Utilisé par les officiers de la SS, le terme "zone d'intérêt" désigne les 40 kilomètres carrés qui entouraient Auschwitz, le plus grand camp de concentration de la Seconde Guerre mondiale.
C'est aussi le titre du quatrième film de Jonathan Glazer (Birth, Under The Skin) lauréat du Grand prix de la 76e édition du Festival de Cannes. Dès sa présentation, le long métrage avait renversé la Croisette. Il sort ce 31 janvier, quatre jours après les 79 ans de la libération du camp.
VOISINS DE L'HORREUR
Entre 1940 et 1945, près de 1,1 million de personnes ont été déportées vers Auschwitz. Mais que se passait-il à quelques mètres de l’innommable ? À quoi ressemblait le contrechamp de la barbarie ?
Adapté du roman éponyme de Martin Amis - refusé par Gallimard -, La Zone d'intérêt suit la vie domestique de la famille du commandant Rudolf Höss (Christian Friedel), qui répond aux ordres d’Hitler.
Seul un mur de ciment se dresse entre l’horreur et leur quotidien. Les Höss, en particulier la femme, Hedwig - glaçante Sandra Hüller, star d'Anatomie d'une chute - , passe son temps à perfectionner la maison et le jardin - qui fait écho à celui de Mon Oncle de Jacques Tati.
Les domestiques - des Juifs employés par la famille - s’affairent pour s’occuper de ce décor surréaliste. L’épouse, elle, accueille ses amis, sa mère, essaye les vêtements des déportés, tandis que les enfants jouent comme si de rien n’était.
L'ART DU SON
Forcément provocateur, ce concept permet au réalisateur d’explorer le visage le plus sombre de l’être humain, sourd et aveugle face à l’atrocité. Peut-on réellement s’habituer à la cruauté et l’inviter dans notre quotidien ? Entre cinéma traditionnel et expérimental, le film choque particulièrement parce qu’il ne montre rien. Tout relève du hors-champ.
Dans La Zone d'intérêt- nommé à cinq reprises aux Oscars, dont celui du Meilleur film -, le son créé par Johnnie Burn est un personnage à part entière. Le bruit des fours crématoires, les cris des déportés... Il témoigne de la terreur qui n'apparaît pas à l'écran. Majeure, l'œuvre de Jonathan Glazer montre la Shoah comme jamais auparavant.
La Zone d'intérêt de Jonathan Glazer, ce 31 janvier au cinéma.