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    Une histoire "plus vraie qu'on ne le croit" : les actrices de Scandaleusement vôtre se lâchent
    Maximilien Pierrette
    Journaliste cinéma - Tombé dans le cinéma quand il était petit, et devenu accro aux séries, fait ses propres cascades et navigue entre époques et genres, de la SF à la comédie (musicale ou non) en passant par le fantastique et l’animation. Il décortique aussi l’actu geek et héroïque dans FanZone.

    Réunies à l'affiche de "Scandaleusement vôtre", où il est question de lettre d'injures, Olivia Colman et Jessie Buckley parlent de gros mots (au cinéma et en-dehors) à notre micro. Avec beaucoup d'enthousiasme.

    En décembre 2021, elles étaient à l'affiche de The Lost Daughter de Maggie Gyllenhaal, qui leur avait toutes deux valu une nomination aux Oscars mais dans lequel elles ne se donnaient pas la réplique, puisqu'elles jouaient le même personnage à des âges différents.

    Aujourd'hui, Olivia Colman et Jessie Buckley sont bien face-à-face dans Scandaleusement vôtre. Sur un registre plus léger et avec un langage plus fleuri, puisque le long métrage revient sur une drôle d'histoire vraie sur fond de lettres d'insultes, dans l'Angleterre des années 1920.

    L'occasion de parler injures avec deux actrices qui s'en sont données à cœur joie : "Merci de nous avoir fait dire des gros mots", nous dira Olivia Colman à la fin de l'entretien. Plaisir partagé.

    Scandaleusement vôtre
    Scandaleusement vôtre
    Sortie : 13 mars 2024 | 1h 40min
    De Thea Sharrock
    Avec Olivia Colman, Jessie Buckley, Anjana Vasan
    Presse
    3,3
    Spectateurs
    3,6
    louer ou acheter

    AlloCiné : Le film nous parle d'une histoire "plus vraie qu'on ne le croit". La connaissiez-vous avant de lire le scénario, ou l'avez-vous découverte en même temps que le projet ?

    Jessie Buckley : Non.

    Olivia Colman : Non, moi non plus. Nous l'avons découverte grâce au scénario.

    Jessie Buckley : Et nous avons appris que cela s'était vraiment produit dans les années 1920. Que ces lettres étaient réelles, qu'elles avaient fait scandale à l'époque jusqu'à provoquer des débats au Parlement et faire les gros titres dans la presse du pays. Deux femmes ont même fait de la prison à cause de cette histoire ! C'était à la fois choquant, et très excitant. Je me suis dit : "Dieu merci, il y avait des femmes mal élevées dans les années 20 !" (rires)

    Vous parlez d'être mal élévé : à quel point est-ce un défouloir que de pouvoir jurer et dire autant de gros mots dans un seul film ?

    Jessie Buckley : C'est tellement le pied !

    Olivia Colman : Mais c'est le cas pour n'importe quel être humain. Si l'on vous permettait de dire les pires insanités pendant une journée, vous vous sentiriez tellement bien à la fin.

    Jessie Buckley : Tu es complètement soulagé ensuite, et tu passes une bonne nuit.

    Si l'on vous permettait de dire les pires insanités pendant une journée, vous vous sentiriez tellement bien à la fin

    Et ça a dû être d'autant plus libérateur ici, dans un long métrage anglais, que vous avez toutes deux fait des films américains, où les choses sont plus strictes sur ce plan puisque deux "fuck" valent d'être classés R (interdit aux moins de 17 ans non accompagnés).

    Olivia Colman : C'est vrai, oui. Et c'est d'autant plus amusant que le système de classification aux États-Unis nous laisse perplexes : là-bas, la violence ça passe. Mais des gros mots ou un téton, quel scandale ! Alors qu'en France ou en Grande-Bretagne, tout le monde est tranquille sur le sujet (rires)

    J'ai justement vu un film hier soir, "Tout sauf toi" avec Sydney Sweeney et Glen Powell, et c'est après avoir entendu deux "fuck" en cinq minutes que j'ai compris qu'il était classé R aux États-Unis. Et pareil avec le vôtre : au bout de deux minutes, il n'y avait plus de doute.

