Ça parle de quoi ?
Une journaliste en disgrâce tente de sauver sa carrière en se tournant vers le podcast d'investigation. Tout en essayant de faire la lumière sur un étrange artefact qui pourrait être lié à une conspiration, elle commence à découvrir les mensonges au cœur de sa propre histoire…
Aux frontières du réel
Le 18 juillet 2018, le public français découvrait The Guilty. Un thriller danois particulièrement intense, qui avait marqué les esprits grâce à son dispositif : la caméra ne quittait jamais le bureau du policier se retrouvant confronté à une histoire d'enlèvement, qui ne communiquait que par téléphone avec la quasi-totalité des autres personnages du récit.
Un peu comme dans Locke, où Tom Hardy ne bougeait par de l'habitacle de sa voiture, et n'avait que des interactions vocales avec le reste du casting. Deux longs métrages auxquels on pense, de façon plus ou moins prononcée, devant ce Monolith. Qui, à l'exception de deux scènes illustrant les paroles de certains interlocuteurs (et rappellent des cinématiques de l'excellent jeu Control), ne quitte jamais la maison de son héroïne.
Une habitation isolée autant que cette journaliste en disgrâce (Lily Sullivan, vue dans Evil Dead Rise) semble l'être, comme perturbée par un passé trouble sur lequel la lumière sera faite au gré de son enquête sous forme de podcast, sur un étrange artefact qui pourrait déboucher sur une conspiration. En sachant qu'elle et nous ne verrons personne d'autre, les dialogues étant des conversations téléphoniques et les monologues des messages vocaux.
Outre une palette de couleurs allant du gris au bleu, en passant par le vert sombre (pour suggérer l’isolement, le mystère et l’effroi), l'un des plus gros défis de Monolith reposait sur le son. L'équipe s'est ainsi assurée que le matériel utilisé soit adéquat, et un acteur était présent sur le plateau, hors-champ, pour jouer les autres personnages grâce à un système de liaison audio lui permettant de parler dans les écouteurs de l'héroïne. Ce qui a pour effet de renforcer l'isolement de cette dernière.
Il y a quelques années, ce dispositif aurait pu être au coeur d'un épisode conceptuel d'X-Files, avec qui Monolith partage quelques points communs. Dans sa manière de naviguer entre thriller et science-fiction déjà. Et la co-scénariste cite The Arrival avec Charlie Sheen en radioastronome convaincu de la preuve d'une existence extra-terrestre.
Malgré une petite baisse de rythme à mi-parcours, fréquente lorsque l'on s'impose un cadre aussi strict et minimaliste, Monolith parvient néanmoins à trouver sa propre identité, en écho au cheminement intérieur de son héroïne. Surtout dans son dernier tiers, qui rajoute un peu de frissons à l'ensemble, et lie passé et présent autour de la question de la vérité. Evidemment très actuelle, dans l'ère des fake news.
"Un tour de montagnes russes, un thriller science-fiction prêt à divertir, et bousculer le spectateur"
"Notre conception de la vérité est qu’elle est immuable", dit le réalisateur australien Matthew Vesely, dont c'est le premier long métrage, dans la note d'intention. "Elle ne laisse aucune place à l’interprétation, à l’incompréhension ou à la manipulation. Mais avec les progrès technologiques, avec le développement exponentiel des communicants à travers le monde, la vérité est devenue de plus en plus malléable, de plus en plus impermanente."
"L’histoire est écrite par les vainqueurs, et la vérité est écrite par les puissants. Ceux qui peuvent contrôler le récit, contrôlent le monde. Les puissants déformeront ou même falsifieront la vérité plutôt que de renoncer à leur pouvoir (...) Je souhaitais exprimer mon récit dans un style palpitant, terrifiant et captivant. C’est un tour de montagnes russes, un thriller science-fiction prêt à divertir, et bousculer le spectateur." Au moins vous êtes prévenus quant à ce film qui allie le fond et la forme.