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    "La pire idée qui puisse être !" : avec 97 millions de dollars de pertes, cet échec a été le coup de grâce pour son studio
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Malgré les sommes parfois astronomiques injectées par les studios pour leurs films, il arrive que la sanction au box office soit absolument dévastatrice. La preuve avec "L'île aux pirates", dernier clou du cercueil de Carolco Pictures.

    Avec un budget de production s'élevant à 115 millions de dollars pour à peine 10 petit millions de dollars de recettes sur le territoire américain (18 millions si l'on considère le box office international), L'île aux pirates est notoirement et tristement connu pour être un des pires échecs au box office américain, voisinant avec les bides tout aussi colossaux de La Porte du Paradis, et le 13e guerrier de John McTiernan. Il fit perdre à sa société de production, Carolco Pictures, 97 millions $, soit, rapporté à l'inflation, plus de 195 millions de dollars actuels...

    L'aventure partait pourtant avec de bonnes intentions : conçu comme un Tentpole Movie, L'île aux Pirates devait rallumer la flamme du Swashbuckler; un terme anglo-saxon désignant les films de capes et d'épée et de pirates, à la manière de ses glorieux ancêtres que furent Capitaine Blood et autre Corsaire rouge...

    "Un film de pirates ? La pire idée qui puisse être !"

    Mais le film de Renny Harlin a eu l'effet inverse de celui escompté : il a tué le genre pendant près d'une dizaine d'années, jusqu'à l'arrivée d'un certain Pirates des Caraïbes. Le souvenir de l'échec de L'île aux pirates fut si cuisant qu'il hanta Disney, au point même que ses dirigeants tentèrent de débrancher le projet alors que le film était en phase de pré-production. "Un film de pirates ? "La pire idée qui puisse être !" se rappelait d'ailleurs Gore Verbinski, dans une passionnante (et longue) interview publiée sur le site Collider en mars 2021.

    L'île aux pirates a connu de nombreux problèmes, notamment le retrait de Michael Douglas et la reprise de son rôle par Matthew Modine. De véritables voiliers en bois incroyablement coûteux ont été construits puis reconstruits. Du budget initial de 60 millions $, l'enveloppe flamba rapidement pour atteindre 100 puis 115 millions $.

    Il a aussi durablement plombé la carrière de sa tête d'affiche, l'actrice Geena Davis, qui était à l'époque madame Harlin à la ville, et avait également monté pour l'occasion sa propre société de production pour ce film. Elle mettra des années à remonter la pente. Et encore, à la marge.

    Le clou ultime du cercueil de Carolco Pictures

    Techniquement, L'île aux pirates n'a pas tué Carolco, mais ce fut le dernier clou du cercueil de la société fondée par deux fameux investisseurs du cinéma, Mario Kassar et Andrew Vajna, en 1976. C'est elle qui avait notamment acheté les droits de la franchise Terminator, engageant à nouveau James Cameron et Arnold Schwarzenegger pour réaliser et interpréter Terminator 2 : Le Jugement dernier.

    Elle avait également assuré la production d'oeuvres comme Angel Heart, Cliffhanger : Traque au sommet, The Doors, Total Recall, Chaplin, Basic Instinct. Un très beau tableau de chasse effacé d'un coup de torchon par la mésaventure de L'île aux pirates. Carolco a disparu en 1996, après avoir vendu ses actifs à la Twentieth Century Fox pour 50 millions $. Et dire que le film devait justement être celui de la dernière chance pour la société, déjà en proie à de graves problèmes de trésorerie.

    Carolco Pictures

    Dans une douloureuse ironie, la société avait longtemps tergiversé sur un autre projet, qui lui coûta des millions de dollars en préproduction, et n'a jamais abouti. Le fameux film sur les croisades sur lequel travaillait Paul Verhoeven avec Arnold Schwarzenegger dès 1994, qui s'annonçait pourtant extraordinaire.

    Effrayé par l'aspect sulfureux de son sujet et aussi parce qu'elle avait largement surestimé ses capacités financières pour produire un tel film, Carolco Pictures préféra mettre tous ses oeufs dans autre panier jugé moins risqué, L'île aux pirates...

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