Ça parle de quoi ?
Été 1900, au cœur d'une vallée du sud de la Suisse. Elisabeth, 17 ans, est sur le point de prononcer ses vœux après 5 ans passés au couvent. La mort soudaine de sa sœur l'oblige à retourner dans la ferme familiale pour assumer son nouveau rôle d'aînée. Elisabeth se retrouve vite asphyxiée par cette vie de labeur et obsédée par les mystères qui entourent la disparition de sa sœur. Elle va alors chercher à s'affranchir de son statut et de ses nouveaux engagements.
Un regard de cinéaste à suivre
Lauréate du prix Women in Motion, Talent émergent, au Festival de Cannes 2023, Carmen Jaquier a su marquer les esprits des cinéphiles dès 2014 avec son premier court métrage, Le Tombeau des filles, primé à Locarno. Explorant la notion de la découverte de la féminité, cette première œuvre a posé la pierre angulaire du cinéma de la Suissesse qui a ensuite continué à sonder les questionnements d'émancipation des femmes dans quatre autres courts métrages.
Cette année, la réalisatrice signe son tout premier long métrage qui impose un peu plus le regard et le style d’une cinéaste dans le paysage du 7e Art. S’affranchissant des descriptions masculines dans la construction de l’identité féminine, Carmen Jaquier transpose ici sa thématique dans l’univers de la foi et de la religion. Pour ce faire, elle emprunte autant à La Leçon de piano (Jane Campion) qu’à The Tree of Life (Terrence Malick) ou aux Sorcières d’Akelarre (Pablo Agüero), en passant par des références françaises telles que Portrait de la jeune fille en feu (Céline Sciamma) ou encore Sybil (Justine Triet).
Récompensé dans plusieurs festivals (prix du cinéma suisse, prix de la critique à Zurich, prix de la mise en scène à Marrakech), et présélectionné pour représenter la Suisse aux Oscars 2024, Foudre se dévoile comme une odyssée subversive et sensorielle où l'éveil des sens se confronte à une société corsetée. Éclairé par la photographie de Marine Atlan (Le Ravissement) et l'interprétation habitée de Lilith Grasmug (Oranges sanguines) dans le rôle-titre d’Élisabeth, ce drame se déroulant en 1900 trouve ses racines dans un fait divers.
La femmes et la foi
“Plusieurs moments fondateurs et révélateurs ont marqué ma réflexion et l’écriture du film. Deux adolescents qui s’étaient immolés par le feu dans une banlieue de Berlin, un fait divers décrit en trois lignes dans un journal, raconte-t-elle. Cette tragédie m’a rappelé combien je me sentais concernée par cette période appelée adolescence et par les émotions qui la traversent ; injustices, rejets, désirs, rage…”
Si elle a choisi de transposer son récit dans le milieu de la religion catholique, c’est pour mieux souligner les sentiments et émotions ressentis par les femmes au cours de leur vie, qui plus est durant leur adolescence.
“Il était important pour moi de partir de la religion catholique, qui a beaucoup à voir avec les sentiments de honte et d’infériorité que peuvent ressentir les femmes, et de la confronter à une réflexion plus large, une quête pour une sexualité douce, amicale et bienveillante. Un retour à soi, au corps que nous sommes et à la transcendance. Dieu, libéré de la pratique catholique, devient un territoire infini de réflexion.”
Foudre, véritable expérience de cinéma, est à voir sur grand écran dès le 22 mai 2024.