Chez Andrea Arnold, la naissance d’une idée commence toujours par une image qu’elle visualise dans sa tête. Pour Bird, c’était une silhouette, celle d’un homme nu, se tenant sur le toit d’une grande tour entourée de brume. “C’était mystérieux et magique. Je ne savais pas à l’époque qui il était ou ce qu’il allait devenir. Je me suis simplement demandé ce qu’il faisait là”, explique la réalisatrice multiprimée à AlloCiné.
Cet homme est devenu Bird, un homme étrange - incarné par Franz Rogowski - qui croise la route d’une jeune fille de 12 ans Bailey, issue d’un milieu défavorisé de Kent, en Angleterre. Elle se cherche, tente de construire sa vie dans un environnement compliqué et voit en la présence de cet inconnu l’arrivée d’un ange gardien venu la sauver.
“Je pensais à un acteur un peu androgyne pour l’incarner, quelqu’un peu différent” détaille la cinéaste. Puis elle a rencontré Franz Rogowski, poignant dans la peau d’un homme pas tout à fait comme les autres. Andrea Arnold n’aime pas vraiment expliquer le pourquoi du comment de ses films, notamment pour Bird, qui laisse libre cours aux spectateurs de faire leur propre interprétation. “Ce serait triste de tout expliquer. C’est aux gens de créer leurs propres idées.”
Bird est comme une toile blanche. Chacun y projette ce qu’il veut. À ses côtés, on découvre Nykiya Adams, une jeune fille de 14 ans qui signe ici ses premiers pas à l’écran. Elle a été repérée grâce à un casting sauvage comme pour beaucoup d’acteurs dans le cinéma d’Andrea Arnold. “Nous sommes allés dans les écoles près de là où nous avons tourné et elle était légèrement différence de ce que j’avais écrit”, révèle la réalisatrice.
“Elle avait une présence très forte, et c'est l'enfant dont je me souvenais le plus. Elle était un peu différente de ce que j'avais écrit, mais j'ai suivi mon instinct, poursuit Andrea Arnold. J’ai modifié l’écriture du personnage sur le scénario en fonction des éléments que j’apprenais sur elle, sur sa vie.” Héroïne idéale pour un film signé Andrea Arnold, Nykiya Adams est des plus touchantes.
Un film tourné avec des acteurs non professionnels
Le quartier visible dans Bird, Gravesend, se situe non loin de là où la cinéaste a grandi. Comme à son habitude, elle mélange acteurs professionnels (Barry Keoghan) et non professionnels. “Je suis heureuse de travailler comme ça, mais ce n’est pas facile, notamment à cause du manque de temps, ce qui est fréquent pour un film à petit budget.” Très souvent, la cinéaste change ses plans lorsqu’elle pense tomber sur des perles rares.
C’était le cas de trois frères et sœurs. “Dans le scénario, ils étaient différents, ils n’avaient pas le même âge mais ils étaient si beaux, ces trois-là. Si étonnants. Ils suffisaient de les laisser entrer dans n’importe quelle pièce pour qu’ils insufflent de la vie.” C’est cette énergie authentique et puissante, présente chez tous les acteurs qui ont participé au film, qui traverse Bird et lui donne toute sa beauté.
Propos recueillis par Thomas Desroches, à Cannes, en mai 2024.
Bird d'Andrea Arnold est à découvrir au cinéma