétation est saluée par la presse, qui retient sa « présence physique » (La Croix), sa « beauté fougueuse » (Excessif). Tout comme son héros, Guillaume Gouix semble hésiter entre calme et nervosité, ce qu’il ne nie pas : « C’est vrai qu’enfant, je partais assez vite au quart de tour… », dit-il en se tortillant sur son fauteuil. Si les années semblent l’avoir apaisé, on note que l’acteur a quand même bien du mal à rester en place. La faute à la promo, « le protocole, je n’aime pas trop ça. Ca m’angoisse un peu ».
Toujours pour la première fois, Guillaume Gouix est à l’affiche d’une comédie romantique intitulée Et soudain, tout le monde me manque, dans laquelle il donne la réplique à Mélanie Laurent. Un genre encore inexploré par le comédien qui murmure un discret : « C’était pas gagné avec ma gueule… ». Désireux de multiplier des expériences nouvelles, il n’a pas peur d’y aller et d’essayer car « on s’épuise vite à faire tout le temps la même chose ». C’est donc tout naturellement que Guillaume Gouix s’est essayé… au film hollywoodien ! À l’affiche du dernier Woody Allen, Minuit à Paris, l’acteur donne la réplique à Owen Wilson. Le réalisateur new-yorkais a fait appel à quelques acteurs français privilégiés et il en fait partie. Une expérience inoubliable que de tourner avec ce « mythe », « c’était fort de le voir lui, voir comment il travaille. Il sait exactement ce qu’il veut et ça va très vite ».
… et derrière la caméra
De devant à derrière la caméra, il n’y qu’un pas… Un pas qu’il franchit aujourd’hui et qui l’amènera jusqu’à la Croisette puisque son court métrage est présenté à la Semaine de la Critique du 64ème Festival de Cannes. Année chargée on vous disait ! Dans Alexis Ivanovitch vous êtes mon héros (« un titre à rallonge », il le reconnaît lui-même), le néo réalisateur raconte l’histoire d’un jeune garçon qui passe à côté de son histoire d’amour pour une question d’ego. Un premier film qu’il a écrit pour ses amis Swann Arlaud et Fanny Touron car s’il y a bien un truc auquel il croit Guillaume, c’est « le mouvement générationnel » : « ça m’intéresse d’avancer avec des gens de ma génération à tous les postes. » Et la transition de dirigé à dirigeant, c’est comment ? « Le tournage, j’ai adoré ! Ca s’est super bien passé, on a eu aucune galère, c’est même un peu flippant car un tournage ça peut pas se passer toujours comme ça ». Petit bémol concernant la post prod quand même… Pour lui qui aime bouger, se dépenser, travailler avec son corps, « c’est un truc de vampire, je suis vraiment fatigué là. Ca se voit non ? » . Non ça ne se voit pas Guillaume.
Comme beaucoup d’acteurs, Guillaume Gouix a eu envie de réaliser son propre film, ce qui nous amène à lui demander s’il se sent plus comme un acteur qui réalise ou un réalisateur qui joue, forcément : « En France, on met les gens dans des cases. Si j’ai envie de faire perchman, chef op, peu importe chacun sa vie ! On ne devrait pas coller des étiquettes tout le temps. Quand je joue, je suis acteur, quand je réalise je me considère comme réalisateur, quoi que ça c’est plus dur à assumer quand même de faire le petit chef… Ce qui me plait c’est de réunir des énergies et voir tous ces gens pour faire le même objet. Il n’y a plus beaucoup d’endroit dans notre société où les gens se réunissent pour faire la même chose, tout le monde fait son truc perso dans son coin, sa réussite. Dans le ciné, le travail d’équipe est concret et tout le monde travaille pour ça. » Passionné par ce qu’il fait, Guillaume aime jouer tout autant que diriger. Il n’aime pas un mais des métiers. Il n’aime pas se restreindre tant qu’il y a des possibilités, au même titre qu’un Louis Garrel ou un Guillaume Canet. Le premier long serait pour bientôt mais avant cela, direction les plateaux. Le jeu, lui manque un peu, non pas « jouer pour jouer », mais prendre le temps de choisir ses projets, ses aventures, de faire des rencontres, « parce qu’un film c’est comme une histoire d’amour ».
Bercé par le cinéma de Fuller, cet amoureux du cinéma a des envies de rencontres voire de tournage avec Xavier Beauvois et Claire Denis. Et Alain Chabat aussi, « il me fait mourir de rire ». On sent en lui une fougue, un amour sans faille pour le cinéma d’hier et d’aujourd’hui. On entre-aperçoit l’impatience d’un enfant à l’idée d’expérimenter de nouvelles sensations. On aime le recul qu’il a sur lui-même et sur sa profession : « Ça peut vite être grisant, il faut avoir un peu de distance. Rien n’est acquis, j’essaie de bien travailler. C’est ça qui compte ». Enfin, comme promis, Guillaume Gouix, dont le franc-parler s’inscrit dans sa démarche de sincérité, est quelqu’un d’honnête : « C’est quand même un putain de truc d’égocentrique d’être acteur ». Ça c’est dit.
Mathilde Degorce