On l’attend depuis vingt ans : le retour de John Woo à Hollywood depuis son dernier film dans la cité des anges, Paycheck avec Ben Affleck. Et pour ce come-back tant attendu, John Woo signe Silent Night, un revenge movie de Noël.
Le film s’ouvre sur une poursuite dans une ruelle filmée au ralenti. Un homme désespéré (Joel Kinnaman), portant un pull de Noël et les mains couvertes de sang, livre une bataille démesurée, seul contre deux voitures remplies de malfrats.
Il est la victime collatérale d’une guerre de gangs, avec des affreux vraiment affreux qui se tirent dessus en pleine rue et à toute vitesse. Et bien sûr, une balle perdue fait une victime. Un petit garçon, le fils de Brian, l’homme au pull de Noël.
À la fin de cette scène d’ouverture, Brian reçoit une balle dans la gorge et c’est le trou noir. Quand il se réveille, il est à l’hôpital, sévèrement amoché et il a perdu l’usage de sa voix. Et cela va devenir l’astuce centrale du film qui ne contient pratiquement aucun dialogue.
À défaut de parole, John Woo doit alors raconter son histoire par l’image, le jeu d’acteurs… En l’occurrence, cela consiste à voir Joel Kinnaman, les larmes au bord des yeux, pris soit de désespoir, soit d’une rage meurtrière.
Ce qui est plus déstabilisant, c’est que John Woo fait taire l’ensemble de ses personnages comme s’ils étaient tous privés de toute forme d’expression orale.
Après avoir sombré dans une dépression sévère, aggravée par une consommation excessive d’alcool, Brian se ressaisit et décide d’entreprendre sa vengeance. Pour ce faire, il se donne huit mois pour se construire un physique d’acier et, pour résumer, apprendre à conduire et à se battre comme John Wick, en regardant des tutos sur YouTube.
Pendant ce temps, sa femme (Catalina Sandino Moreno) finit par le quitter à force de ne pas être entendue et de le voir s’enfermer dans une obstination qui ne pourra le conduire qu’à la mort.
Cependant, il ne faut pas s’attendre à du John Woo d’antan. Ce n’est pas le "bain de sang héroïque" des années glorieuses de sa carrière, ni le mélodrame d’action immersif et exagéré de sa période américaine.
Il fut un temps où John Woo faisait une sorte de démonstration pour nous montrer à quel point la violence – d’un point de vue cinématographique – pouvait être amusante quand elle était filmée avec brio.
On ne retrouve pas cette vision dans Silent Night malheureusement. On ne s’amuse ni avec les bons ni avec les méchants. Il n’y a pas d’aspect jouissif dans les séquences d’action que John Woo filme (un peu trop souvent) au ralenti et avec un regard daté des années 1980. I
l revient constamment soit sur la mort de l’enfant, soit sur des souvenirs heureux qui sont autant de coups de poignard pour Brian.
On en sort avec un petit goût d'inachevé et un peu de frustration alors qu'on devine aisément le plein potentiel du film. Seuls les fans ultimes du maître de l’action peuvent y trouver leur compte, en faisant preuve de beaucoup d’indulgence.