Allocine: "The War Room", "American High", "Black", "White" et maintenant "The September Issue". Votre filmographie révèle un intérêt persistant pour la culture américaine et son fameux way of life. Montrer le visage des Etats-Unis a-t-il toujours été votre ambition ?
Non, ce n'est pas vraiment mon intention première. Ma volonté est avant tout de raconter des histoires sur des être humains. Ce sont les gens qui éveillent ma curiosité et qui me procurent de l'énergie. Je n'irai pas jusqu'à me considérer comme un sociologue, mais je suis heureux que mon travail laisse cette impression.
Qu'est-ce qui vous a inspiré pour réaliser un documentaire sur le milieu de la Mode et sur Anna Wintour ?
La Mode est un monde fascinant à explorer mais ce qui m'intéressait vraiment, c'était avant tout la personnalité d'Anna Wintour. Voici une femme dont le monde entier connaît le nom, mais ignore la méthode de travail, une femme que personne ne connaît vraiment. Si on lit les ouvrages écrits sur elle, on remarquera qu'ils tournent tous autour de sa façon de travailler avec les gens, mais jamais de son travail sur le terrain.
Aviez-vous des préjugés à son endroit, avant de tourner ? Votre opinion a-t-elle changé par la suite ?
Je n'avais pas vraiment de préjugés avant de tourner ce film. J'étais juste curieux de connaître sa façon de travailler, son but, sa foi absolue en son propre instinct, avec cette totale absence de doute lorsqu'elle prend une décision. Elle ne pense pas une seule fois : "mon Dieu ai-je bien pris la bonne décision ?", pas une seule fois, à aucun moment. Mais, en même temps, elle s'entoure de gens doués. Cela ne l'effraie pas d'avoir autour d'elle des gens volontaires qui ont du caractère et qui sont obstinés. En réalité, elle sait qu'elle a besoin d'eux.
Etait-ce l'idée d'Anna de réaliser un documentaire sur l'exemplaire de Vogue du mois de septembre ?
J'ai d'abord dit à Anna : " Ecoute, Je veux avant tout savoir comment tu travailles" et elle m'a répondu : "Si tu veux vraiment le savoir, tu devrais dans ce cas faire un film sur la création de cette édition, car tout ce que je fais, je le fais pendant la préparation de cet exemplaire. "
On a tendance à comparer facilement Anna Wintour avec Meryl Streep, qui l'incarne dans "Le Diable s'habille en Prada". Pensez-vous que le succès de votre documentaire soit lié à ce film ?
Oui, mais en même temps il y a tellement de caricatures de cette femme dans la culture populaire. Regardez une série comme Ugly Betty, ou Les Indestructibles des studios Pixar. J'ai même entendu dire que Johnny Depp s'était inspiré d'elle pour interpréter Willy Wonka dans Charlie et la chocolaterie de Tim Burton ; vous savez, avec ses cheveux lisses et ses énormes lunettes. En revanche, ce qui me désole un peu est d'entendre des gens dire qu'elle n'a rien de Meryl Streep. Il faut que le spectateur comprenne qu'il ne s'agit pas ici d'un personnage de fiction mais d'une personne réelle.
Certains critiques ont tant aimé le film qu'ils ont affirmé qu'il aurait dû faire l'objet d'une série TV. Avez-vous envisagé cette possibilité ?
J'y ai pensé en effet, car je connais bien le monde de la télévision. Mais je souhaitais avant tout faire un vrai long-métrage. Ce sujet se devait d'être un documentaire pour le cinéma car tout y est très cinématographique : Paris, New York et la mode sont tous des personnages de films. C'est ça le cinéma, aussi. Si vous faites de la télévision, c'est différent ; la télé, on ne la regarde pas vraiment.
Propos recueillis par par Fohnjang Ghebdinga