    Jessie Buckley : (elle éclate de rire) Et après deux heures vous vous dites "Il ne sortira jamais" (rires)

    Quentin Tarantino et Martin Scorsese doivent être jaloux.

    Olivia Colman : J'espère ! Ils n'ont qu'à venir faire un film en Europe.

    Quand Olivia Colman et Jessie Buckley s'amusent avec nous capture d'écran
    Quand Olivia Colman et Jessie Buckley s'amusent avec nous

    Avez-vous pu improviser les gros mots que vous prononcez dans le film, ou fallait-il rester fidèle à ce qui était écrit ?

    Olivia Colman : C'était très spécifique, très étrange, comme façon de jurer. Ce qu'il y a dans le scénario de Jonny Sweet, et même les vraies lettres, était plus drôle que ce que nous aurions pu inventer. Donc il n'y a pas vraiment eu d'improvisation sur ce plan.

    Jessie Buckley : Et nous n'en n'avions pas besoin, tellement il y en avait déjà (rires)

    Olivia Colman : Il n'y avait pas de place pour en rajouter.

    Jessie Buckley : Je me demande même s'il y en a que nous avons laissés de côté. Il faudrait revoir le film.

    Quels sont les gros mots que vous utilisez le plus au quotidien ?

    Jessie Buckley : "Fuck" !

    Olivia Colman : Oui, "fuck" je le dis tous les jours. "Shit" aussi, et "for fuck's sake", qui me rappelle cette vidéo qui date du confinement : une petite fille qui a l'air toute mignonne dans son haut rayé, avec une barrette dans les cheveux, qui joue avec des fleurs quand des bulles passent. Et elle dit : "Des bulles... Revenez les bulles. Oh fuck's sake !" Puis elle retourne à ses plantes. Le fait qu'elle connaisse l'expression et sache quand l'utiliser, c'était drôle et mignon.

    Connaissez-vous des gros mots en français ?

    À travers ces gros mots et ces satanées petites lettres, "Scandaleusement vôtre" parle aussi de la place des femmes au début du XXè siècle et leur lutte contre le patriarcat. L'avez-vous perçu ainsi, au-delà du côté amusant de dire des injures ?

    Olivia Colman : Oui, mais nous avons revu le film ensemble pour la première fois hier, après avoir dit, à longueur d'interviews, à quel point c'était drôle de le faire. Sauf que nous nous sommes retrouvées à nous tenir la main et pleurer, car nous avions oublié les passages émouvants. Car ça parle de femmes qui se battent pour être vues et remarquées, pouvoir être libres quant à leur esprit, leur corps et leurs choix. C'était horrible à l'époque.

    Dieu merci nous avons évolué, même s'il nous reste un long chemin à parcourir. On pourrait clairement commencer par l'égalité des salaires entre hommes et femmes par exemple. Mais c'est fascinant, tout comme ce que montre le film : que les policières ne pouvaient pas avoir d'enfants ou de mari. N'est-ce pas dingue ?

    Le film parle de femmes qui se battent pour être vues et remarquées, pouvoir être libres quant à leur esprit, leur corps et leurs choix

    Jessie Buckley : Et une mère célibataire serait stigmatisée. C'est peut-être même encore le cas à certains endroits, alors que ce sont des super-héroïnes pour moi. Elles sont incroyables. Les pères célibataires aussi d'ailleurs.

    Olivia Colman : Mais il est vrai qu'une femme devait en arriver à mentir sur son statut marital pour ne pas être ostracisée.

    Jessie Buckley : Et cela poursuivrait sa fille toute sa vie.

    Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Paris le 14 février 2024

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